Médecin-skipper, Magali navigue à la voile autour du monde au secours des soignants isolés dans les îles

Médecin de formation et passionnée de navigation, Magali Jeanteur a créé l'association TUSI (Trait d'Union Soignants des Îles) pour soutenir les soignants insulaires, souvent débordés et isolés. Son parcours de vie, parsemé d’épreuves personnelles et professionnelles, l'a poussé à s'engager pour une meilleure santé des soignants. Portrait d'une femme à la croisée des vagues et du soin.

"J'ai toujours navigué. À l’âge de 15 jours, j'étais déjà sur un bateau." Magali Jeanteur est pratiquement née sur l’eau. “Mon père était dans la Marine nationale”. La mer, l’océan, est un besoin vital, une ressource nécessaire pour cette fille de marin devenue médecin par vocation.

Une association pour soutenir les soignants des îles

À travers son association TUSI -Trait d'Union Soignants des Îles- elle a décidé de venir en aide aux soignants de ces territoires parfois oubliés, où la pénurie de professionnels de santé est alarmante.

L'objectif de TUSI est de créer du lien entre les soignants insulaires et leur offrir un soutien moral et professionnel. 

Magali organise ainsi des webinaires mensuels, abordant des sujets essentiels à leur pratique quotidienne, et propose des échanges d'expériences pour rompre l'isolement. “Les soignants des îles sont souvent débordés, en burn-out, et coupés du reste du monde médical”, explique-t-elle. Grâce à son bateau, le Tu'ati Manuia, ambassadeur de TUSI, elle va à la rencontre de ces soignants en difficulté, leur offrant un espace de répit et de partage.

Une carrière bousculée par la vie

Si Magali Jeanteur a réussi à concilier navigation et médecine, son parcours n'a pas été sans embûches. En 2001, alors qu’elle n’a que 31 ans, son mari est victime d'un grave accident qui bouleverse leur vie. Maman de trois jeunes enfants, elle doit faire face à la lourdeur du quotidien tout en continuant sa carrière médicale. “Les médecins ne donnaient pas une nuit à mon mari, mais il est encore là, aujourd'hui grand-père”, confie-t-elle. Ce drame personnel l'a poussé à redéfinir sa pratique de la médecine, en s'éloignant des urgences hospitalières pour se tourner vers la médecine d'action, notamment celle liée à la navigation.

Une médecine adaptée à la navigation 

Magali est devenue une référence en médecine de la course au large, en collaboration avec le Dr Jean-Yves Chauve. Ensemble, ils ont formé des skippers à l'autogestion de leur santé en pleine mer. Entre deux cours et plusieurs missions de soutien médical, elle continue à former des navigateurs à la gestion des urgences médicales en autonomie, tout en enseignant la médecine de catastrophe à des équipes internationales.

Naviguer vers un rêve de solidarité

Aujourd'hui, Magali Jeanteur navigue entre ses missions de téléconsultation, notamment dans les déserts médicaux français comme l'Ardèche ou la Guyane, et son engagement pour TUSI. Son rêve ? Un monde dans lequel les soignants seraient heureux d'exercer, dans des conditions dignes et respectueuses de leur engagement. Face à la souffrance de ces derniers, qu'elle observe en France comme à l'étranger, elle constate une réalité inquiétante.

Quand je vois qu'une infirmière se reconvertit en architecte d'intérieur, ça me désole. Les salaires sont misérables et les conditions de travail inacceptables.

Magali Jeanteur

Le projet d'un diplôme spécifique à la médecine insulaire

Pour Magali, l'avenir passe par la professionnalisation de son projet associatif et la mise en place d'un diplôme de médecine insulaire, afin de mieux accompagner les soignants des îles et des zones isolées. Forte de ses compétences en téléconsultation, elle envisage de développer des outils d'intelligence artificielle pour faciliter l'autodiagnostic des soignants en termes de santé mentale, dans le but d'éviter des burn-out, voire des suicides. “La santé ne concerne pas que les soignants, elle a besoin d'autres compétences, de ponts entre différents savoir-faire”, explique-t-elle.

Malgré les tempêtes qu'elle a traversées, Magali Jeanteur garde le cap : continuer à aider ses collègues, en mer comme sur terre, tout en poursuivant son rêve de naviguer autour des îles françaises à bord de son voilier. “J'ai pris l'air, j’ai pris la mer, mais je n'ai jamais arrêté de soigner”, sourit-elle, prête à remettre les voiles.

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