"Rue des Archives" revient sur les 50 ans de la tour Montparnasse. Projet pensé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, elle s'est imposée avec ses 200 mètres de hauteur dans le paysage parisien au début des années 70. Un bâtiment qui continue de faire polémique.
"C'est quand même plus l'architecture d'antan, de chez nous, en France", s'indigne un passant interrogé par la télévision française. Nous sommes en 1971. La tour Montparnasse n'est pas encore achevée. Mais déjà, elle suscite des réactions très tranchées des Parisiens.
Pour cette autre piétonne, la modernité de la tour de 210 mètres est à saluer. "Moi ça ne me dérange pas. Je suis pour le moderne", déclare-t-elle au micro de la 2e chaîne, en 1972.
Et c'était là tout le projet des pouvoirs publics, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Faire entrer Paris dans l'ère de la modernité. "Contrairement à d'autres villes en France et dans le monde, Paris n'a pas été détruite durant la guerre. Mais on y trouve des îlots insalubres et vétustes", explique Pierre-Nicolas Durand, réalisateur du documentaire "Tour Montparnasse, un gratte-ciel à la française" (France 3 Paris Île-de-France, 2023). "Les autorités veulent améliorer la vie en y construisant des logements modernes. Et il y a cette gare à renouveler." Un prétexte tout trouvé pour transformer "tout un quartier".
Des pieux à 70 mètres dans le sol de Montparnasse
Mais que construire donc à la place de cette gare Montparnasse vieillissante, et d'une partie de son emprise ferroviaire ? Entre le lancement du projet et l'inauguration de ce nouveau quartier s'écouleront plusieurs années, entre obstacles techniques et recours judiciaires. 15 ans en tout, dont dix ans pour le permis de construire.
Le savoir-faire, en matière de tours, est américain, mais l'ambition est bel et bien française. Et c'est le promoteur Jean-Paul Aaron qui mettra en musique le projet. Une opération d'emblée soutenue par les pouvoirs publics, André Malraux, Edgar Pisani, Georges Pompidou en tête.
Principale difficulté technique, le sol de Montparnasse sur lequel doit reposer une construction de 150 000 tonnes (soit 15 fois la Tour Eiffel). "A Paris, il faut aller chercher la craie très en profondeur", explique Pierre-Nicolas Durand. Des pieux seront ainsi enfoncés à 70 mètres dans le sol de la capitale pour supporter le colosse de béton. C'est par la suite au rythme de deux mètres par jour que s'élancera la tour dans le ciel de Paris.
Une tour mal-aimée
"Les amoureux du Paris traditionnel ne s'habituent pas à la tour", commente la journaliste de l'ORTF, dans un reportage du 20 septembre 1971. Micro-trottoir de Paisiens à l'appui.
Mais pour le réalisateur, "cette tour montre aussi qui nous sommes, avec nos bons côtés, et notre côté râleur".
"Cette tour a été aimée avant la crise du Covid. Jusqu'à 1,2 million de touristes sont allés sur la terrasse. Les gens qui l'ont construite l'aiment beaucoup. Et les gens qui y travaillent l'aiment beaucoup, pour la plupart."
Pierre-Nicolas Durand, réalisateur de documentaires"Rue des Archives" - 9 juin 2023
La tour Montparnasse pourrait-elle disparaître du paysage parisien ? Peu probable. La tour reste une vaste copropriété privée. Et "on ne demande pas à plus de 300 copropriétaires de démolir leur bien", poursuit Pierre-Nicolas Durand.
Quant à la réhabilitation de la tour Montparnasse, elle semble très incertaine. Une tour plus transparente, végétale... Tel était le projet du groupement Nouvelle AOM, retenu à l’issue d'un concours international, en 2017. La tour devait d'ailleurs prendre un peu de hauteur lors de cette métamorphose. A l'horizon 2024.
📲 "Rue des Archives", c'est chaque vendredi, à 11h50, sur France 3 Paris Île-de-France. Retrouvez l'intégralité du numéro #30 consacré à la tour Montparnasse.