Mardi 17 décembre, un jeune de 20 ans a été abattu à Aix-en-Provence, sur fond de trafic de drogue. Dans cette ville des Bouches-du-Rhône, le narcotrafic prend de plus en plus d'importance et nuit au bon vivre des habitants.
“Le quartier se noircit de plus en plus”. Jimmy Kada est gérant d'un bar à Encagnane, à Aix-en-Provence. Depuis plusieurs années, il assiste impuissant à la montée de l’insécurité, avec le développement d’un réseau de trafiquants de drogue.
“Il y a des dealeurs, il y a des acheteurs de drogue. Ça peut commencer dès 11h jusqu'à 2h du matin, derrière, sur la place, sur les petits murets, sur les escaliers”, décrit le gérant qui observe les actions depuis la fenêtre de son bar.
"On ne voit ça que dans les films"
Il se souvient de ce jeudi 20 avril, lorsqu’il a entendu les balles cribler son établissement aux alentours de 22 heures. “C'était un soir où les gens étaient un peu en terrasse. On avait un peu de monde. J’étais à l’extérieur pour la première fois”, explique Jimmy, la gorge nouée.
“J’ai entendu des bruits sourds. Au départ, je croyais que c’étaient des pétards et puis finalement c’étaient des tirs à la kalachnikov”, ajoute l’homme affolé qui a fini par se jeter par terre. Ce jour-là, les assaillants font 4 blessés dont un mineur de 17 ans.
Depuis, le quartier est victime de sa mauvaise réputation. “Vous savez, ça fait drôle de recevoir des balles sur vous. On ne voit ça que dans les films”, souligne Jimmy, qui travaille dans la crainte d’un jour mourir à cause de l’une d’entre elles. “Les gars, ils viennent avec des kalachnikovs et ils tirent sur n’importe quoi et n’importe qui”, renchérit le vieil homme, qui ne reconnaît plus son quartier autrefois si paisible. Aujourd'hui, il entend régulièrement des tirs en l'air, sur les volets...
Des pertes considérables pour les commerçants
À tel point qu’il l’avoue : “je vais quitter le quartier si ça continue”. Car à Encagagne, les rues sont désertes passées 18 heures. Les personnes âgées craignent de sortir. Seuls les guetteurs s’aventurent désormais dans le quartier, malgré le renforcement de la surveillance policière.
“Ça crée une mauvaise ambiance et moi ça me crée d’énormes soucis au niveau de mon commerce parce que les recettes baissent de plus en plus. Entre les charges, le gaz, l’électricité et la clientèle qui ne vient plus, je ne sais pas si je vais résister”, s’inquiète le commerçant qui a perdu entre 30 et 40 % de son chiffre d’affaires depuis 2023. Ses voisins de l’autoécole et du PMU ont dû mettre la clé sous la porte.
"Violence endémique"
“On s’aperçoit qu’il y a une violence endémique au niveau des jeunes gens et des narcotrafics”, affirme la maire d’Aix-en-Provence, Sophie Joissains, alors qu’un jeune de 20 ans a été tué par balle ce mardi 17 décembre. Ce dernier a été abattu dans la nuque lors d’une transaction de drogue à proximité de l'avenue Philippe Solari et de la résidence Bellevue, située dans le nord d'Aix-en-Provence, près d'un point de deal.
"Aix-en-Provence n'est pas loin de Marseille, une ville portuaire. Il y a donc un passage important de stupéfiants", explique Bruno Bartocetti, délégué pour la zone Sud du syndicat Unité SGP Police, précisant qu'il est difficile de contrôler le contenu de tous les conteneurs arrivant sur le port (seuls 2% sont contrôlés).
Arrivée de la DZ Mafia à Aix-en-Provence
De plus, depuis près de deux ans, la DZ Mafia a repris les points de stupéfiants dans la ville. Et de moins de 10 lieux d'échange au démarrage, le groupe de narcotrafiquant a su étendre ses activités à plus d'une dizaine de points.
"Il faut également noter que la méthodologie chez les revendeurs a changé. Depuis le covid, ce sont désormais les vendeurs qui se déplacent", explique le policier qui a dû, au fur et à mesure des années, étendre le quadrillage des zones de deal, les vendeurs étant plus mobiles.
Le député de l'opposition Marc Pena s'est exprimé au lendemain du décès du jeune homme. “Cette perte de vie est inacceptable et souligne urgence d’agir contre le fléau du trafic de stupéfiants qui gangrène notre jeunesse”, a-t-il déclaré.
“Nous devons agir sur tous les fronts, répression, prévention et réinsertion. Nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre”, a-t-il conclu, préconisant le renforcement des moyens de la police et de la justice pour lutter contre les réseaux de trafiquants, l’intensification des programmes de prévention surtout auprès des jeunes et le développement des politiques de réinsertion pour les personnes toxicomanes.