Ce lundi, une rixe dans un lycée de Thiais a coûté la vie à un adolescent de 16 ans. A la suite de ce drame, des représentants de parents d'élèves et des médiateurs demandent aux collectivités territoriales d'organiser plus de dialogue entre les différents acteurs locaux afin d'endiguer le phénomène des violences entre bandes rivales.
"Cela fait des années que l'on alerte les pouvoirs publics au sujet de violences entre les deux villes". Pour Anne Moreau, responsable de l'union locale de la Fédération des conseils de Parents d'élèves à Thiais, la mort d'un jeune homme de 16 ans poignardé ce lundi lors d'une rixe devant le lycée Guillaume Apollinaire résulte des tensions entre les bandes de Thiais et Choisy-le-Roi dans le Val-de-Marne.
"Nous menons un travail de fond avec les jeunes car ils viennent de villes différentes où des bandes rivales s'affrontent", précise-t-elle. Elle souhaite "réunir toutes les parties prenantes, que ce soit le rectorat, la mairie ou la police pour réfléchir à des actions conjointes. Cela permettrait d'éviter de tels drames", souligne-t-elle.
La Fédération de parents d'élèves dénonce un "mal-être" au sein du lycée Guillaume Apollinaire avec "des jeunes qui sont les uns contre les autres". Pour instaurer un dialogue entre les élèves, elle souhaiterait entamer un travail avec des éducateurs "ou bien créer des liens entre les différents lycées." Anne Moreau affirme également avoir sollicité à plusieurs reprises des réunions entre les parents d'élèves et les différents acteurs locaux. Des demandes restées sans réponse selon elle.
"Il faut impliquer tout le monde dans le dialogue"
Le dialogue, c'est aussi la clé de la résolution des conflits entre bandes rivales, selon Adama Camara, médiateur dans le Val-d'Oise. "Des violences, il y en a tous les jours dans différentes cités", estime-t-il. Pour lui, les collectivités territoriales "doivent donner plus de moyens aux associations qui font un travail quotidien dans la prévention des rixes après des jeunes". Il demande également d'impliquer davantage les parents dans les projets proposés aux adolescents de quartier. "Il faut montrer que c'est un travail collectif. Ça ne suffit pas de demander à des médiateurs ou à des éducateurs d'intervenir dans les établissements scolaires. Tout le monde doit être impliqué."
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Il propose l'organisation de tables rondes réunissant les associations, les municipalités et les policiers. "Tant qu'on ne travaillera pas ensemble en essayant de trouver des solutions communes, des drames comme celui de Thiais seront rendus possible", regrette ce trentenaire originaire de Garges-lès-Gonesse. Même s'il reconnaît que cette solution "ne pourra pas sauver tous les jeunes", il espère "pouvoir en préserver un maximum de la violence et de ce mode de vie qui n'amène rien de positif".
A Thiais, des réunions tous les trois mois pour lutter contre la délinquance
Ce dialogue entre les différentes parties prenantes, le maire de Thiais affirme l'avoir instauré depuis 2008. La municipalité organise des réunions trimestrielles dans le cadre d'un Conseil Local de Prévention de la Délinquance. "Nous réunissons les chefs d'établissements scolaires, mais aussi les représentants de l'Etat, les bailleurs sociaux et les membres des sociétés de transport", explique l'édile Richard Dell'Agnola.
Selon le maire LR, la problématique des rixes et de la délinquance des jeunes occupent souvent les débats lors de ces réunions. "Cela permet d'établir des suivis individualisés avec les principaux de collèges et lycées pour certains élèves. Le point de vue des bailleurs sociaux nous est également précieux, car il permet de rendre compte de la situation dans les bâtiments et les différentes cités."
À l'issue des discussions, un processus d'accompagnement des familles est mis en place. "Lorsque l'on sait qu'un jeune a besoin d'aide, nous prévenons la famille et lui apportons notre soutien en faisant appel aux services compétents afin de les aider à s'en sortir. Certaines familles sont débordées et ne savent plus comment gérer leurs enfants. Notre priorité est de leur apporter les solutions adéquates", indique le maire de la commune depuis 1983. À l'avenir, il espère renforcer les dispositifs de lutte contre la délinquance juvénile dans sa ville. Celui-ci insiste également sur "l'importance d'une réponse judiciaire rapide lorsque des cas sont avérés".
À l'échelle du département, la préfecture du Val-de-Marne a alloué une enveloppe de 2,6 millions d'euros en 2021 aux collectivités locales pour lutter contre la délinquance juvénile. Une somme utilisée par exemple pour équiper les communes avec des dispositifs de vidéosurveillances. Cet argent sert également à organiser des actions communes entre des jeunes de quartiers rivaux.
En décembre 2022, le préfet a annoncé la construction d'un poste de médiation à Villeneuve-Saint-Georges dans les prochains mois.
Selon des chiffres de la préfecture, l'Etat a dépensé 391 000 euros dans la lutte contre les rixes dans le Val-de-Marne en 2022. Les dernières données préfectorales indiquent que 121 rixes ont eu lieu dans le département en 2021.