Étudiants, lycéens et jeunes salariés, se proclamant "génération sacrifiée", ont défilé mercredi dans plusieurs villes de France, contre le "coeur de projet pourri" de la réforme du code du travail.
Sous une pluie battante, Toulouse avait pris des allures grisâtres pour un long cortège couvert de parapluies, çà et là éclairés de banderoles, drapeaux et ballons pour marteler: "Nos vies, nos vies valent plus que leurs profits." "Si t'aimes pas El Khomri, viens manifester sous la pluie", haranguaient, en chantant, des étudiants de Science-Po "en colère". "On n'est pas du bétail", scandait un autre groupe d'étudiants de l'IEP rebaptisé "Internationale Étudiante Pas contente". Ils étaient ainsi quelque 10.000 manifestants selon la police, le double selon les organisateurs, à avoir bravé les éléments pour traverser à la mi-journée le centre de Toulouse et clamer "Résistance" au projet de loi travail signé par la ministre Myriam El Khomri.
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Protégés de parapluies, d'écharpes et de sommaires cartons, de gros bataillons d'étudiants ont manifesté vent debout devant des salariés des hôpitaux, d'Airbus, de la métallurgie, des télécoms, d'Air France, de cheminots ou encore de retraités. "Les retrouvailles des salariés, des étudiants et des jeunes, ça s'arrose", a déclaré Jean-Claude Cathala, porte-parole de la CGT Haute-Garonne.
En tête de manifestation, une banderole affichait la couleur: "Salariés, jeunes, chômeurs, retraités: ensemble mobilisés pour nos droits. Retrait du projet de loi Travail".
"On n'est pas des poules mouillées", criaient, au son des sifflets et des tambours, de jeunes étudiants éducateurs spécialisés, "citoyens du monde". "Les jeunes, c'est comme les pavés, si tu marches dessus, tu te les prends dans la gueule", pouvait-on lire sur un carton. "C'est le coeur du projet qui est pourri. Tant qu'il est là, on restera dans la rue", a déclaré Simon B., 24 ans, en master de sociologie à l'Université Le Mirail et livreur intérimaire.Le coeur du projet est pourri
"On sait ce que c'est que d'avoir des conditions de travail de merde" car "un étudiant sur deux travaille", a renchéri Hugo Fiaschi, étudiant en deuxième année de géographie au Mirail. "C'est du chantage à l'emploi, on ne va pas se laisser faire", a ajouté ce jeune de 21 ans, contraint de travailler dans une supérette. Pour leur camarade Suzanne Deforoas, étudiante en droit au Mirail et porte-parole de l'Unef, "toutes les pages du projet sont scandaleuses". "Il est non seulement inefficace, mais en plus dangereux, il est dicté par le Medef et repris par le gouvernement qui fait semblant d'être de gauche", dit-elle. "Pas de discussion, pas de compromission: à la poubelle la loi des patrons", disait une banderole de Lutte ouvrière.
A Rennes, 4.500 personnes selon la préfecture, plus de 5.000 selon la CGT, dont de nombreux jeunes, se sont rassemblées sous un vent glacial et une pluie continue devant le Parlement de Bretagne. Dans la foule, les pancartes et banderoles affichaient "Créations sans précarisations", "Oui au travail, non à l'esclavage", "Osons un autre avenir", ou encore "Jeunes? Oui. Cons? Peut-être. Esclaves? Jamais". "Je suis là contre cette loi et particulièrement contre François Hollande. J'ai voté Hollande et je croyais qu'il ferait une politique de gauche... et au final c'est une politique pro-patronat", a dénoncé Jean-Philippe, chômeur de 35 ans réfugié sous un parapluie.
"Cette loi, c'est précariser le travail de tout le monde", a critiqué Louise-Yvonne, étudiante de 22 ans qui travaille en restauration pour payer ses études. "Avec cette loi, je ne serais qu'un kleenex qu'on peut jeter. On va être des esclaves."
Une centaine de lycées bloqués en France
Dans un communiqué, la rue de Grenelle évoque "90 établissements" bloqués, selon les informations transmises par les académies. Le ministère rappelle que la France compte 2.500 lycées publics (professionnels ou généraux).
Quelques centaines de lycéens se sont retrouvés ensuite place de la Nation à Paris en fin de matinée, avant le rassemblement contre le projet de loi travail place de la République dans l'après-midi. L'Union nationale lycéenne (UNL) s'est dite "très satisfaite" de cette mobilisation. Une porte-parole l'a qualifiée d'"inédite" pour une première journée d'action, "avec aussi peu de temps pour la préparer". Les lycéens n'ont pas cours le mercredi après-midi.
L'organisation "appelle à poursuivre la mobilisation" et une date pour de nouvelles actions devrait être annoncée prochainement.
Faire converger les luttes