On les appelle les filets fantômes car ils sont discrets et souvent invisibles pour des yeux non avisés. Ils constituent pourtant une pollution réelle. Dans les Alpes-Maritimes, le conseil départemental a décidé de mobiliser les grands moyens pour récupérer ces objets indésirables en matière plastique qui sont préjudiciables aux fonds marins.
Elle en parle avec passion et à l'écouter on saisit fort bien l'enjeu de telles opérations. Coralie Meinesz est ingénieur en milieu marin et travaille pour le département des Alpes-Maritimes.
Depuis 2023, cette spécialiste de la gestion des risques chapeaute les missions en mer visant à récupérer ce qu'il convient de nommer des intrus. Il s'agit de filets de pêche issus de la pêche professionnelle et qui sont très vecteurs de pollution marine.
Dans quelques jours, explique Coralie Meinesz, "nous allons embarquer à bord d'un bateau direction Roquebrune-Cap-Martin, en zone Natura 2000". L'an passé, c'est du côté de Théoule-sur-Mer que les opérations avaient été conduites dans le cadre du dispositif Plan Méditerranée 06.
La journée de prélèvement des filets n'est que la partie immergée de l'iceberg comprend-on quand on interroge notre ingénieur : "il y a un gros travail de prospective, en amont, pour cartographier les zones où sont localisés les filets. Pour la prochaine opération, à Roquebrune-Cap-Martin, ce ne sont pas moins de 12 plongées en quatre jours. Cela représente une longueur de quatre kilomètres". Des opérations conduites en partenariat avec l'association Naturdive et les gestionnaires locaux.
Certains filets ne mesurent que quelques centimètres quand le plus grand peut atteindre 60 mètres de long.
Cela peut paraître surprenant que des filets se retrouvent dans nos mers mais "il ne s'agit en aucune façon de pollution volontaire", abonde la spécialiste des milieux marins pour les zones où l'on trouve de tels filets.
Car perdre un filet, pour un professionnel représente un coût non négligeable. Des filets qui selon les cas se retrouvent accrochés à une ancre et se déchirent, parfois ce sont les flotteurs desdits filets qui se désagrègent. L'altération peut aussi être le fait de mauvaises conditions météorologiques en mer.
Catastrophe écologique
Ces filets dits filets fantômes sont très préjudiciables aux fonds marins estime Coralie Meinesz, les impacts sont multiples : "ils provoquent une abrasion du substrat marin et provoquent par leur présence une diminution de la biodiversité. Cela provoque parfois l'emprisonnement des poissons et on voit aussi des algues qui s'accrochent dessus".
Le fait est qu'ils sont constitués de plastique. Dans l'émission Thalassa que France 3 avait consacré à ce sujet, on expliquait que, dans les eaux européennes, les filets de pêche représentent près d’un tiers des déchets plastiques rejetés en mer. Un chiffre qui fait froid dans le dos.
Lors de leurs interventions de collecte des filets, les plongeurs ont pour consigne de pratiquer avec délicatesse pour ne pas "abîmer les fonds marins en raison des petits morceaux qui se désagrègent."
Le département des Alpes-Maritimes n'est pas le seul à se pencher sur le sujet. L'Institut Méditerranéen d'Océanologie est aussi partie prenante dans cette traque des filets fantômes.