Il était la voix et le visage du monde maritime à la télévision. "Georges Pernoud est décédé dans un hôpital en région parisienne des suites d'une longue maladie", a annoncé sa fille Fanny Pernoud à l'AFP. Avec sa mythique émission Thalassa, il était notamment passé par Nantes et la Vendée.
En 2004, l'équipe de Thalassa avait débarqué à Nantes avant de faire escale aussi à l'île d'Yeu. Elle avait alors pris place sur deux vieux gréements. Le Belem bien sûr, mais aussi le Marité qui était le studio de l'émission pendant cette série consacrée aux ports. Un trois-mâts goélette, dernier terre-neuvier français encore en état de naviguer et qui allait d'escale en escale pour Thalassa. Les deux navires étaient à quai près du Maillé-Brézé.
Une référence en matière d'image
L'équipe avait fait un "filage", une répétition, le jeudi soir et réalisé le direct le vendredi, à l'heure de l'émission qui était un rendez-vous à l'époque très prisé des téléspectateurs. Thalassa était un monument du petit écran qui garantissait de magnifiques images et de belles histoires de mer.
Georges Pernoud avait présenté cette émission à la longévité rarissime de 1980 à 2017, date à laquelle il avait quitté le navire, en désaccord avec la politique de programmation qui avait amené à changer l'heure de diffusion du célèbre magazine de la mer.
Parmi les escales de Georges Pernoud en Pays de la Loire, il y eut aussi Saint-Nazaire en 2011, Le Croisic en 2012, et bien sûr Les Sables d'Olonne à plusieurs reprises pour le Vendée Globe.
D'ailleurs, ce lundi, le skipper Arnaud Boissières (La Mie Câline-Artisans Artipôle) qui passait le cap Horn en 14ème position de la course, a rendu hommage à Georges Pernoud en buvant une bière. "C'est une offrande pour tout le monde, pour le Pacifique, pour l'Indien pour le cap Horn, pour Neptune, pour tous mes amis, pour Georges Pernoud", a-t-il dit à cette occasion.
"Georges Pernoud m'a toujours impressionné"
Jean-Christophe Chéneau, excellent cameraman, qui a longtemps résidé à Nantes avant de s'installer en Vendée, a signé depuis 1992 une bonne centaine de reportages pour Thalassa, du 4 mn au 52 mn.
"Dans ce métier, dit-il, on a l'habitude de rencontrer des gens connus, on ne se laisse plus impressionner. Mais Georges Pernoud m'a toujours impressionné. C'était un peu mon papa cathodique. Il avait un côté Jean Gabin. C'était un ancien cameraman, c'est d'ailleurs lors d'une transat qu'il avait filmée qu'il avait eu l'idée de cette émission."
Jean-Christophe se souvient d'un amoureux de l'image qui travaillait pour son émission avec différentes sociétés de production mais imposait les cameramen dont il appréciait le travail.
"Il assistait à tous les visionnages, raconte-t-il, il était très exigeant mais il avait un super regard sur les sujets. C'était toujours pertinent. Si ça plait à ma voisine de palier disait-il, c'est qu'on a réussi. Il savait ce qui fonctionnait. Aux journalistes, il disait qu'il n'y a jamais de mauvais interviewés mais des mauvais intervieweurs !"
Dans ses choix de reportage se souvient Jean-Christophe Chéneau, Georges Pernoud privilégiait les portrait de gens simples. "les portraits avec de vraies gueules et des histoires à raconter" dit-il.
Le cameraman se souvient aussi d'un homme qui a défendu son émission tant qu'il a pu. "C'était sa vie" conclut Jean-Christophe Chéneau.
"il avait une peur invraisemblable de ne pas y arriver"
Même sentiment d'admiration pour Béatrice Berge. La journaliste qui vit au Pellerin, au sud de Nantes, a travaillé de 1985 à 2016 avec lui.
"La première chose qui me vient, commence Béatrice Berge, c'est la gratitude que j'aie pour lui de m'avoir accordé sa confiance, de m'avoir donné cette chance de vivre 30 ans exceptionnels."
Souvenir de tournage posté par le nazairien Christophe Dedieu
Novembre 2008 tournage des sentinelles du littoral pour l'émission de Thalassa entre St-Nazaire et Port-Navalo je suis en compagnie de la journaliste Béatrice Berge et du caméraman #thalassa #GeorgesPernoud #SaintNazaire #saintnazaireagglo #saintnazairetourisme pic.twitter.com/AIZMOIE4mO
— Christophe Dedieu (@christodedieu) January 11, 2021
La journaliste se souvient aussi d'un homme anxieux, rongé par le doute. "C'est lui qui a créé ce concept, qui en eu l'idée, qui l'a porté pendant 40 ans envers et contre lui, dit-elle. Depuis le départ, il avait une peur invraisemblable de ne pas y arriver. Il n'avait pas confiance en lui. "
C'était un homme de bons sens poursuit-elle, un bon sens terrien qui lui venait sans doute de ses origines savoyardes. Car Georges Pernoud n'était pas un homme de la mer et ses journalistes pas forcément non plus. Béatrice se souvient de ce qu'il disait à ce propos: "Ce ne sont pas des bons marins que je cherche mais des bons journalistes."
Il appelait sa femme après chaque émission
"Un bon vivant qui adorait rigoler souligne-t-elle encore, authentique, émouvant, généreux, d'une loyauté indéfectible envers ses amis. Ce n'est pas parce qu'il était le patron qu'il s'accordait des priviligèges. A l'aéroport, il faisait tout, portait le matériel, distribuait les cartes d'embarquement, c'était un papa."
D'ailleurs, Béatrice Berge se souvient aussi de cette plaisanterie qui circulait dans l'équipe : après chaque émission, Georges Pernoud appelait systématiquement son épouse, Monique, pour lui demander son avis. "Il y avait le père Noud, dit-elle et la mère Noud."
"Georges Pernoud a accompagné et fait voguer avec passion les Français sur toutes les mers et les océans pendant plus de 40 ans, déclare la Présidente de France Télévisions Delphine Ernotte Cunci dans un hommage, Infatigable créateur et présentateur de grands progammes de service public Thalassa, Faut pas rêver, bon vent Monsieur !"
France 3 rendra hommage à Georges Pernoud lors d'une grande émission spéciale ce vendredi soir.
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