Le 13 novembre prochain, Pierre Cardin inaugurera à Paris un musée regroupant 200 modèles haute couture mais aussi des meubles de design, emblématiques de l'oeuvre du couturier.
Motifs géométriques, silhouettes futuristes, couleurs vives: à 92 ans, le patriarche de la mode Pierre Cardin livre "toute sa vie de travail" dans son musée, fraîchement déménagé de la banlieue vers le coeur de Paris pour plus de visibilité.
Robes chasubles, à cibles ou à cerceaux, jupes à lanières, en vinyle, robes du soir... Le couturier s'est inspiré ici "d'un manège", là de "satellites", plus loin de "soufflets" entre des wagons ... Plus de 200 modèles, des meubles, chapeaux, chaussures et bijoux: les créations ont été transférées du musée de Saint-Ouen où elles étaient installées depuis 2006, vers cette ancienne fabrique de cravates du Marais, organisée sur trois niveaux.
En banlieue, beaucoup de gens ne venaient pas, explique Pierre Cardin, qui espère attirer plus de monde. A l'entrée, deux mannequins masculins casqués en combinaison accueillent le visiteur, fidèles à l'esthétique futuriste du couturier-star des années 60, lui-même photographié en tenue de cosmonaute. Un futurisme teinté de rétro dans cet espace de près de 1.000 m2 avec moquette et escaliers en colimaçon. Les modèles sont dans l'ensemble disposés dans un ordre chronologique, quelques panneaux fournissent de rares éléments d'explication. Les visites guidées, c'est la conservatrice du musée, Renée Taponier, qui s'en charge. L'entrée coûte 25 euros.
Avec ce musée, Pierre Cardin veut livrer "au monde l'héritage d'un couturier parti de zéro". "J'ai eu la chance de réaliser tout ce que je voulais sans avoir besoin de banquier, d'autorité, j'ai été un homme libre depuis l'âge de 20 ans", dit ce "self made man", émigré d'Italie. Visionnaire et mécène, il est à la tête d'un empire mondial allant de la mode à la restauration (Maxim's) en passant par les parfums et l'hôtellerie, qu'il tente de vendre depuis 2011 et évalue lui même à un milliard d'euros.
Le bouillonnant designer est propriétaire du château du marquis de Sade à Lacoste, dans le sud de la France, du palais Bragadin à Venise où a vécu Casanova, du Palais Bulles face à la baie de Cannes, mais ses projets immobiliers n'ont pas toujours abouti ni été exempts de controverse (Palais Lumière à Venise, golf dans le Luberon...) "J'ai des idées bizarres, qui surprennent mais c'est ce qui fait ma personnalité", résume-t-il.
Le doyen des créateurs continue à faire des défilés de temps en temps. "C'est la jeunesse qui fait la mode, pas les vieillards. Moi, je fais partie des vieillards mais je suis resté jeune", dit-il. Pour autant, il ne cite pas d'héritiers dans la nouvelle génération et regrette la confusion entre création et élégance: "la création est tellement diverse. Elle ne s'affirme pas comme auparavant, Balenciaga, Chanel, Cardin, Courrèges! la création, c'est être reconnu sans mettre le nom. L'élégance n'est pas suffisante". Mais "je ne vois pas les autres (créateurs), j'ai tellement à faire personnellement. Et puis je n'ai pas à les juger en réalité, ils font leur travail, moi je fais le mien".