Voiture de police incendiée à Paris en 2016 : début mardi d'un procès sous haute tension

Un policier parant des coups de barre de fer pendant que sa voiture s'embrase en plein Paris en mai 2016 : huit personnes sont jugées à partir de mardi pour cette attaque retentissante, survenue dans un climat tendu de mobilisation contre la loi Travail.

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C'était le 18 mai 2016, en pleine journée. Une voiture de police, deux fonctionnaires à bord, est bloquée dans la circulation sur le quai de Valmy à Paris.

Non loin, place de la République, se tient une rare manifestation "contre la haine anti-flics", tandis qu'un collectif dénonçant les violences policières a appelé à un contre-rassemblement.

Un groupe de participants à cette contre-manifestation, interdite par les autorités, entoure la voiture de police.

Les images des agresseurs attaquant le véhicule à coups de pied ou de plot métallique, frappant un policier et lançant une fusée de détresse dans l'habitacle, deviennent virales sur internet. Comme celles de ce géant en uniforme parant des coups de barre de fer avec un sang-froid qui lui vaudra le surnom de "policier kung fu", pendant que la voiture s'embrase.
Kevin Philippy a été décoré peu après de la médaille d'or de la sécurité intérieure, tout comme sa collègue Allison Barthélémy, qui dira aux enquêteurs avoir "cru mourir".

Trois jeunes hommes, identifiés par un témoin anonyme, sont très vite arrêtés : Angel (23 ans aujourd'hui) et Antonin Bernanos (29 ans), et Bryan Morio (22 ans). Ces étudiants en géographie, sociologie et histoire/sciences politiques sont décrits comme "membres de la mouvance radicale ultra-gauche" par les enquêteurs, qui identifieront au total neuf protagonistes.

Huit comparaissent mardi, mercredi, jeudi et vendredi après-midi devant le tribunal correctionnel de Paris. Un neuvième homme, né en 1989 et vivant en Suisse, qui aurait lancé la fusée de détresse, fait l'objet d'un mandat d'arrêt.

D'un crime à des délits 

L'enquête, menée au pas de charge, a donné lieu à des controverses. Il est apparu rapidement que le témoin anonyme ayant permis les premières arrestations était un policier, ce qui a suscité des protestations des avocats.

Par ailleurs, les enquêteurs ont d'abord reproché à Angel Bernanos d'avoir frappé le policier, avant d'attribuer les faits à un autre prévenu, porteur d'une veste semblable. Ce revirement illustre l'une des difficultés majeures de l'enquête : celle de l'identification de protagonistes tous vêtus de noir, aux visages dissimulés.

La détention pendant dix mois d'Antonin Bernanos a indigné ses professeurs et mobilisé jusqu'à la Ligue des droits de l'Homme. A l'inverse, la "requalification" des faits au cours de l'enquête n'est pas bien passée auprès des policiers.

Partie d'un crime passible des assises, la tentative de meurtre sur policiers, la justice qualifie les faits de délits, certes passibles de peines lourdes, mais jugés en correctionnelle. Les huit prévenus présents seront jugés pour "participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences ou de dégradations", délit passible d'un an de prison.

Cinq sont aussi poursuivis pour des "violences aggravées sur policiers en réunion", punies de jusqu'à dix ans d'emprisonnement. Certains ont reconnu les faits qui leur sont reprochés. D'autres ont nié toute agression.

Grogne des policiers

Le procès pourrait raviver à la fois la rancoeur de militants qui crient au harcèlement et aux violences policières, et la grogne de policiers qui se disent constamment agressés.

"Il y a une volonté de pénaliser la lutte sociale en faisant un exemple", estime Me Jérémie Assous, qui défend Bryan Morio. "C'est arrivé à un moment charnière. Les policiers avaient décidé de s'exprimer et de s'identifier politiquement", analyse Me Arié Alimi, avocat d'Antonin Bernanos. Selon lui, "l'affaire a été instrumentalisée par l'Etat".

Le Premier ministre Manuel Valls avait réclamé des "sanctions implacables". C'est aussi ce que demande Jean-Claude Delage, patron du premier syndicat de policiers, Alliance, partie civile au procès.
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