L'Unité de Soins Palliatifs de l'hôpital d'Antibes dans les Alpes-Maritimes accueille environ 12 résidents. Parmi eux, Lucky, un croisé braque-labrador anglais. Ce jeune chien est une vraie mascotte et tout le monde apprécie sa présence, même ceux qui au début en avait peur.
Quand vous arrivez dans le bâtiment de l'unité de soins palliatifs de l'hôpital d'Antibes l'ambiance est lourde et pesante. Ici, les séjours sont souvent très courts.
Le palliatif, en médecine, c'est tout ce qui est fait pour atténuer les symptômes d'une maladie sans agir sur sa cause. Comprenez ; on ne peut plus progresser sur la guérison, mais nous pouvons soulager les douleurs.
Quand nous arrivons pour tourner un reportage sur les Blouses Roses (ces bénévoles qui apportent un peu de distractions aux patients), les portes de l'ascenseur s'ouvrent et nous trouvons par terre un doudou en forme de nounours ! L'opérateur de prise de son s'en émeut, pensant que l'objet appartenait à un enfant. Sauf qu'en fait, quelques secondes après l'ouverture des portes, c'est un magnifique toutou noir qui nous accueille et récupère son doudou pour nous l'offrir en guise de bienvenue toute queue remuante.
Lucky à 5 ans et c'est un parfait mélange de braque allemand et de labrador. Magnifique collier rouge autour du cou, Lucky vous saisit par son regard marron clair. Une merveille d'expression.
Lucky est un canaliseur de sourire et apaise les patients
Ici, personne n'est surpris de la présence d'un animal au cœur même d'un bâtiment hospitalier où l'hygiène est plus que de rigueur. Sa maîtresse s'appelle Sandra Colin et elle est infirmière depuis 20 ans. Elle fête ses 10 ans cette année dans le service d'USP (Unité de soins palliatifs).
Quand j'ai récupéré Lucky dans un refuge, il avait 2 ans. Il avait passé sa vie attaché dans un camp de gens du voyage. Son rôle était d'aboyer en cas de danger. Rien d'autre. Une fois récupéré, j'ai prévenu tout mon entourage que ce ne serait pas facile. Il aboyait sans cesse, il fuguait et était très agité. Un éducateur m'a aidé et je l'ai hyper sociabilisé. Je lui faisais tout faire avec moi jusqu'à... L'emmener au travail.
Sophie Colin, infirmière, maitresse de Lucky.
Quand Sandra a proposé d'emmener Lucky avec elle un matin, ses responsables lui ont tout de suite dit oui. Lui qui ne pouvait rester seul s'est immédiatement montré différent de ce qu'il était jusque-là. Un calme et une douceur infinie avec l'ensemble du personnel et surtout... avec les patients.
" Je vois le regard des patients quand il se dirige vers eux. Il s'illumine aussitôt ! Ils oublient un temps leur maladie. Parfois même, quand les gens pleurent, Lucky se colle à eux et attend gentiment que les larmes cessent. Pour nous c'est aussi très émouvant à voir."
Sandra Colin, infirmière et propriétaire de Lucky
Démonstration : Nous suivons Lucky qui au hasard de ses envies se promène dans les couloirs de l'établissement et entre dans les chambres. La queue s'agite, une petite dame allongée sur le dos se réveille doucement d'une sieste difficile à trouver. L'échange est immédiat et Lucky vient passer ses deux petites minutes avec elle. Rien d'autre. Pas de léchouilles ni même de tentative de monter sur le lit, il repart chercher son doudou.
"Tu vois, on est pas mal ici, tu pourrais peut-être rester avec moi pendant que ta maîtresse travaille hein ?"
Une résidente en soins palliatifs
Des familles conquises
L'effet est immédiat et le résultat ultra-concret. Nous sommes bluffés. Des familles présentes dans le couloir sont conquises elles aussi.
"C'est très agréable et tout à fait ce qu'il faut. On est dans un lieu très compliqué et il nous apporte une grande joie."
Les collègues de Sandra sont unanimes aussi. Exemple avec Samira, infirmière, elle aussi.
"Moi au début, j'avais peur. Je n'arrivais pas à le toucher. Et puis très vite, j'ai vu qu'il était gentil et maintenant j'ai des photos plein mon portable. Je joue même des fois avec lui."
Suzanne, une autre infirmière, rajoute : "au début, je l'aimais bien de loin, maintenant, c'est notre bébé ! "
Médiation animale reconnue par les professionnels de santé
Sandra aimerait passer son certificat de médiation animale pour pouvoir améliorer le quotidien des patients par la rencontre avec des animaux. D'ailleurs, l'USP accueille une professionnelle tous les lundis. Elle vient avec ses chiens, ses poules et ses lapins. Les effets sont clairement positifs sur les patients.
"C'est un vrai plus ! Contrairement à ce qu'on pense, l'unité de soins palliatifs c'est avant tout un lieu de vie. La présence de Lucky contribue à ce que cet endroit soit apaisant et rende les patients plus détendus et souriants. Sa présence apporte du réconfort et de la joie".
Isabelle Casini, cheffe de service de l'unité de soins palliatifs de l'hôpital d'Antibes
Un bémol toutefois, les poils !
Sandra nous confie qu'au début, les ASH (agents de services hospitaliers en charge du ménage), étaient un peu réticentes, à cause, des poils de son chien. Aujourd'hui, elles sont conquises par sa présence et ses petits poils noirs sur ce sol si blanc font partie de leurs nombreuses tournées journalières. "Il fait partie de la famille, on est triste les jours où il ne vient pas où quand il part en vacances. "
Pet at work, une tendance qui se généralise
Apporter son animal au travail est une tendance qui se développe grandement. Le pet at work arrive tout droit des États-Unis. Amazon et Google sont précurseurs... En France Joué Club, Nestlé, ou Purina se sont lancés dans cette aventure. Et même la mairie de Paris ou de celle de Grenoble qui le propose depuis 2021 :
Le soir Sandra et Lucky rentrent du travail heureux d'avoir passé la journée ensemble.
"Le soir il est épuisé, et c'est bien normal compte tenu de tout ce qu'il donne aux patients"
La porte de l'ascenseur se referme, nous quittons l'unité de soins palliatifs avec un petit sourire.
Lucky nous a mis la patte sur le cœur.