Le montant de la taxe foncière redevable par les propriétaires est désormais connu. En Loire-Atlantique, trois communes se démarquent avec des augmentations de plus de 20%, Orvault, Oudon et Cordemais. Nous avons tenté de comprendre pourquoi.
Depuis le 28 aout, les avis de taxe foncière arrivent dans les boîtes aux lettres ou boites-mails. L'impôt foncier augmente cette année d'au moins 3,9 % pour tous les propriétaires, une augmentation "moindre" après une hausse importante de 7,1 % en 2023.
Mais selon les communes, la hausse s'avère bien plus élevée en fonction du taux d'imposition décidé en conseil municipal. Les propriétaires de la commune d'Oudon en Pays d'Ancenis voient ainsi leur taxe grimper de 28,80 %, celle de Cordemais, près de Saint-Nazaire, de 24.69 % et celle d'Orvault, en périphérie nantaise, de 20,47 %.
Salaire des personnels, entretien des équipements, soutien aux associations, activités périscolaires, le champ d'intervention des communes est très large et l'équation entre les charges et les recettes est rendue fragile par l'inflation.
Cordemais, une commune atypique de 3 900 habitants
Avec sa centrale à charbon en activité depuis 50 ans, Cordemais, au nord du département de la Loire-Atlantique, est une commune très peu endettée, grâce à la manne financière de l'industriel. Un quart de son budget de 12 millions € est couvert par la dotation de l'usine.
"C'est un apport de ressources importantes qui a permis à la commune de se développer et d'avoir des infrastructures et des équipements de haut niveau et de proposer aussi des prestations à des prix attractifs", confirme Daniel Guillé, maire élu en 2020.
La commune de 3 900 habitants dispose d'un espace culturel inauguré en 2021, d'un hippodrome, d'un terrain de football synthétique.
"Le repas au restaurant scolaire coute 2,97 euros. On y sert 53 % de bio et tout fait en interne. Cela représente un cout de 500 000 euros pour la commune, souligne aussi le maire. On fournit une calculette à tous les enfants entrant au collège et 2 fois 32 euros de bons de fourniture scolaire pour les familles."
Cordemais était jusqu'à présent l'une des communes avec la plus faible imposition du département. Mais l'incertitude concernant l'activité de la centrale à charbon nécessite d'anticiper. On sait bien que la centrale ne vivra pas encore 10 ans. Si on veut continuer à offrir les prestations, à maintenir en état les équipements qu'on a, malheureusement, on n'avait pas d'autre choix", explique le maire.
Daniel Guillé sait aussi qu'il devra bientôt partager la dotation de la centrale avec les villes de l'intercommunalité, alors que cette manne va progressivement se réduire dans les prochaines années. "On aura des compensations, mais elles sont toutes dégressives. Ce qu'il faut espérer, c'est que demain, il y ait d'autres activités sur ce territoire industriel".
À Orvault, "de très faibles marges de manœuvre"
Orvault, au nord de Nantes, est une ville bien plus importante avec 27 300 habitants et un budget de 63 millions €. La nouvelle équipe municipale, élue en 2020, a dû gérer "une situation budgétaire avec de très faibles marges de manœuvre", explique Jean-Sébastien Guitton, le maire de la ville.
En 2022, "on avait choisi volontairement de ne pas augmenter, contrairement à d’autres communes, parce qu'on savait que la taxe allait déjà augmenter de 7 % mécaniquement, à cause de l'inflation."
L'inflation justement pèse particulièrement sur le budget de la commune en 2024. "la facture énergétique va augmenter de 900 000 euros cette année, beaucoup plus que l'année dernière", auquel s'ajoute l'augmentation du point d'indice des agents municipaux, "cela représente 1,2 million de dépenses supplémentaires."
"Et enfin, pour ne prendre que ces exemples-là, on a la crise immobilière qui fait qu'on perçoit beaucoup moins de droits de mutations", complète le maire. Cela correspond à 400 000 euros de moins. On est à plus de 2,5 millions d'euros de dépenses, et de besoins de trésorerie supplémentaire".
Soit on réduit drastiquement le service public pour réussir à trouver 2,5 millions, 3 millions d'euros de marge financière, soit on prend acte de cette situation financière très compliquée et on fait appel au seul levier dont disposent les collectivités, la taxe foncière.
Jean-Sébastien GuittonMaire d'Orvault
La hausse d'impôt représentera environ 3 millions de recettes supplémentaires pour la commune. "Elle permettra de maintenir nos équipements sportifs, maintenir nos écoles, le niveau de service public qui est souhaité."
Une décision politique à Oudon
Entre Nantes et Ancenis-Saint-Géréon, la démographie de la commune d'Oudon, 4 000 habitants, est proche de celle de Cordemais. Mais son budget n'est pas comparable : il était de 4 millions € en 2023, 4,75 millions € en 2024.
"On est plutôt une commune avec des finances saines, explique Bertrand Pinel, adjoint au maire en charge des finances. "Mais les recettes sont en baisse de 100 000 euros, dont 75 000 de droits de mutation non perçus. Et à l'opposé, on a eu une augmentation de 100 000 euros de dépenses de personnel, avec la revalorisation du point d'indice de la fonction publique territoriale", précise l'élu.
Moins de recettes, plus de charges, une équation difficile. "Faire des économies, ça voudrait dire arrêter certaines choses. Il y a eu une décision politique de maintenir "le bien-vivre à Oudon", qui passe par le maintien des grandes manifestations qui existent sur la commune, la fête de la musique, le plan d'eau, le marché de Noël."
"On a aussi décidé de maintenir notre engagement en lien avec la transition écologique à travers un recrutement d'un poste d'agent transition écologique. En matière de politique associative, culturelle et sportive, on avait renforcé il y a deux ans notre service enfance avec un animateur sportif. C'est pareil, c'est plutôt un choix politique de poursuivre cette action au bénéfice des Oudonnais", précise l'élu.
L'équipe municipale a donc décidé d'augmenter très sensiblement la taxe foncière (+ 28,80 %). "Oudon a toujours eu des taxes foncières très largement inférieures à la moyenne des communes identiques, de l'ordre de moins de 20 %", précise Bertrand Pinel.
Entre 2012 et 2022, la taxe foncière a augmenté en moyenne de plus de 26,3 %. Une hausse presque quatre fois supérieure à l’augmentation des loyers, selon l'UNPI.
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