Cette volaille de longue taille noire et belle comme la campagne à la biodiversité variée d'autrefois revient sur ses terres grâce à des passionnés. Un amour pour gastronome La Le Mans.
Belle d'autrefois
On l'appelle comme une diva à l'opéra avec un LA. La Le Mans est une belle et jolie poule. Gallus gallus domesticus, oui comme ces cousines gauloises, du Sussex ou cou nu de Transylvanie, mais une poule qui sent bon la campagne sarthoise. Plumage noir avec des reflets verts, fort gabarit, crête frisée avec un éperon à l'arrière, oreillons blancs, elle est belle à en tomber la Le Mans.Cette gallinacée est aussi bonne à croquer. Cette vraie poule aime le plaisir de la chair. À la ferme de la Prairie, l'espace vert municipal du Mans, chaque matin et soir on lui offre des pâtons faits avec de la farine de sarrasin, d'avoine, d'orge mélangés avec du lait. Engraissée, elle fait fondre les gastronomes. Les Le Mans ornaient la table de nos rois. Seulement voilà, pendant des années on ne pouvait ni la voir encore moins y goûter. Drame de la standardisation, La Le Mans avait disparu des basse-cours après la Guerre.
La ville du Mans veut le retour de sa poule
Au Mans, on rêve de voir l'emblème d'avant les 24 heures revenir la diva des tables trois étoiles. La ville l'affiche à l'entrée de la cité pour en faire son image. Le fermier de la ville se mobilise, Gwenaël L'huissier court les labos et les fermes pour assembler à nouveau la race.Laurent Marteau, cuisinier et passionné d'élevage avicole installé en Mayenne à La Haie-Traversaine, a trouvé une race proche dans la Manche. En modifiant génétiquement cette poule, il approche de La Le Mans. "Il faut être persévérant et surtout avoir un budget", concède la directrice de recherche de l'INRA Michèle Tixier-Boichard.
Le Mans vise le créneau haut de gamme avec sa poule, dont le prix pourrait approcher celui du chapon, soit 150 euros pièce et au-delà. C'est à ce prix-là que la ville veut s'offrir le volatile autrefois célébré par Racine dans "Les Plaideurs", et La Fontaine dans "Le Faucon et le Chapon".
Avec AFP
Volaille de bonne taille, longue et large, moins forte que la La flèche mais néanmoins élégante.
Le Faucon et le Chapon par La Fontaine
Une traîtresse voix bien souvent vous appelle ;Ne vous pressez donc nullement :
Ce n'était pas un sot, non, non, et croyez-m'en,
Que le Chien de Jean de Nivelle.
Un citoyen du Mans, Chapon de son métier
Était sommé de comparaître
Par-devant les lares du maître,
Au pied d'un tribunal que nous nommons foyer.
Tous les gens lui criaient pour déguiser la chose,
Petit, petit, petit : mais, loin de s'y fier,
Le Normand et demi laissait les gens crier :
Serviteur, disait-il, votre appât est grossier ;
On ne m'y tient pas ; et pour cause.
Cependant un Faucon sur sa perche voyait
Notre Manceau qui s'enfuyait.
Les Chapons ont en nous fort peu de confiance,
Soit instinct, soit expérience.
Celui-ci qui ne fut qu'avec peine attrapé,
Devait le lendemain être d'un grand soupé,
Fort à l'aise, en un plat, honneur dont la volaille
Se serait passée aisément.
L'Oiseau chasseur lui dit : Ton peu d'entendement
Me rend tout étonné. Vous n'êtes que racaille,
Gens grossiers, sans esprit, à qui l'on n'apprend rien.
Pour moi, je sais chasser, et revenir au maître.
Le vois-tu pas à la fenêtre ?
Il t'attend : es-tu sourd ? – Je n'entends que trop bien,
Repartit le Chapon ; mais que me veut-il dire,
Et ce beau Cuisinier armé d'un grand couteau ?
Reviendrais-tu pour cet appeau :
Laisse-moi fuir, cesse de rire
De l'indocilité qui me fait envoler,
Lorsque d'un ton si doux on s'en vient m'appeler.
Si tu voyais mettre à la broche
Tous les jours autant de Faucons
Que j'y vois mettre de Chapons,
Tu ne me ferais pas un semblable reproche.