Bétail dévoré, traces de pas et apparitions filmées. Un faisceau d'indices laisse penser que le loup est de retour dans le Maine-et-Loire, après un siècle d'absence. Un groupe de pisteurs s'est mis sur sa trace et organise des formations auprès des éleveurs.
Il y a quelques semaines, une série d'empreintes, profondes et régulières, sont repérées par une chienne pisteuse près d'une ferme de la Sèvre nantaise, dans le Maine-et-Loire. "Pour moi, c'est formel, il y a du loup autour de chez nous", lance Samuel Gonnord, son maître-chien, qui a dressé sa chienne pour la recherche de personnes ou d'animaux disparus.
Sur le sol, le dessin d'une patte dans la terre revient tous les soixante centimètres. Cette trace est caractéristique du passage d'un loup, selon Fabrice, pisteur bénévole, qui accompagne Samuel et sa chienne dans leur traque.
"Le loup, au trot, a cette particularité de poser son pied arrière dans l'empreinte de son pied avant. On aura une seule empreinte à chaque fois. Ça nous fait dire qu'on a un loup qui est passé par-là", avance-t-il.
À quelques mètres de là, d'autres traces sont trouvées à proximité d'un hangar de la ferme. Elles confirment son intuition. Contrairement aux empreintes "presque rondes" d'un chien, celles-ci sont "très effilées", explique Fabrice. "C'est une trace de loup, possiblement de louve", affirme-t-il.
Cadavres d'animaux
Au printemps 2021, un jeune loup avait été photographié dans les marais de Jard-sur-Mer, dans la Vendée voisine. Il avait été retrouvé mort quelques mois plus tard, fauché par un véhicule en Loire-Atlantique. L'année suivante, un autre loup a été filmé sur la commune de Berrien, dans le Finistère.
Ces apparitions avaient étonné car, officiellement, le loup n'existe pas dans l'ouest de la France. Il y aurait disparu il y a un siècle. La cartographie de l'Office français de la biodiversité (OFB) ne reconnaît sa présence régulière que dans les Alpes, les Pyrénées, le Massif Central et en Alsace.
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Pourtant, les indices de la présence du loup se multiplient dans le Maine-et-Loire. Un cadavre de veau d'une quarantaine kilos, qui attendait son équarrissage, a été retrouvé dévoré dans une ferme angevine. Un chevreuil a été trouvé mort, les côtes arrachées et à moitié dévoré dans le Saumurois.
Des moutons et des chèvres ont subi le même sort dans le département. "C'est typique du loup, avec les côtes brisées", commente Fabrice devant la photographie d'une chèvre éventrée.
Ailleurs, des crottes ou des traces de passage rappellent la présence du loup. Les agriculteurs et pisteurs volontaires du département échangent leurs informations sur un groupe Facebook dédié.
Une aide aux éleveurs en jeu
La menace pour les troupeaux semble si réelle que, depuis décembre 2022, Frédéric Bourasseau, éleveur de chèvres de la Sèvre nantaise, a décidé de ne plus laisser sortir ses bêtes du hangar.
"On avait des projets pour sortir les chèvres, c'est-à-dire faire des ouvertures pour qu'elle puisse, sans forcément avoir du pâturage, avoir du parcours en extérieur. Sachant qu'il y a potentiellement du loup, ça change un peu nos plans", regrette-t-il, avant d'ajouter : "Il faudra que, nous aussi, on s'adapte."
"Ce que je souhaiterais, c'est qu'il soit reconnu qu'il y a du loup chez nous, pour pouvoir éventuellement avoir droit aux aides pour pouvoir nous protéger". "Faire des clôtures et aussi avoir un chien de troupeau, c'est un budget important", explique l'agriculteur.
Pour l'heure, en l'absence de reconnaissance, par les autorités, de la présence du loup dans le Maine-et-Loire, aucun programme de soutien aux éleveurs n'est envisagé.
"Prouver que le loup est présent"
"L'idée pour moi, c'est d'arriver à prouver le plus rapidement possible que le loup est présent, explique Fabrice, le pisteur de loup volontaire. Par une photo, une vidéo, une analyse de crotte, afin qu'on puisse aider les éleveurs, que les aides aux éleveurs soient débloquées".
"Le loup, ça fait trente ans qu'il est revenu en France. Il gagne des territoires depuis trente ans et à chaque territoire qu'il gagne, c'est un bordel immonde parce qu'il n'y a eu aucune anticipation. Parce que le loup n'a pas été repéré à temps. Et moi, ce que je ne veux pas, c'est qu'il se passe la même chose dans le Maine-et-Loire", abonde le pisteur.
Pour l'instant, Fabrice a récolté 200 indices (photos, témoignages...) qu'il juge fiables. Ils lui laissent à penser qu'une douzaine de loups seraient installés dans le Maine-et-Loire.
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