Une quinzaine de chasseurs ont pris leur poste ce 29 décembre dans le secteur du camp de la Torpille, à l'ouest de Saint-Nazaire. Objectif : réguler une population de sangliers qui s'est adaptée au secteur périurbain provoquant au passage des dégâts dans les zones agricoles, les jardins privatifs et la crainte des riverains.
Les hommes et les chiens sont debout depuis longtemps. Après la battue de mardi dernier, où sept sangliers ont été abattus, ils prolongent leur mission dans un autre secteur de l'ouest nazairien.
Nous sommes au camp de la Torpille, un espace militaire entouré de hauts grillages, d'un bois, de prairies et d'habitations.
Autant dire que l'heure est à la concentration, à la bonne répartition des troupes et à la mission confiée par la ville.
Une battue à la demande de la Ville
La Ville de Saint-Nazaire a sollicité les chasseurs suite à de nombreux signalements de riverains du secteur de Saint-Marc Océanis, à l'ouest de la cité portuaire.
Les agriculteurs ne sont plus les seuls à subir les dégâts causés par les sangliers. Les particuliers constatent en nombre le passage de ce gros gibier, voire en subissent les dégradations. Ayant pour habitude de retourner la terre à la recherche de glands, de fruits, de vers, de racines et autres tubercules, les sangliers retournent la terre et labourent les pelouses.
Pour les éleveurs et producteurs maraîchers de l'ouest nazairien, les dégâts les plus importants ne concernent pas les légumes, mais les prairies, sources de nourriture animale toute l'année, à pâturer ou à récolter (foin).
La Ville de Saint-Nazaire a dépêché sur place des agents de la police municipale afin de participer à la signalisation de la battue en cours et la visibilité de l'arrêté préfectoral.
Un lieutenant de louveterie aux commandes
Toute battue de régulation est encadrée par un lieutenant de louveterie ou louvetier.
C'est une personne privée exerçant à titre bénévole une fonction civique d'auxiliaire de l’État auprès des services publics de la commune dans laquelle ils sont domiciliés en matière de faune sauvage, y compris sur le plan sanitaire.
Avec un secteur d'intervention allant de la limite du Morbihan à la Loire et incluant la Brière, Dominique Grué est le lieutenant de louveterie chargé de l'encadrement de cette battue.
Y en a partout dans le coin. Il n'y a plus de société de chasse sur Saint-Nazaire, en revanche il y a des prairies, des bois, des roncières et des jardins. Le sangliers se sont adaptés et installés. À nous de réguler cette présence qui embête bien du monde.
Dominique Grué Lieutenant de louveterie
Saint-Nazaire Ouest : un territoire très particulier
Loin des paysages portuaires et balnéaires à l'est et au sud de Saint-Nazaire, l'ouest nazairien est un territoire tout autre.
Saint-Marc, site privilégié de villégiature aujourd'hui, est depuis très longtemps une terre agricole, sur sa partie haute. Si de nombreuses fermes ont été ''avalées'' par la ville en extension continue, il reste plusieurs exploitations agricoles sur Saint-Nazaire et Pornichet, la ville voisine.
Mais entre deux parcelles, il n'est pas rare de trouver des terrains de loisirs, fréquentés à la belle saison, et donc, bien tranquilles l'hiver.
Ajoutez à cela le bois de Cavaro très prisé des promeneurs mais aussi des sangliers, puis le camp de la Torpille, espace militaire ceinturé de hauts grillages et interdit au public mais où les sangliers ont réussi à se créer des passages et peuvent se réfugier entre les bunkers et les ronciers, et vous obtenez un territoire propice à la prolifération de ce gibier, que peu de choses impressionnent, excepté les chasseurs et leurs chiens.
Dernière particularité et non des moindres : les habitations. Elles ne sont jamais loin, voire tout près. La plage des Jaunais est à deux pas et les circuits de promenade environnants bien agréables.
Autant dire qu'il a fallu prendre toutes les précautions possibles : signalisation et information du public par voie de presse ainsi que des riverains, pas toujours pro chasse.
Mais là, il n'est pas question de chasse. Il s'agit d'une battue, organisée à la demande de la Ville et encadrée par un arrêté préfectoral, dans l'intérêt général.
On est attentifs à tout. La crainte dans cet environnement, c'est la balle qui ricoche. Un chemin en pierre, un bunker, un poteau....et la balle peut être déviée. Alors les consignes sont de tirer à faible distance quand le sanglier est délogé de sa cachette par les chiens.
Dominique Grué lieutenant de louveterie
Ce matin, ce sont de petits chiens qui ont été choisis, compte tenu des spécificités du terrain. Des Jagdterriers et des Teckels. Petits mais ne lâchant rien, même face à un sanglier.
A 17 heures maximum, l'opération prendra fin et les chasseurs pourront dresser le bilan de cette battue qui s'est déroulée sur deux jours. La Ville de Saint-Nazaire, la préfecture de Loire-Atlantique et la fédération de chasse seront informées en premier lieu et pourront partager l'information avec le public et les riverains.
Contacté en fin de journée, le lieutenant de louveterie nous fait le bilan suivant : pas de sanglier trouvé dans le camp de la Torpille, dans le secteur de Berrien : un sanglier levé et prélevé (tué), dans un autre secteur tout proche : trois sangliers levés, un prélevé et un sérieusement touché qui n'a pas été poursuivi par les chiens pour raisons de sécurité (proximité de la voie rapide). Il sera recherché demain sur le secteur de Pornichet. Soit, pour ce jeudi,deux sangliers prélevés, et un qui devrait l'être demain. Ajoutés à ceux de mardi, la battue aura prélevé dix sangliers sur l'ouest de Saint-Nazaire en cette fin d'année 2022.
Un impact agricole, environnemental et financier
Sur un territoire de chasse sans société de chasse (c'est le cas de Saint-Nazaire), un exploitant agricole ne cotisant pas à la fédération de chasse ne sera remboursé par celle-ci qu'à hauteur de 50%.
Un adhérent à la société de chasse sera lui indemnisé à 100%.
Car, chose pas toujours connue du grand public, c'est à la fédération de chasse que revient le remboursement des dégâts subis. La fédération, donc les chasseurs eux-mêmes. Et avec la diminution des effectifs, il faudra bien un jour se pencher sur la question de l'indemnisation et de la régulation.
En cette fin 2022, Dominique Grué, encadrant cette battue aux sangliers, a réussi à mobiliser une quinzaine de chasseurs, dont certains sont en congés. Mais ils sont surtout bénévoles. Et dans ces territoires péri-urbains où les solutions jusque-là usitées dans le monde rural ne sont plus forcément partagées par nombre de citadins, il faudra bien faire face à cette évolution de la faune au sein des villes et lui apporter une réponse adaptée.