Une manifestation de cadres chez STEF aux Essarts en Vendée, sous la bannière du syndicat CFTC, réclamant le départ immédiat de deux salariés, délégués syndicaux de la CGT. Une situation inédite dans le monde syndical qui révèle un climat social délétère dans l'entreprise.
"Ça a été une putain de claque, on a joué le jeu pendant deux mois de ne pas retourner dans l'entreprise, même si dans nos mandats on pouvait y retourner, mais on attendait la décision de l'inspecteur du travail".
Yoann Jadaud est encore sous le coup de l'émotion. Le conducteur de camion frigorifique est retourné à son travail après que l'inspection du travail lui a donné raison, ainsi qu'à son collègue Mehdi. Tous deux ont été licenciés abusivement par leur employeur STEF, aux Essarts en Vendée.
S'ils ne se savaient pas attendus amicalement, ils n'avaient pas imaginé la haine qu'allait susciter leur présence dans les locaux de la société. Leurs collègues de la CFTC, les ont rejoint brandissant des panneaux "honte à vous", "manipulateurs", "harceleurs", "cassez-vous", "terreur". L'un des manifestants a même enfilé une cagoule noire.
Leur "faute", être élus CGT au CSE de STEF, et y avoir défendu des collègues victimes d'injures racistes. La CGT dénonce "une cabale organisée par leur employeur". "Nos camarades ont dénoncé des actes racistes dans l'entreprise, mené une enquête sérieuse sur le sujet faisant suite à un droit d'alerte pour atteinte aux droits des personnes, débattu en réunion CSE et défendu les valeurs de la CGT puis licenciés", signe dans un courrier l'Union Départementale CGT de la Vendée.
La CGT accuse la direction d'avoir organisé cette manifestation de rejet. Les relations sociales dans l'entreprise sont pour le moins tendues, et "les représentants syndicaux CFTC sont des cadres proches de la direction". "L'employeur n'a pas cherché à calmer le jeu, bien au contraire, et nous pouvons le démontrer", indique Valérie Staelens de l'Union Départementale CGT de la Vendée. "L'inspection du travail a entendu toutes les parties, et a conclu qu'il n'était pas possible d'autoriser le licenciement".
"Ils nous ont coincés, dos au mur, on a été surpris, j'ai essayé de discuter, j'ai fait valoir la décision de l'inspection du travail, il n'y a rien eu à faire. Ça fait mal quand vous passez dix ans votre vie à défendre les salariés en y mettant du cœur et ses convictions, et qu'on nous caractérise de terreurs, de presque terroristes..." La voix de Yoann Jadaud s'étrangle, il se reprend, "ça a été une humiliation".
La CGT ne compte pas en rester là, "cette situation inédite ne peut rester sans réponse. Cette manifestation antisyndicale rarissime est encore plus inquiétante dans le climat actuel, où le recul des droits syndicaux concorde avec une offensive de l'extrême droite". Et puis il y a cette cagoule, "La cagoule face aux syndicalistes combattant le racisme fut jadis le nom d'une organisation politique". (Organisation politique et militaire clandestine de nature terroriste, active dans les années 1930 en France. NDLR).
Que pense la CFTC de cette affaire ? Le syndicat chrétien, qui a pris contact avec la CGT, indique selon cette dernière, mener l'enquête et affirme vouloir prendre toutes les décisions nécessaires pour se débarrasser des brebis galeuses. Contactées, la CFTC comme l'entreprise STEF n'ont pas encore répondu à nos demandes.