Face au silence du préfet, des élus proches du site du Carnet se sont présentés devant la préfecture de Loire-Atlantique. Le préfet a estimé leur manifestation illégale et refusé de les recevoir. Les élus réclament l'expulsion immédiate des occupants de la ZAD du Carnet dont la population grossit. 

Drôles de manifestants, ce 25 février, devant la préfecture de Loire-Atlantique : les maires Yannick Morez, Jean-Pierre Audelin, Raymond Charbonnier, Roch Cheraud, Hervé Gentes, Sylvain Scherer, et élus du bureau de la Communauté de Communes Sud Estuaire, la sénatrice Laurence Garnier, la conseillère départementale Marie-Christine Curaudeau.

La requête des élus : face à l'occupation illégale de la zone du Carnet,  ils disent Stop ! et demandent au préfet l'expulsion immédiate de la ZAD du Carnet.  

Oui, mais voilà : une manifestation se déclare en préfecture trois jours avant la date retenue. Les élus de la République ne pensant pas à avoir à faire cette démarche se sont vus interdits de manifester, interdits de stationner leur camionnette de co-voiturage. Ils ont du se contenter d'un rassemblement symbolique et d'un point presse.

 

Des élus plus que déçus, presque écoeurés

''C'est décevant, désolant, lamentable'' commente Yannick Morez, maire de Saint-Brévin et président de la communauté de communes du Sud Estuaire. ''que va-t-on dire à nos administrés, à nos touristes que le port du masque est obligatoire mais que l'occupation illégale de la ZAD peut perdurer ?''

Roch Chéraud, maire de Saint-Viaud nous explique, ''pas un seul appel de la préfecture depuis août 2020. Chose inédite : le préfet s'est rendu aux Portes de l'Atlantique, le port à sec jouxtant la ZAD. Mais nous avons été ignorés et pourtant, nous n'avons pas la peste !''

L'objet du litige ; sur cette zone du Carnet, située sur la commune de Frossay, en bord de Loire, est prévu un projet d'aménagement industriel dédié aux énergies marines renouvelables (EMR), piloté par le Grand Port Maritime de Nantes Saint-Naziare.

Cette zone d'aménagement s'étend sur 110 hectares au milieu d'une zone humide plus vaste encore, de 400 hectares. Le projet est contesté par des militants qui occupent le site et l'ont baptisé Zone à Défendre : ZAD.

 Nous ignorer n'est pas la solution

Collectif d'élus du Sud Estuaire

Face à cette occupation illégale, les élus en appellent à l'Etat depuis plusieurs semaines et le silence du préfet à leurs réclamations les rend perplexes et en colère. Seul, un référé du tribunal a fait bouger un peu les lignes, mais à ce jour, la situation perdure.

Ces élus sont bien conscients que ''ce sujet dérange, mais il est particulièrement important pour nous et les habitants. Nous ignorer n’est pas la solution".

"Alors qu’à l’inverse d’ailleurs, la Préfecture sait trouver les élus locaux pour faire appliquer immédiatement des mesures décidées bien souvent sans concertation et contraires aux spécificités locales. Le gouvernement vante régulièrement dans les médias l’importance de la coopération Préfet/Maires : dans les faits, celle-ci n’existe pas. Le Préfet n’écoute pas les élus locaux et refuse donc même de les recevoir'', déplorent les élus.

Pour ces manifestants à l'écharpe tricolore la revendication est simple, ''Il est inadmissible qu’en tant que représentants de la République, nous ne soyons pas écoutés et reçus pour permettre le rétablissement de l’état de droit sur ce secteur. Le Carnet ne doit pas devenir un nouveau Notre Dame des Landes. Chaque citoyen de ce pays a des droits, mais aussi des devoirs, ce que ne semblent pas avoir à l’esprit les zadistes qui s’installent en toute impunité sur des terres qui ne leur appartiennent pas. Les riverains sont excédés par la situation.''

 

Dernière minute

 

À 18h10 ce jeudi, la préfecture de Loire-Atlantique adressait à la presse le communiqué suivant : 

 ''LE CARNET : Plusieurs élus se sont présentés ce matin devant la préfecture. Ils souhaitaient rencontrer le
préfet. Le préfet n’était pas disponible pour les recevoir ce matin. Il a néanmoins proposé de les
rencontrer dès la semaine prochaine pour évoquer le sujet du Carnet.
Le représentant de l'Etat accorde la plus grande importance aux élus de la République.
''

Contactés, les élus étaient en réunion distanciée, n'ont pu répondre sur le moment. Mais ce matin, il leur avait été répondu en préfecture que leur demande envoyée voilà deux semaines devait être renouvelée pour un rendez-vous dans deux semaines.

Singulier dialogue entre l'état et les élus de la République.

 

 

De Stop Carnet à la ZAD du Carnet

À l'origine, ce projet est contesté localement par un collectif d'associations locales, baptisé Stop Carnet, s'opposant à tout projet estime comme ''inutile'' et nuisible aux espaces naturels, à l'image d'un autre projet à proximité, le projet Surf Park, sur la commune de Saint Père en Retz.

Une manifestation a lieu en décembre 2019, suivie d'inscriptions d'opposition au projet à l'entrée du site du Carnet en février 2020.

Mais durant l'été, l'opposition locale se voit renforcée par des personnes issues de différents collectifs ou individus arrivant sur le site et installant des barrières et autres barricades et prenant possession de la zone, sous l'étiquette ZAD, zone à défendre.

Désormais, le projet d'aménagement portuaire rejoint la liste nationale des ZAD, les motifs de l'opposition vont de la protection des zones naturelles humides à la contestation des projets jugés inutiles et du monde qui les a créés.

Sur place, le temps n'est plus aux inscriptions. Routes bloquées, accès à l'éolienne expérimentale du Carnet interdit, le port à sec des Portes de l'Atlantique voit son grillage coupé et plusieurs de ses bateaux tagués.

À l'automne, le projet est reporté mais l'annonce ne provoque aucun changement, elle conforte juste les opposants dans leur position.

Le gérant de ce port à sec ainsi que les maires de Frossay et Saint-Viaud en appellent au préfet, mais aucune décision n'est prise, même si les gendarmes ont été vus à plusieurs reprises sur le site. Ils n'ont pas reçu d'ordre d'évacuation.

 

 

Quand le paisible Carnet redevient chaudron

Longtemps, le site du Carnet a étéassocié au nucléaire, en raison d'un projet de centrale porté durant de nombreuses années et finalement abandonné à la fin des années 90, une décision résultant d'une alliance à gauche PS-Ecologistes.

Face au projet de centrale nucléaire, la densité démographique dans le secteur était restée faible même après la décision d'abandon et le Carnet avait retrouvé son calme, en dehors de quelques rave-parties durant les premières années 2000.

Le site du Carnet était revenu sur le devant de la scène lors de l'installation de l'éolienne Haliade 150 par Alstom, puis exploitée en phase de mesures et expérimentation par General Electrics. C'est la période de la relance d'après la crise de 2008.

Le port à sec des Portes de l'Atlantique s'est ouvert à peu près à la même période, après 10 ans de dossiers administratifs et d'adaptation du projet aux normes environnementales.

Aujourd'hui,et depuis septembre 2020, l'éolienne de GE n'est plus accessible, y compris pour les salariés qui en surveillaient la production. Plus récemment, le port à sec a été ''visité'' , certains bateaux tagués et certains propriétaires hésitent à venir hiverner ou réparer leur bateau.

Le projet du Grand Port Maritime de Nantes Saint-Nazaire d'aménager 110 hectares de la zone du Carnet a bel et bien réveillé certains activistes et l'annonce de réétude du projet n'a pas convaincu les opposants qui demandent son annulation pure et simple.

 

La Loire-Atlantique, un territoire prisé par le gouvernement

Le Grand port maritime et le conseil départemental ont récemment obtenu gain de cause devant la justice. Les zadistes en ont été informés par huissiers. L’État peut donc ordonner l’évacuation du site.  

Il n'a échappé à personne que les ministres et autres secrétaires d'état se succèdent à un trythme soutenu ces dernières semaines. Pourtant, concernant la ZAD du Carnet, aucune décision n'a suivi ces visites, jusqu'à présent.

La venue du plus haut personnage du gouvernement, Jean Castex, ce vendredi 26 février à Nantes, inversera-t-elle la tendance ?

Une chose est sûre : le dossier du Carnet est désormais suivi en haut lieu et de très près. 

Aujourd'hui, la population de la ZAD du Carnet est estimée entre 80 et 100 personnes, mais elle semble recevoir de nouveaux arrivants à mesure que le dossier stagne et se rapproche de la campagne électorale.

Celle des régionales cette année, celle des présidentielles en 2022.

 

 

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