Le fabricant d'engrais chimiques Yara compte supprimer 139 postes sur 171 dans son usine de Montoir-de-Bretagne en Loire-Atlantique, mettant en avant une baisse des ventes. Cette usine, classée Seveso "seuil haut", a plusieurs fois été mise en cause pour des non-conformités. L'annonce de ces licenciements provoque de nombreuses réactions dans le bassin nazairien.
Yara, c'est une longue histoire. À Montoir de Bretagne, dans le bassin nazairien, l'usine de production d'engrais chimique a souvent défrayé la chronique. Le groupe est depuis des années dans le collimateur des associations environnementales et des élus.
Alors forcement, l'annonce du licenciement de 139 salariés sur les 171 que compte le site Seveso, "seuil haut", provoque de nombreuses réactions en Loire-Atlantique.
À commencer par celle de l'association environnementale AEDZRP.
Le cynisme et sans limites de la direction de l'entreprise qui sacrifie des emplois plutôt que de respecter les normes
Association environnemental AEDZRP
L'opinion publique s'est de nombreuses fois manifestée pour exiger que l'industriel respecte les règles environnementales et les normes de sécurité nécessaires à la protection des salariés et des populations riveraines.
Dans le même temps, elle attendait de l’État des mesures contraignantes et dissuasives pour que soit imposée à l'exploitant la mise en conformité de son entreprise.
C'était le sens du rassemblement organisé le 14 octobre dernier. Une pétition circulait depuis, pour réclamer la suspension administrative de l'entreprise YARA.
"La mort programmée de Yara"
"Pour pouvoir continuer de fonctionner, c'est entre 10 et 15 millions d'euros par an qu'ils doivent mettre sur la table. Pour mettre l'entreprise aux normes environnementales et de sécurité, c'est 80 millions qu'il faut débourser. Pour moi, c'est la mort programmée de Yara dans les ans à venir", nous expliquait Thierry Noguet, le 27 septembre dernier, lors d'une réunion publique". Il a vu juste.
La CGT de son côté est vent debout.
Si Yara Ferme, c'est qu'il ne veut pas payer et faire les mises aux normes environnementales et de sécurité
CGT Yara
"Une trahison"
"C'est une trahison, nous avions été convoqués pour un projet de transformation du site de Montoir, on a vite été mis devant le fait accompli. En fait, c'est un arrêt total de la production. On nous parle de la baisse des produits fabriqués ici, mais on nous annonce que l'on va garder la plateforme logistique, l'agrandir pour venir des engrais produits ailleurs que l'on va revendre sur le juteux marché français", déplore Philippe Nicolas, secrétaire CGT de Yara France Montoir-de-Bretagne
Yara France a fait 1150 millions d'euros de bénéfices, le groupe plus d'1,5 milliard ! C'est lamentable d'en arriver là
Philippe NicolasSecrétaire CGT Yara France Montoir de Bretagne
"Ça a vraiment été un choc pour l'ensemble des salariés de Yara Montoir même si nous demandions un investissement pour se mettre aux normes. Nous n'attendions pas ce type de projet", ajoute le syndicaliste.
"Casse sociale"
L'annonce a été faite, à l'occasion d'un Comité Social et Économique exceptionnel, instance de représentation des personnels dans l'entreprise. Depuis, certains élus du bassin nazairien s'étranglent.
Sur les réseaux, Robin Salecroix, responsable départemental du Parti Communiste de Loire-Atlantique, dénonce "une casse sociale".
📢 Réaction de @Robin_Salecroix ( #PCF44) suite à l'annonce des licenciements chez #Yara⤵️ https://t.co/qzvVYPShnV
— PCF Orvault (@OrvaultPcf) November 5, 2023
Matthias Tavel, député Nupes de la 8ᵉ circonscription de Saint-Nazaire dénonce "une décision inacceptable de Yara qui doit être combattue. La casse sociale ne sera jamais la réponse à l'exigence écologique. L'État doit prendre ses responsabilités. Plein soutien aux salariés face à cette annonce aussi injuste que brutale".
"Les salariés n’ont pas à être la variable d’ajustement d’une direction qui oppose emploi et environnement depuis des années. Ils n’ont pas à payer pour la cupidité d’actionnaires qui refusent de mettre le site aux normes après avoir bénéficié de plus d’une décennie pour le faire,ni d’envisager une évolution de la production", poursuit Le député.
Après l’accident de travail ayant couté la vie à un salarié intérimaire sur le site il y a tout juste deux semaines, cette décision trahit une nouvelle fois le mépris de Yara pour les salariés de Montoir-de-Bretagne et le territoire.
Matthias TavelDéputé de la 8e circonscription de Loire-Atlantique
"En l'état actuel du modèle agricole, et en l’absence de politique ambitieuse de bifurcation écologique de l'agriculture française renforçant l'alternative aux engrais chimiques, cette décision ne ferait qu’aggraver l’importation d’engrais venant de l’étranger, sans proposer aucune alternative", conclut Matthias Tavel.
Un ouvrier décédé sur site le 24 octobre dernier
"Il sera aussi indispensable de connaître les raisons du décès d'un ouvrier sous-traitant trouvé mort sur le site de l'entreprise que l'exploitant semble avoir voulu passer sous silence jusqu'à présent", demande par ailleurs l'association AEDZRP.
Accident du travail - @olivierdussopt - 295 morts recensés en 2023
— Accident du travail : silence des ouvriers meurent (@DuAccident) November 5, 2023
Montoir-de-Bretagne (44) : un intérimaire est décédé suite à un malaise au sein de l'usine d'engrais Yara. Cela pourrait être lié à l'utilisation d'ammoniac. https://t.co/Y2i9MWu4We
Les associations et organisations mobilisées pour la mise aux normes de l'entreprise se réuniront, mardi 7 novembre 2023. "Sans abandonner leur exigence d'un fonctionnement sécurisé du site, elles examineront les suites à donner aux décisions annoncées", prévient, Marie-Aline Le Cler pour les associations et organisations environnementales.