Un entrepreneur du bâtiment qui voulait s'arroger par les menaces et la corruption un monopole sur les menus travaux dans la cité des Beaudottes, l'une des plus sensibles de Seine-Saint-Denis, a été condamné lundi à 14 mois de prison ferme.
Cet entrepreneur de 31 ans a été déclaré coupable d'extorsion à l'encontre d'i3F, l'un des premiers bailleurs sociaux de France, et de corruption active de ses gardiens, par le tribunal correctionnel de Bobigny. Il n'a plus le droit de se rendre à Sevran et devra verser 70.000 euros à i3F. Malgré les faiblesses du dossier, qui reposait sur des témoignages parfois peu précis, émanant souvent de ses propres concurrents, le tribunal a considéré qu'il s'était bel et bien arrogé par la force, pendant deux ans et demi, le marché des travaux et menues réparations dans les HLM du quartier des Beaudottes, par ailleurs miné par le trafic de drogue. Ce gérant d'entreprise "faisait régner la terreur", "mangeait des parts de marché et menaçait ceux qui voulaient résister", avait déclaré l'avocat de i3F, Georges Holleaux. "Terrorisés", de nombreux employés ne voulaient plus venir travailler, avait-il souligné.
Selon l'enquête, le prévenu et les salariés de sa société AFI graissaient la patte des gardiens pour qu'ils lui commandent des travaux, menaçaient certains concurrents pour qu'ils n'interviennent pas dans "leur" cité, et en rackettaient d'autres. "C'est vrai, j'ai dépassé un peu les limites (...) J'ai peut-être une façon de parler qui est un peu agressive", a reconnu le prévenu, qui a nié avoir jamais été violent physiquement. Il a souligné que c'était le bailleur lui-même qui lui avait mis le pied à l'étrier en lui conseillant de lancer sa société pour travailler aux Beaudottes.
Seul i3F a porté la charge lors du procès, les autres sociétés qui se sont dit victimes ne s'étant finalement pas portées partie civile. Au cours de l'enquête, trois autres personnes avaient été mises en examen mais ont bénéficié de non-lieux. L'entrepreneur, qui a déjà fait 15 mois de détention provisoire, a également été reconnu coupable d'abus de bien social et de blanchiment. Avec l'argent de la société, il s'était payé des vacances dans un hôtel-club en Turquie, avait loué une Jaguar, ou encore acheté barbecue et écran plasma.