Alors que la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes est organisée ce lundi 25 novembre, la mairie de Montfermeil, en Seine-Saint-Denis, édite un magazine pour sensibiliser la population et aider les victimes. La publication a été suivie d’une forte augmentation des plaintes, selon la Ville.
Une femme qui pleure, une autre avec un œil au beurre noir... La publication reprend les codes associés à la presse féminine, pour lutter contre les violences conjugales. Le magazine municipal Violences, édité à 12 500 exemplaires par la Ville de Montfermeil, est distribué chaque année dans les boîtes aux lettres des habitants de la commune, et est par ailleurs accessible sur le site de la mairie et dans les commerces.
Parmi les objectifs visés : vulgariser le jargon judiciaire et décrypter les phénomènes sociaux et psychologiques derrière les violences. L’édition 2024 aborde par exemple les mécanismes d’emprise au sein du couple. Le magazine liste aussi les noms et les contacts des associations et des structures locales d’aide aux victimes. Selon la Ville, la publication du périodique a entraîné une forte hausse des plaintes pour violences conjugales ou intrafamiliales, ainsi que des signalements.
Djena Diarra, l’adjointe déléguée à la politique de prévention et aux droits des femmes, raconte que l’initiative est née suite à deux féminicides dans la commune : "On cherchait à impacter les foyers, à entrer dans les foyers. Avec le magazine, l’idée est d'informer les familles entières, pas que les femmes. On veut parler à tout le monde, y compris aux plus jeunes. Donc la publication ne contient pas d’images qui peuvent heurter les enfants."
"Le magazine a aussi vocation à donner des solutions : les numéros d’urgence, savoir ou aller pour les victimes, les réponses légales, éducatives… Il y a les contacts utiles des partenaires de la Ville, de la police, des associations, des services hospitaliers chargés de constater les violences, du local au national", précise Grégory Elisabeth, adjoint à la directrice générale chargée des services à la population.
Il souligne que le magazine s’inscrit dans "une politique municipale globale" de communication et de sensibilisation : "Il y a des groupes de travail, un travail avec l’intervenante sociale du commissariat de police qui reçoit les femmes… On fait des ateliers de self-défense avec la police municipale et la police nationale, qui sont aussi des espaces de parole. Il y a de la sensibilisation auprès des jeunes notamment, avec un théâtre forum, un théâtre participatif qui invite à trouver des solutions face à différents types de violences. Et il y a des ateliers d’échanges."
La maquette du magazine mise à disposition des autres communes
Djena Diarra a présenté lundi dernier l’initiative aux Folies Bergère, lors d’une soirée organisée par la Fédération Française des Trucs qui Marchent (FFTM) : une association créée en 2022 qui souhaite mettre en avant des initiatives locales portées par des élus et duplicables partout dans le pays. "J’ai été bouleversé par cette initiative, raconte Raphaël Rugger, cofondateur de la FFTM. Notre fédération a une tonalité très positive mais on ne s’interdit pas d’aborder des sujets graves comme les violences faites aux femmes. L’initiative portée à Montfermeil est très forte, par sa symbolique, sa simplicité et son originalité en détournant les codes de la presse féminine."
"Lors de la soirée, Djena a annoncé que la mise à disposition de la maquette et des contenus du magazine à l’ensemble des communes françaises. Ces dernières pourront adapter la publication avec notamment d’autres contacts d’organismes et d’assos. L’histoire de Djena, son énergie et son engagement municipal sont extraordinaires. Elle gère une onglerie, elle explique être là pour prendre soin des femmes, les écouter et être là pour elles", ajoute-t-il.
À noter que le magazine Violences est né le 8 mars 2020, en étant publié annuellement à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, et en est donc à sa quatrième édition.
En 2023, selon le rapport annuel de la Mission interministérielle pour la protection des femmes (Miprof) publié ce mardi 19 novembre, plus de 270 000 victimes de violences commises par leur partenaire ou ex-partenaire ont été enregistrées par les forces de sécurité au niveau national. 85% des victimes sont des femmes.
Concernant ces violences conjugales, les parquets ont traité les dossiers de plus de 130 000 mis en cause, dont 90% sont des hommes. Sur ces 130 000 personnes, 58 960 ont fait l'objet d'une procédure ouverte devant un ou une juge d'instruction ou ont été poursuivis directement devant la justice. Près de la moitié des affaires ont été classées sans suite.