Choc des savoirs. "L'école du tri social, ce sera sans nous ! ", le choix de la désobéissance pour s'opposer aux groupes de niveau

Une nouvelle journée de mobilisation ce samedi 25 mai pour réclamer l'abandon de la réforme du "choc des savoirs". À Nantes, enseignants et parents d'élèves du collège de la Durantière qui réclament le classement de leur établissement en REP+ étaient en tête de cortège.

C'est un établissement scolaire en lutte depuis des années. Le collège de la Durantière se bat pour obtenir un classement REP+. Mais alors que tous les indicateurs de l'établissement sont au rouge et qu'il continue de s'enfoncer dans la spirale du manque de moyens et de l'échec scolaire, les personnels mobilisés n'ont en réponse que le silence du rectorat et du ministère.

Et les chiffres sont inquiétants. Les élèves du collège la Durantière ont été privés de 841 heures de cours depuis septembre. Six membres du personnel sont en arrêt de longue durée ou ont quitté le collège en raison des difficultés d'exercice du métier. 

Les remplacements surviennent rarement et ne couvrent qu'une petite partie des manques. Un médiateur qui effectuait un précieux travail de prévention dans l'établissement vient de le quitter et n'a pas été remplacé depuis deux semaines. Il ne le sera peut-être jamais.

Le 64ᵉ conseil de discipline en deux ans et demi vient d'être convoqué. Et les élèves se démobilisent. "Jusqu'à 30 %  d'entre eux arrivent en retard. Les résultats aux évaluations de 4ᵉ sont plus inquiétants que ceux de 6ᵉ. Les vœux d'orientation des élèves sont refusés dans des proportions grandissantes et ceux qui sont acceptés sont souvent des seconds choix."

Résultat ? "70 % des familles de secteur scolaire contournent le collège par dérogation ou inscrivent leurs enfants dans le privé. La mixité sociale en est fortement altérée.

Parents et personnels se sont invités au ministère le 1ᵉʳ février. Sans succès, les portes ne se sont qu'entrouvertes.

Les réponses évasives et dilatoires qui leur ont été faites confirment que l’Éducation nationale traite avec négligence la cause de la réussite scolaire des enfants des classes populaires

Sylvain Marrange

représentant des enseignants du collège de la Durantière

"La carte de l’Éducation prioritaire qui devait être actualisée en 2019 ne l’est toujours pas 5 ans après ! Le ministère n'a toujours donné aucune réponse concrète à l'effondrement des apprentissages des élèves du collège", se désolent parents et enseignants.

C'est dans ce contexte de tension extrême que personnels et parents ont appris qu'au motif d'améliorer le niveau des élèves, le ministère s'apprête à engager une série de mesures dites du "choc des savoirs" qui relèvent pour eux, "d'un modèle d’École passéiste qui a déjà fait la preuve de son inefficacité en d'autres temps."

Aujourd'hui, comme à chaque rassemblement, enseignants et parents d'élève de ce collège nantais étaient au cœur du cortège.

"Cette réforme désorganisera le collège et dégradera encore les conditions de travail des élèves et des personnels (emplois du temps, effectifs par classes). Elle entraînera la
fermeture d'une classe de 6ᵉ, la suppression de la plupart des dédoublements qui existaient en français, en maths, histoire-géo, technologie, ainsi que le coenseignement en arts et l'heure de piscine dans un établissement où beaucoup d'élèves sont non nageurs.
 Elle enlèvera aussi aux élèves de 3ᵉ la demi-heure hebdomadaire de suivi pour la préparation du DNB, la recherche de stages et les vœux d'orientation qui sont un véritable casse-tête tant nos élèves manquent de ressources et de réseau", déplorent-ils.

Par ailleurs, "elle triera les élèves en organisant les cours de mathématiques et de français en groupes de niveau. Les résultats scolaires étant fortement corrélés aux inégalités sociales, la séparation des élèves par niveaux aboutira à des groupes socialement hiérarchisés. Une première projection fondée sur les récentes évaluations de 6ᵉ montrent qu'on pourrait même aboutir à la constitution de groupes ethniques ! "

"Cela confine à l'abominable"

"Cela confine à l'abominable", les mots sont forts, mais choisis. Parents d'élèves et personnels sont scandalisés et refusent ces choix d'organisation des parcours scolaires qui sont invalidés par 30 années de recherche en sciences de l'éducation. "Ils creusent les écarts de niveaux entre les élèves et participent à l'affaissement des acquisitions".

Le gouvernement revient sur un siècle de démocratisation de l'accès aux savoirs scolaires. Il assume de priver un grand nombre d'élèves de la possibilité de poursuivre leur scolarité au lycée et de construire des capacités instruites de réflexion et d'analyse pour penser par soi-même et peser sur les choix de société de demain.

parents d'élèves et enseignants du collège nantais la Durantière

"Dès ce jour, avec le soutien de la section locale de la FSU et de l'Association des Parents d'Élèves, parents et personnels du collège la Durantière se retirent de toutes les instances de l'établissement dont celles où se prépare la rentrée 2024, car ils refusent de collaborer à ce projet funeste et rétrograde", indiquent-ils.

À Angers, 100 personnes se sont rassemblées. À Nantes, plusieurs centaines de manifestants ont défilé dans le centre-ville, une mobilisation en légère baisse. Pas de quoi faire taire la Durantière. "Avec les groupes de niveau et la réforme du brevet, près de la moitié des élèves pourraient être empêchés de poursuivre leurs études au lycée", alors personnels et parents sont aujourd'hui soudés comme jamais.

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