Alpes-Maritimes : Beuil fait son entrée parmi les « Villes et Villages des Justes de France »

Une place comble pour Beuil, ce dimanche 14 novembre, où plusieurs générations étaient réunies, et un honneur, celui de l'attribution du titre de « Villes et Villages des Justes de France » pour des actes de bravoure durant la Seconde Guerre mondiale.

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Plus de sept décennies ont passé mais le souvenir reste solidement ancré à Beuil. Il est aujourd'hui revigoré par une noble distinction, celui d'une commune remerciée par une communauté. 

Créé en 2010, le réseau des « Villes et Villages des Justes de France » distingue les localités ayant caché des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils sont nombreux à avoir été ainsi sauvés du joug nazi et de la milice de Vichy, alors qu'ils n'étaient que des enfants ou des adolescents. 

Une cérémonie empreinte d'émotions

Pour Beuil, ce dimanche 14 novembre est la date d'une reconnaissance. Le village situé dans les Gorges du Cians, qui compte un plus de 500 âmes à l'année, a rempli la place Joseph-Garnier. Une cérémonie a eu lieu devant des descendants des familles, les officiels, les habitants, et surtout des personnes cachées à l'époque, des survivants.

Parmi eux, le maire Roland Giraud a fait part de son émotion : "c'est une reconnaissance vis à vis des gens qui ont été hébergées ici et pour reconnaitre aussi les Beuillois qui se sont impliqués à leur risque et péril pour sauver une centaine de juifs entre l'été 1943 et l'été 1944".

A cette époque, 250 habitants et une centaine de réfugiés peuplent le village. Un système de garde, plus bas dans la vallée, est mis en place pour prévenir de l'arrivée des Allemands. Les caches réparties dans le village, dans les granges ou dans l'église de l'abbé Ollive, permettaient alors, le cas échéant, d'abriter les membres de la communauté israélite. Les cacher pour les sauver tous, car aucune dénonciation ou arrestation n'a été effectuée par l'occupant durant cette année. 

Les discours se sont enchainés pour honorer la mémoire de tous ceux qui ont participé à cet élan de solidarité. Un souvenir vivace et détaillé par Michèle Khan, qui a survécu, enfant, grâce à l'accueil des Beuillois. Elle s'est rappelée à haute voix de "ceux qui ont équipé des caches et des placards de survie, qui ont partagé chaque jour la polenta, la pomme de terre et les lentilles, avec ceux qui pouvaient à tout instant causer leur perte. Cela se nomme l'amour des autres". 

Une plaque siglée du réseau des « Villes et Villages des Justes de France » a été dévoilée par le maire et le président du Conseil départemental, Charles-Ange Ginésy, un geste suivi par des applaudissements émus.

Un passé discret

Cette histoire, désormais libérée du sceau de la confidentialité, a été découverte par un habitant, Michel Rémy. Il a mis au jour des archives spécifiant l'attitude du village de Beuil à cette période de l'Histoire, en 2014, dont il n'avait jamais entendu parler avant. Il a permis de révéler le rôle des Beuillois, comme celui du couple Di Carlo, les propriétaires de l'hôtel du Cians, dont établissement a servi de lieu d'accueil. C'est la démarche de Rémi Michel qui a permis l'attribution du titre de « Villes et Villages des Justes de France ».

"Je suis le gardien de mon frère"

C'est à Jérusalem, en Israël, que l'Institut international pour la mémoire de la Shoah a diligenté l'enquête destinée à recueillir preuves et témoignages sur le cas de Beuil. Yad Vashem a créé le programme de Justes parmi les nations en 1963. Il rend hommage à ceux "qui ont risqué leurs vies pour sauver des juifs pendant l'Holocauste. Ceci représente une unique, et sans précédent, tentative des victimes d'honorer les individus [...] qui se sont tenus à leurs côtés". 

Très strictes, les enquêtes de Yad Vashem pour honorer les Justes parmi les nations et valider l'inscription de la commune au rang des « Villes et Villages des Justes de France » se font uniquement s'il n'y a eu aucune contrepartie. "Je suis le gardien de mon frère" ont effectivement répondu les habitants de Beuil entre ces deux étés de 1943 et 1944. Beuil est devenue ainsi la 139ème commune française à être élevée à ce rang.

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