Ils étaient vêtus de noir et portaient une gerbe symbole de la mort de leurs commerces, contraints de rester à nouveau fermés pendant ce deuxième confinement. Des commerçants nantais ont brièvement manifesté dans le centre-ville.
Ils étaient environ une centaine, silencieux, habillés de noir, alignés sur la place du Commerce, dans le centre-ville de Nantes ce vendredi à 14h.
Le rassemblement n'a duré que quelques minutes. 200 commerçants venus manifester à l'appel de leurs organisations professionnelles, l'association Plein Centre, l'Union des Métiers de l'Industrie Hôtelière, le MEDEF, la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises...
Ces commerçants, s'ils sont restés silencieux lors de cette manifestation, ne veulent pas rester sans réagir alors que les directives sanitaires les contraint à fermer leur magasin et met en péril leur activité.
"Je suis essentiel" disait une des pancartes, "Ci-gît le commerce nantais" annonçait une autre.
Combien d'entre eux parviendront à se relever de cette crise ? Trop tôt pour le dire. Lors du premier confinement, les chambres de commerce prédisaient déjà de la casse dans ce secteur. Ce deuxième confinement, juste avant Noël, n'arrangera rien.
Johanne Dellieux est commerçante dans le textile, rue de l'Arche-sèche, elle est aussi créatrice de mode.
"C'est la double peine, dit-elle, on a double loyers, double charges. On a nos charges personnelles, nos loyers personnels, les écoles à payer de nos enfants et on a la même chose à payer pour nos boutiques, l'eau, l'électricité, internet, des taxes. Sauf que sans chiffre d'affaire, on ne peut pas payer tout ça. On n'a pas de chômage partiel, on n'a rien. On se tue à la tâche, pour trouver des solutions pour se renouveler, en étant plus présent sur les réseaux sociaux, à regarder encore moins ses heures qu'avant, à répondre aux gens jusqu'à pas d'heure le soir, le dimanche. C'est pas que des commerces qui ferment, c'est des vies de famille, un ensemble de vies qui s'écroulent !"
"Quand on vous met la tête sous l'eau, vous vous laissez faire ?"
Cette commerçante, comme d'autres de Nantes a vu se réduire son chiffre d'affaire au fil des manifestations ces dernières années. La clientèle a régulièrement fui le centre-ville. Une première, puis une deuxième fermeture obligatoire de plusieurs semaines, l'annonce du premier ministre repoussant la fin de ce deuxième confinement. Tout cela n'augure rien de bon pour ce secteur économique."Quand on demande un effort supplémentaire aux commerçants du centre-ville, insiste Johanne, nous demander de fermer c'est pas un effort, c'est nous demander de mourir et surtout de le faire en silence et poliment. Quand on vous met la tête sous l'eau et qu'on essaye de vous noyer, est-ce que vous vous laissez faire ou est-ce que vous vous débattez ?"
Delphine Jacob est déléguée de l'association Plein Centre, elle entend le désespoir grandir chez nombre d'indépendants.
"On a des commerçants qui s'effondrent dans leur boutique, dit-elle. On est entré dans une période beaucoup plus compliquée que la précédente. On est tous conscient des efforts à consentir collectivement dans le respect de gestes barrières. Les commerces, c'est un lieu où il n'a jamais été prouvé qu'il pouvait y avoir des clusters. On est capable de renforcer encore nos protocoles de sécurité dans nos établissements. On peut organiser de la prise de rendez-vous, quoi que ce soit qui permette de faciliter un minimum de chiffre d'affaire dans cette période cruciale."
Certains ont pris le virage du numérique et tentent de sauver ce qu'ils peuvent avec la vente sur internet mais beaucoup ne maîtrisent pas cet outil. Les ventes de Noël représentent pour beaucoup 30 % du chiffre d'affaire de l'année.
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