En mars 2023, la liquidation judiciaire du groupe immobilier Carréneuf laisse en chantier une centaine de constructions stoppées net. Une dizaine d'entreprises du bâtiment ont déposé plainte pour abus de confiance. Les futurs propriétaires s'estiment toujours lésés dans leur majorité.
La liquidation judiciaire des 21 sociétés du groupe Carréneuf prononcée le 13 mars 2023 par le Tribunal de Commerce d'Angers, avait laissé sur le carreau de nombreux propriétaires et artisans.
Quelques jours après la décision judiciaire une dizaine d'entreprises du bâtiment (dont la Fédération du Bâtiment du Maine-et-Loire, de Vendée et de Mayenne) avaient porté plainte contre X "pour abus de confiance, banqueroute, recel d'abus de confiance, recel de banqueroute, blanchiment et complicité de ces infractions contre X. "
Une liquidation ultra-rapide
Selon les avocats des plaignants, à l'époque des faits, la rapidité de la liquidation était très rare : les salariés, artisans, sous-traitants ainsi que les clients avaient été informés de la procédure seulement un mois avant la liquidation proprement dite.
Du côté des particuliers, le nombre de propriétaires touchés à se mobiliser a rapidement augmenté ; ainsi le groupe Facebook Mobilisation contre Carréneuf : soutien aux victimes (clients, artisans…) compte 704 membres à ce jour.
"Le Groupe n’a pas été en mesure de faire face à la grave crise qui touche actuellement le secteur de la promotion immobilière et de la construction de maisons individuelles, expliquait alors Michael Juret, dirigeant du groupe et également ancien président des Ducs d'Angers, le club de hockey sur glace de la ville.
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Pour Anne-Claire Fauquenot, jeune propriétaire d'une maison individuelle dont les travaux ont été stoppés au bout de deux mois, dès décembre 2022, c'est la catastrophe.
La construction de sa maison qui devait être un projet de vie est devenue un vrai fardeau.
Il y a un an, alors qu'elle avait déjà réglé avec son conjoint la quasi-totalité des travaux, la faillite du promoteur angevin Carréneuf a mis le chantier à l'arrêt.
Et depuis, plus rien.
La fin d'un projet de vie
"Sur le coup, ça a été très très dur" confesse la jeune femme
"C'est tombé comme un coup de massue, c'était la fin du monde" ajoute-t-elle sur un ton désabusé.
Pour l'instant, tant que ça ne bougera pas et tant qu'il n’y aura pas une pelleteuse sur le terrain, je n'y crois plus trop
Anne-Claire FauquenotPropriétaire
L'assurance qui a repris le dossier conteste aujourd'hui la viabilité de l'ouvrage et recommande sa démolition.
Un nouveau coup dur pour cette cliente.
Un séisme dans le secteur immobilier
Il y a un an, l'affaire du Carréneuf a chamboulé le secteur immobilier. Plus d'une centaine de particuliers ont été touchés et de nombreux artisans sont fragilisés par la faillite du groupe. C'est toute une économie qui a été stoppée, du jour au lendemain.
Les chantiers du promoteur allaient de la Mayenne à la Vendée en passant par le Maine-et-Loire. Ce sont plus de 80 salariés et une vingtaine de sociétés qui ont été concernés par cette liquidation. Tous les salariés qui travaillaient pour le promoteur se sont retrouvés, d'un coup, sans emploi.
Les artisans les plus solides ont pu passer outre les impayés, mais d'autres ont eu de plus grandes difficultés. Car s'il existe des voies de recours pour les particuliers, les artisans n'ont, eux, aucun moyen de se retourner contre le groupe.
Obligation de terminer les travaux
Pour Manon Bezier, la garantie obligatoire de livraison a été respectée. Mais pour d'autres acquéreurs, la situation est plus complexe. Dans certains cas, l'assurance ne reconnait pas sa responsabilité. Des situations très différentes d'un cas à l'autre.
"Le garant de financement doit terminer l'ouvrage, quoiqu'il en coûte" assure Maitre Bernard Salquin. Cet avocat au barreau d'Angers et de Nantes gère les plaintes d'une quarantaine de particuliers et d'une dizaine d'entreprises dans cette affaire.
Pour les gens qui ont payé 90% d'une maison qui n'est pas terminée, qui n'est érigée qu'à 60%, l'assureur doit terminer le chantier, peu importe que les coûts de construction aient explosé, peu importe que le client n'ait presque plus rien à payer au garant de financement
Me Bernard SalquinAvocat au barreau d'Angers et de Nantes
"La seule porte de sortie juridiquement pour le garant de financement, explique l'avocat, c'est de prétendre que les constructions sont ni faits ni à faire, qu'il faudrait les démolir et à ce moment-là de dire : moi, je ne peux pas continuer une fondation comme ça".
Au lendemain de la liquidation, des professionnels du bâtiment et des particuliers lésés ont décidé de s'unir et de porter plainte. Une enquête préliminaire pour abus de confiance est en cours.
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