C'est l'artiste Gabriel Saglio qui l'a annoncé sur Facebook. Alors qu'il devait jouer à Villers-Cotterêt pour la fête de la musique, il aurait été déprogrammé. La raison ? Son refus de signer une clause de « neutralité politique », dans une ville gérée par le Front National.
Il n'en revient pas. « C’est la première fois qu’une telle demande nous est faite en plus de 500 concerts ! » s'indigne Gabriel Saglio dans son communiqué. Le 15 avril, un accord était conclu entre le groupe et la municipalité. Mais dans le contrat qu'il devait signer avec la mairie de Villers-Cotterêt pour que son groupe se produise lors de la fête de la musique, l'équipe municipale exige alors l'ajout d'une clause :
« Les artistes s'engagent, dans le cadre de leur prestation artistique, à respecter le principe de neutralité politique. A défaut, la prestation ne sera pas rémunérée. »
Pas de clause, pas de contrat
Surpris par cette précision, le groupe breton contacte la mairie pour expliquer leur refus sur des bases juridiques. Le 13 juin, coup de tonerre. Ils reçoivent un courrier de la municipalité leur expliquant que leur candidature... n'est finalement pas retenue.Une décision intolérable pour le musicien qui ajoute :
« Je n’ai jamais été un tribun politique sur scène. Je n’avais pas l’intention de m’y atteler pour l’occasion. Notre message d’ouverture à la richesse de toutes les cultures est un message déjà suffisamment politique en ces temps de repli sur soi. »
«On ne ré-écrit pas les textes»
Contactée par téléphone, la mairie de Villers-Cotterêt ne comprend pas la polémique : « Depuis un an la ville inclut cette clause. Ce sont eux qui n'ont pas voulu signer le contrat ».Pour la municipalité, l'existence de cette clause est parfaitement justifiée. « Les gens viennent écouter de la musique, pas assister à des meetings politiques. » Avant d'ajouter : « On ne veut pas qu'ils profitent de la scène pour exprimer un avis politique. La clause concerne ce qui se passe en dehors des spectacles. Il est question de prestation artistique et non d’œuvre artistique. Les artistes sont donc libres de s'exprimer dans leurs chansons. On ne ne ré-écrit pas les textes des musiciens, vous savez. Si la chanson est déjà écrite... »
Déjà en 2014
Ce n'est pas la première fois qu'une telle situation se produit à Villers-Cotterêt. La mairie a d'ailleurs créé cette clause en réaction à ce qui s'est passé en 2014. Cette année-là, le groupe de rock Jagas était déprogrammé. Fabrice Coalava, le producteur du groupe, expliquait alors :« Le nouveau maire Front national de Villers-Cotterêts, M. Franck Briffaut, a décidé de déprogrammer d'une manière arbitraire et opaque le groupe de musique actuelle français Jagas [...] On nous a dit que le groupe ne correspondait pas à l'image de Villers-Cotterêts. »
En 2015 également, le maire demandait le retrait du livret d'une exposition consacrée au thème de la montée des eaux, présentée à la médiathèque municipale. L'exposition comportait en effet une oeuvre symbolisant « la montée de l'extrême droite ».
La ministre de la culture Fleur Pellerin avait alors dénoncé une « censure » de la part de l'extrème-droite. « Je condamne fermement le geste de Franck Briffaut et j'apporte tout mon soutien aux deux artistes dont l'oeuvre a été censurée », avait-elle ajouté.