La Journée Mondiale des Sourds (JMS), c'est l'événement incontournable de toute une communauté. L'occasion, une fois par an, de se retrouver, d'échanger en langue des signes, de se montrer aussi, afin de rendre visible un "handicap" qui ne l'est pas.
Ce samedi, sur l'esplanade des chantiers, à Nantes, entre la galerie des machines et le carrousel des mondes marins, des mains s'agitent de toutes parts. Ça papote dans tous les sens, et la musique qui sort des enceintes, le seul son audible alentour, ne semble déranger personne...bienvenue à la JMS, la Journée Mondiale des Sourds.
Une dizaine de stands a pris place, les tentes des associations ou des entreprises sourdes de Nantes et d'ailleurs...car on vient de loin pour participer à cet événement annuel, certains arrivent de Vannes.
Une couleur domine, le turquoise, la couleur de ralliement des sourds.
C'est un collectif d'associations sourdes qui a mis en place l'événement.
"La dernière grande JMS à Nantes, c'était en 2015, par la suite nous avons organisé des rassemblements plus modestes, et puis il y a eu le Covid. Cette année, la Maison des Sourds René Dunan qui regroupe 3 associations, a vraiment souhaité faire quelque chose d'important, pour marquer le coup et permettre aux gens de se retrouver" explique Véronique Gouriou l'une des organisatrices.
Le programme est fourni : visite des machines en langue des signes, exposition sur l'histoire de la Persagotière ( l'institut nantais spécialisé dans la surdité et les troubles du langage) conférences, échanges toute la journée avec les exposants et une grande marche silencieuse.
"Cet événement est très important pour nous souligne Véronique Gouriou. Cela donne de la visibilité à la communauté sourde. C'est le moyen de montrer que nous ne sommes pas des personnes handicapées, que l'on peut avoir une vie normale, et les différents stands montrent la diversité de ce que nous faisons. Nous ne sommes pas que des "oreilles" abimées ou limitées, nous sommes des êtres humains, dotés d'émotions, de sentiments" se sent elle le besoin de préciser. Car en 2022, des obstacles quotidiens jalonnent toujours la vie des sourds...dans l'indifférence quasi générale.
"Nous ne sommes pas un divertissement" proclame une pancarte
Si la plupart d'entre nous s'accordent à trouver la langue des signes "tellement belle", "poétique", "magnifique", elle reste encore, malgré la loi sur l'accessibilité de 2005, marginale.
Pour une personne sourde, obtenir des informations en mairie, au guichet d'une gare, accéder aux soins à l'hôpital, relève toujours du parcours du combattant. Institutions, services publics ne disposent pas systématiquement d'un service d'interprétation en langue des signes. Quant à la scolarisation bilingue des enfants sourds, c'est un droit que réclament les parents depuis des années...sans être entendus.
"La JMS sert vraiment à mettre en avant les citoyens sourds, leur langue, leurs luttes et leurs revendications actuelles", explique Agathe Lacoste, interprète d'IDEM à Saint Nazaire.
"Comme la surdité est un handicap invisible, cette journée est importante pour les personnes sourdes et leur entourage. Cela permet de faire connaître au plus grand nombre leur histoire, et leur quotidien" renchérit Vanessa Branchereau, interprète API-LSF à Nantes.
Temps fort de cette manifestation, un cortège s'est élancé pour une déambulation dans les rues de Nantes. Avec des pancartes "sonores" : plusieurs interprètes bénévoles de l'AFILS étaient présents, munis de mégaphones, pour relayer les slogans