Selon ces deux conservatoires des Alpes-Maritimes, 90% des élèves continuent désormais leur formation à distance avec leur professeur. Une formation par webcam interposée qui pourrait changer certaines méthodes de travail
C'est pour elle comme une bouffée d'air pendant son confinement. Chaque mercredi à 16h, Annalisa, 7 ans, allume l'iPad de la famille pour se connecter avec Marc, son professeur de violon. Trente minutes de cours pendant lesquelles Annalisa va jouer, face à la webcam, les morceaux qu'elle étudie.
De l'autre côté de l'écran, Marc l'écoute et lui indique les points qu'elle doit travailler pour la semaine prochaine.
"C'est un peu bizarre", reconnaît la violoniste en herbe, "mais c'est un moyen pour communiquer avec les profs qu'on n'avait pas avant."
C'est aussi une manière de se changer les idées pendant le confinement. "Au lieu de ne faire que les devoirs, on peut aussi faire de la musique. C'est comme un jeu !" Marc Zorgniotti, son professeur de violon, se réjouit : "le cours avec Annalisa s'est très bien passé ! Il n'y a pas eu de problème de connexion et, en plus, c'est une enfant qui s'entraîne régulièrement."
"Sonorité électrique"
"Pour les élèves, le cours est une excellente source de motivation. Et, de mon côté, ça me permet de suivre leur évolution, de continuer à les guider et à les aider jour après jour", poursuit l'enseignant. Avant de reconnaître :Du côté du conservatoire de Nice, un système identique de cours à distance a été mis en place : pour la musique, la danse et théâtre.Un des principaux problèmes avec les cours à distance, c'est le côté électrique de la sonorité. À travers un écran, on perd en qualité, on ne saisit pas toujours les subtilités, les nuances, les contrastes... On n'a pas accès à la sonorité naturelle de l'instrument.
Marc Zorgniotti, professeur de violon au conservatoire de Menton
"La danse, ça se travaille dans des studios de 150-200m²", précise Thierry Muller, le directeur du conservatoire niçois. "Peu de gens ont ça chez eux, alors les enseignants font ce qu'ils n'ont jamais le temps de faire : entretien musculaire, histoire du ballet, histoire de la danse…" Du côté du théâtre, forcément, "il n'y a plus de notion d'espace à travailler", enchaîne Olivier Baert, le responsable du département théâtre au conservatoire de Nice. Le travail se concentre alors davantage sur la théorie et le commentaire de mises en scène.
"Ballet de chambre"
Skype, Whatsapp, YouTube... les outils numériques sont nombreux pour faciliter la poursuite des cours en ligne. Mais c'est très souvent une nouveauté. Malgré cela, les personnes les moins geeks ont réussi à se former sur le tard et à maîtriser ces nouveaux logiciels rapidement. Les conservatoires de Nice et de Menton ont ainsi pu commencer leurs premiers cours à distance quelques jours seulement après leurs fermetures officielles. Seuls les orchestres n'ont pas pu être maintenus.À Nice, cela donne même lieu à des projets originaux version 2.0. Une trentaine d'élèves de deuxième et de troisième cycles de danse sont en train de créer un ballet de chambre vidéo.C'est une expérience qui marque l'emploi du temps des jeunes et qui est attendue avec impatience parce que c'est le seul moment de la semaine où un adulte -en dehors des parents- a un lien avec les enfants dans la période de confinement.
Paul-Emmanuel Thomas, directeur du conservatoire de Menton
Chacun tient un rôle en fonction de la superficie de la pièce dans laquelle il travaille. C'est le confinement qui crée l'histoire.
Thierry Muller, directeur du conservatoire de Nice
Et après ?
"Les enseignants constatent que le travail est presque plus sérieux que lors des cours" - Thierry Muller.
"Ils savent que ce qu'ils enregistrent sera regardé et parce qu'ils maîtrisent ces médias. C'est une forme de jeu, qui les attire et les motive. Après le confinement, nous allons sans doute réfléchir à un mélange entre la présence physique et un suivi virtuel des élèves."
Au total, à Nice comme à Menton, 90% des élèves poursuivent désormais leurs cours grâce à une webcam. Dans les couloirs et les salles de classe des conservatoires, c'est pour l'instant le silence qui joue sa partition. Mais Paul-Emmanuel Thomas promet : "On attend la reprise avec impatience et les premières répétitions auront une saveur très particulière !"
L'hommage aux soignants
De plus, l’Ensemble de Guitares de Nice, issu du conservatoire, a créé une belle vidéo de remerciements destinée à toutes les personnes mobilisées en cette période.Sept guitaristes proposent ainsi un arrangement de "La Marseillaise", ponctué par des messages de soutien de 120 familles niçoises (pour majorité liées au conservatoire).Un enregistrement individuel pour chacun à la maison, confinement oblige.Cannes en ligne aussi
Les 61 professeurs du conservatoire de Cannes ont aussi mobilisés.Iles ont fait preuve d’inventivité et ont élaboré des méthodes diversifiées en adéquation avec leur discipline et leurs idées pédagogiques, et restent joignables pour accompagner les élèves en cas de besoin.Des initiatives originales naissent de cette situation, telle que la classe de harpe qui diffuse par internet de petits concerts pour soutenir les personnels soignants.