Les superlatifs n'ont pas manqué lors de la présentation de ce que sera la tour Bretagne version XXIe siècle. Le Groupe Giboire, propriétaire majoritaire de l'immeuble de 144 mètres de haut qui domine le centre-ville de Nantes, a présenté ce jeudi son projet de réhabilitation. Voilà quatre ans que l'immeuble pollué par l'amiante est vidé de ses occupants en attendant sa rénovation.
"C'est un projet long, compliqué et risqué pour notre entreprise." Michel Giboire, le président du Groupe Giboire, reconnait que l'aventure dans laquelle s'est lancée l'entreprise familiale est un vrai défi.
Il y a quelques années, Giboire a commencé à racheter des bureaux de la tour Bretagne à des propriétaires qui ne se voyaient pas vider les lieux et attendre patiemment que l'immeuble soit livré rénové pour reprendre leurs affaires. C'est ainsi, qu'au fil des départs, le Groupe Giboire est devenu propriétaire de 77 % de la tour.
L'exemple américain
Voilà quatre ans que cet immeuble de bureaux est vide. Conçu par l'architecte Claude Devorsine, il avait été inauguré en 1976, "Au moment de la sortie du film La tour infernale", s'amuse Philippe Chiambaretta, fondateur de l'agence PCA Stream qui, avec Magnum, sont les deux cabinets d'architectes qui ont été retenus pour le projet de réhabilitation.
Un immeuble qui, lors de sa conception, se voulait, comme la tour Montparnasse à Paris ou la Tour de l'Europe à Mulhouse, une évocation des grattes-ciel américains. Une époque où, en France, on trouvait encore bien des vertus à l'amiante.
On retrouve la matière cancérogène partout dans la trentaine d'étages, du sol au plafond en passant par l'encadrement des fenêtres. D'où la décision, en 2019, d'évacuer les lieux.
Cinq ans et une pandémie plus tard, rien n'a bougé, mais, on nous l'assure, les travaux vont pouvoir débuter.
De 7 à 9 millions d'euros pour le désamiantage
Le désamiantage doit débuter mi-2025, au terme duquel les entreprises prendront possession des lieux pour désosser la tour. Les Nantais ne verront jamais la tour à nu, car des bâches protègeront le chantier.
L'immeuble de bureaux va faire place à une tour de 200 logements (environ), du studio au cinq pièces, certains appartements disposant d'une loggia.
Un hôtel 4 étoiles
La base de la tour sera redessinée. On y trouvera un hôtel 4 étoiles, un restaurant, 1 500 m² de bureaux et coworking, des commerces et 1 000 m² où Nantes Métropole (copropriétaire à hauteur de 17 % de la tour) va installer l'association Les Ecossolies (pour la promotion de l'économie sociale et solidaire).
On y trouvera aussi "Kejadenn", un lieu culturel géré par l'Agence Culturelle Bretonne.
"Certes, ce lieu convivial fera résonner le son de la cornemuse et propagera dans la ville l’odeur de sarrasin. Mais il dira surtout ce qu’est la Bretagne dans le cœur des Nantais", déclare Florian Le Teuff, adjoint délégué aux enjeux bretons.
Un belvédère panoramique
Le Nid, le bar qui, au dernier étage de la tour, permettait une vue panoramique, aura un successeur. On pourra à nouveau monter gratuitement jusqu'au sommet de l'édifice.
"Les Nantais et les Nantais pourront remonter admirer le ciel de Nantes avec un belvédère panoramique, annonce la maire Johanna Rolland, pour boire un verre, écouter un concert, regarder une expo..."
On nous promet, au sommet de la tour, des terrasses végétalisées qui permettront de récupérer les eaux de pluie à des fins de nettoyage ou d'utilisation pour les sanitaires. Dans le même esprit, il est question de nichoirs sur le socle de la tour pour les coléoptères et les oiseaux.
Une conception bio
Le projet permet "d'allier l'innovation architecturale avec les enjeux écologiques", précise Johanna Rolland qui a tenu à saluer le travail des architectes de PCA Stream et Magnum.
Une démarche qui s'exprimera de différentes manières, que ce soit sur le choix des matériaux biosourcés, le raccordement au réseau urbain de production de chaleur, l'utilisation de pompes à chaleur ou encore des solutions innovantes comme l'utilisation de la chaleur des eaux de douche, de vaisselle des logements et de l'hôtel.
Giboire nous promet "un édifice économe en énergie, confortable et respectueux de l'environnement, en exploitant intelligemment les ressources naturelles disponibles que sont le soleil, le vent, les pluies et le couvert végétal."
"L'équivalent de 7 000 tonnes de carbone seront économisés en gardant la structure de la tour, explique François Giboire, directeur général du Groupe Giboire qui se base sur son expérience de la réhabilitation de l'immeuble CPAM de Vannes. "On va supprimer plus de la moitié des places de voitures pour favoriser les déplacements doux (250 places de vélo)", ajoute-t-il avant de conclure : "C'est le seul projet qui porte une telle ambition en France !".
Une tour blanche
Quant à l'aspect de la tour Bretagne, il changera de tout au tout. On avait jusqu'à présent le noir du Gwenn ha du, le drapeau breton, on en aura désormais le blanc.
Le building noir et austère que l'on connait fera place en effet à une tour blanche avec "une façade claire, en aluminium recyclé, la teinte changera selon l'orientation et le soleil" précise l'architecte Philippe Chiambaretta.
La base ouverte au public par ses commerces, son restaurant, son lieu culturel et un nouvel escalier qui reliera la partie basse du socle de la tour à la partie haute, redynamisera cette partie du quartier.
"Beaucoup auraient laissé tomber", déclare Michel Giboire, face à l'ambition de ce projet.
"Ce ne sera pas un projet comme les autres, confirme Johanna Rolland. C'est un bâtiment emblématique de la ville."
"La tour est au centre de la ville. Ça nous oblige à avoir un projet vertueux" conclut Benoît Garnier, architecte chez Magnum.
Pas avant 2029
Mais le calendrier reste encore au conditionnel. Comme le coût du projet, estimé aujourd'hui à 135 millions d'euros. Si les travaux de désamiantage devraient se terminer en 2026, la livraison de la tour nouvelle version est annoncée pour 2029... au mieux.
À ses débuts, la tour Bretagne a eu bien du mal à se remplir, du fait de la cherté des loyers. Le groupe Giboire compte bien ne pas renouveler cet échec commercial après la réhabilitation. En espérant sans doute que la crise immobilière sera du passé en 2029.
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