Cancer de la prostate : les agriculteurs touchés se battent pour une reconnaissance en maladie professionnelle

En France, plus de 43 000 agriculteurs, actifs ou retraités, souffrent d'un cancer de la prostate. Cette pathologie sera bientôt ajoutée à la liste des maladies professionnelles dans l'agriculture.

Les mains dans la terre. Son jardin est comme un refuge pour Denis. Un havre de paix depuis 2 ans et le diagnostic de son cancer de la prostate. 

Cet ancien apiculteur, qui a gardé quelques ruches, a été exposé aux pesticides très jeune. Lorsqu'il travaillait comme arboriculteur et s'occupait des traitements sur les pommiers.

"Le soir quand je revenais du travail, j'avais de la fièvre, là je me suis que c'était un peu gênant, et j'ai pris conscience que, oui, c'était des  produits dangereux", raconte Denis.

On avait beau mettre des masques, déjà à l'époque, quand on revenait de 2-3 jours de traitement dans la semaine, c'était quand même un peu dangereux, j'ai pris conscience de ça

Denis Benoit, agriculteur

Des séquelles irrémédiables

Denis se convertit alors en bio, en 1998, mais il est déjà trop tard. 
Deux décennies vont passer, avant que le couperet ne tombe : un cancer de la prostate, qui nécessite une ablation totale de l'organe. Avec des séquelles irrémédiables.

Les 2-3 premiers mois sont très durs parce que vous vous sentez complètement impotent

Denis Benoit, agriculteur

"Ce qui en découle, ce sont des difficultés au niveau physique, d'incontinence, et aussi au niveau sexuel, explique Denis Benoit, du coup, ça remet pas mal de choses en cause dans la vie de tous les jours".

Il y a plein d'effets secondaires qui sont là, on ne fait plus ce qu'on a fait auparavant 

Denis Benoit, agriculteur

"Ça a aussi des conséquences sur la vie de couple, sur l'acceptation de mon handicap avec ma femme, raconte Denis, c'est quelque chose qui est difficile à surmonter".

Le combat contre la maladie se double d'une bataille administrative, pour que son cancer soit considéré comme maladie professionnelle.

 J'ai intégré cette maladie en me disant, je vais faire aussi en sorte que ça soit reconnu comme maladie professionnelle par rapport aux pesticides

Denis Benoit, agriculteur

La reconnaissance intervient finalement en début d'année, une première victoire, après de longues démarches.

"La première démarche pour obtenir la reconnaissance en maladie professionnelle est d'aller chez son médecin traitant, explique l'agriculteur. Le médecin délivre alors un document Cerfa attestant d'un lien entre maladie et activité professionnelle. Suit alors un document demandé par la Caisse primaire d'assurance maladie dans lequel le patient doit lister toutes ses activités professionnelles.

Il faut également lister le nom des produits pesticides utilisés.

"Ça met beaucoup de temps car il y a une rente viagère envisagée, poursuit Denis Benoit, là je n'ai pas encore le montant, je ne touche rien, je vis de l'indemnisation chômage car j'ai arrêté mon activité professionnelle".

Une rente proportionnelle

En France, plus de 43 000 agriculteurs, actifs ou retraités, souffrent d'un cancer de la prostate. Une pathologie bientôt ajoutée à la liste des maladies professionnelles dans l'agriculture.

La mesure permettra de simplifier le parcours des victimes avec "une rente proportionnelle aux séquelles de la maladie sur la personne" explique Michel Besnard, président du collectif de soutien aux victimes des pesticides de l'Ouest.

"Il y a déjà beaucoup de maladies inscrites dans les tableaux de maladies professionnelles du régime agricole, et clairement identifiées comme étant liées à l'usage des pesticides, explique Michel Besnard, c'est Parkinson, ce sont les lymphomes non hodgkiniens, les myélomes, les leucémies lymphoïdes chroniques pour les principales".

"Ça reste confidentiel, beaucoup d'agriculteurs ou de salariés du milieu agricole ne connaissent pas l'existence de ses tableaux et de ses maladies, poursuit-il, le fait que ces tableaux soient médiatisés, que de plus en plus de gens le sachent, on espère que ça va accélérer la prise de conscience qu'il nous faut une autre agriculture sans pesticides".

Désormais engagé dans le collectif de soutien aux victimes de pesticides de l'ouest, Denis veut contribuer à lever un tabou et invite d'autres agriculteurs concernés à le contacter.

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