À la rentrée 2024, la carte scolaire de Nantes sera bouleversée. Trois collèges publics vont fermer tandis qu'un nouveau collège ouvrira ses portes dans le centre-ville. 600 élèves y seront scolarisés. Si l'objectif est de favoriser la mixité sociale, ce transfert suscite des réactions mitigées dans le quartier du Breil, au nord de la métropole.
Au cœur du quartier populaire du Breil, au nord de Nantes, le collège Rosa Parks accueille actuellement 317 élèves. Au pied des tours, cet établissement classé en réseau d'éducation prioritaire renforcée fermera définitivement ses portes en septembre 2024. Pour les familles, la nouvelle est brutale
"On a une équipe éducative et pédagogique renforcée par le label REP+, ce qui nous amène à un meilleur accompagnement, un meilleur suivi", réagit David Lhotellier, représentant des parents d'élèves du collège Rosa Parks. Nos enseignants sont nos principaux repères. D’un seul coup, on va se retrouver dans un grand établissement où tout le monde va perdre ses repères."
Les collégiens et ceux qui auraient dû y faire leur rentrée seront répartis dans quatre collèges du centre-ville de Nantes, Victor-Hugo, Hector-Berlioz, Gaston-Serpette et le nouveau collège, l'ancien lycée Vial, en cours de rénovation. Les collèges Guist'hau et Jules Verne vont aussi fermer à la rentrée 2024.
Le département a certes annoncé des aides pour la prise en charge des transports et de la demi-pension, mais ce changement est compliqué à accepter pour les familles. "Pour les enfants, c’est de la fatigue supplémentaire liée au trajet matin et soir, et la complexité familiale puisque les ainés récupèrent les plus petits à l’école primaire", ajoute David Lhotellier.
Nicolas Le Brun, professeur de mathématiques au collège Rosa Parks est favorable à la mixité sociale, mais regrette la manière de faire. "Cela enlève une part du quartier, de la vie et des institutions qui sont présentes, c’est dommage. Le projet, on ne sait pas quoi en penser, on n’a pas eu à dire notre mot dessus."
"On est aussi attaché à l’accompagnement spécifique qu’avaient nos élèves en REP+, ajoute Annick Nunez, professeur d'espagnol. On a des petits effectifs par classe, une autre qui accueille les élèves allophones. On n’a aucune réponse sur le devenir de ces structures."
Le fait que les élèves de périphérie doivent se déplacer dans un sens unique vers le centre-ville, ça pose une question : est-ce qu’on demande toujours aux mêmes de faire des efforts ?
Sylvain MarangeCo-secrétaire départemental au Snes-FSU
"Cette question du déplacement existe. Il y a aujourd’hui des enfants qui vont dans les collèges du centre-ville, hors secteur, en demandant des dérogations alors même qu’ils habitent beaucoup plus loin, répond Vincent Danis, vice-président du conseil départemental de Loire-Atlantique, chargé de l'éducation et de la politique éducative.
C’est bien qu’une attractivité existe sur ces collèges aujourd’hui. Cette attractivité doit pouvoir bénéficier à tous, y compris à des élèves qui vont effectivement devoir se déplacer."
Vincent DanisVice-président du conseil départemental de Loire-Atlantique
Les quartiers du nord-ouest de Nantes concentrent effectivement les inégalités et la ségrégation sociale y est la plus criante. Dans une volonté de mixité sociale et de lutte contre la ghettoïsation, les collégiens de Rosa Parks auraient donc tout à gagner à rejoindre le centre-ville.
"Les enfants du quartier ne sont pas tous scolarisés dans ce collège, relève Patricia Galeazzi, directrice académique de Loire-Atlantique. Il y a des pratiques d’évitement qui font que petit à petit ces collèges de proximité n’offrent pas l’environnement nécessaire, au-delà des apprentissages fondamentaux, dont les élèves ont besoin pour se projeter dans l’avenir."
Cette nouvelle carte scolaire a vocation à rééquilibrer les territoires en favorisant la diversité sociale des élèves. Pour les autorités, elle pourrait séduire les familles parties dans le privé. Mais pour les habitants du quartier, c'est un nouveau service public qui disparait.