Océane Godfroid et Charlotte Crenn travaillent toutes les deux dans des bars à Nantes. Début mars, elles ont lancé sur les réseaux sociaux un appel à toutes les femmes qui travaillent dans le milieu de la nuit. Objectif : créer un collectif pour réfléchir aux problématiques rencontrées par ces femmes.
Des anecdotes, elles en ont plein à raconter. Des clients qui essayent de leur apprendre leur métier, d'autres un peu saouls qui se tournent vers le stagiaire parce que c'est un homme et qu'ils pensent que lui voudra bien les servir. Plus globalement, elles en ont marre de constater que dans le milieu du bar, il faut justifier sa place lorsque l'on est une femme.
Charlotte Crenn a commencé à travailler dans le milieu du bar à 24 ans. Océane Godfroid, elle, est barmaid depuis 10 ans. Au départ, les deux jeunes femmes ne se posaient pas de questions sur leur statut de femmes derrière un bar. Mais après quelques années d'expérience, ces questions se sont imposées à elles.
"Il y a des différences dans l'attitude des clients, explique Charlotte, il y a des différences dans la charge de travail, dans la crédibilité qu'on peut avoir face aux clients et face aux équipes aussi. Je pense qu'aujourd'hui, quand on est une femme dans ce métier, il faut beaucoup masquer."
Ce que je fais, c'est que je parle plus fort que tout le monde. Je prends un petit peu ce rôle de vieille taulière. C'est comme ça que j'arrive à m'imposer et à faire en sorte qu'on me respecte.
Charlotte CrennBarmaid
Pour répondre à ces problématiques, les deux jeunes femmes ont décidé de lancer début mars un "appel aux femmes du bar". L'idée, c'est de se réunir et de pouvoir discuter entre femmes sur ce que ça signifie, être une femme dans le milieu du bar.
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Rapidement, elles reçoivent de nombreux messages. "Je pense que ça répond à un vrai besoin, explique Océane. Depuis MeToo, on entend beaucoup plus parler des agressions sexuelles, mais en plus nous, dans notre métier, on a l'alcool et la drogue qui rentrent aussi en compte. Ça change complètement les choses."
Charlotte confirme : "On sait bien que l'alcool, ça ne fait pas ressortir que le meilleur de nous-même. Je pense qu'il y a des process à créer, à mettre en place ensemble pour essayer de faire en sorte que ce soit un lieu de travail qui soit sécurisé pour les femmes, parce que c'est un lieu de travail."
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Libérer la parole
Océane s'est toujours sentie féministe. "Quand j'étais au collège, je trouvais que ça ne bougeait pas assez. Aujourd'hui, ça avance certes, mais on est toujours en train de se battre pour avoir les mêmes salaires, les mêmes droits... J'ai l'impression que dans 30 ans, on sera encore en train de se poser les mêmes questions".
Créer ce groupe, c'est aussi une façon pour elles de faire bouger les choses. "Quand on a fait un tour de table lors de la première réunion, je pense que plus de la moitié des femmes présentes avaient déjà été agressées".
Alors, elles espèrent libérer la parole. Aujourd'hui, elles sont une soixantaine à participer à un groupe Whatsapp et à se retrouver une fois par mois dans un bar pour débattre de ces questions.
La prochaine réunion aura lieu le 12 mai à 15 heures aux 3 Corbeaux à Nantes.
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