La lenteur des indemnisations met à rude épreuve les nerfs des sinistrés de la Roya, 6 mois après la tempête Alex

À Breil-sur-Roya dans les Alpes-Maritimes, la "quasi-totalité" des sinistrés, selon le maire de la commune, attend une indemnisation ou conteste celle versée par leur assureur. "On n'arrive pas à se projeter", regrette l'une des habitantes que nous avons contacté.

"C'est usant ! Nerveusement, c'est très difficile." Plus de six mois ont passé depuis que la tempête Alex a défiguré la vallée de la Roya. Et, chez certains habitants, rien n'a vraiment bougé...

On est toujours sous arrêté de péril. La structure de la maison n'a pas été touchée, mais une partie du terrain a été emportée. Notre dossier piétine, c'est un véritable ping-pong entre l'assurance et l'Etat.

Carole Bouakba, habitante sinistrée

Carole Bouakba habitait une maison sur les hauteurs de Breil-sur-Roya dans les Alpes-Maritimes, avec son mari et ses deux enfants.

Depuis la tempête, ils ont été relogés dans la commune, grâce à AGIS06 et au Département, qui prend à sa charge leur loyer pendant un an.

Relances

Dans la foulée d'Alex, leur assurance a débloqué un fonds d'urgence de 2.000 €. Et c'est tout. La famille a fait réaliser des études des sols. "Pendant deux mois, pas de réponse de notre assurance, malgré nos relances hebdomadaires", se désespère Carole Bouakba.

Un jour, on a vu sur Facebook une pub de l'assurance et on a posté un commentaire sur notre situation. 30 minutes après, un responsable nous a appelé et un devis a été accepté. Mais aucune société n'est encore venue faire le boulot.

Carole Bouakba, habitante sinistrée

Au nord de Breil-sur-Roya, même sentiment d'inertie pour Abdel Djerourou. Chez lui, la tempête Alex a creusé un trou dans son jardin, mais elle a surtout inondé l'appartement du rez-de-chaussée, où vit sa fille handicapée, la cave et le toit, où la laine de verre détrempée et les câbles électriques n'ont pas fait bon ménage...

Agents d'assuré

Pendant deux mois, sa femme et sa fille ont été relogées dans la famille ; lui n'a pas eu d'autres choix que de dormir dans sa voiture. Début décembre, ils ont pu regagner leur logement. Et depuis, plus rien. Ou presque : une somme dérisoire.

Il y a un mois, l'expert de l'assurance est passé et a chiffré les dégâts à 4.000 euros. Alors, j'ai fait faire une contre-expertise, qui a estimé que de nombreux dégâts n'ont pas été pris en compte par le premier expert. Un artisan de la vallée chiffre à 50.000 €.

Abdel Djerourou, habitant sinistré

En cas de désaccord sur le coût des travaux à entreprendre, "il faut faire appel à un expert d'assuré", précise Pierre Shorter, représentant Alpes-Maritimes de la Fédération française de l'Assurance et président des Agents généraux d'assurance.

"Je demande aux assurances de jouer le jeu."

Abdel comme Carole sont des clients de longue date de leur assurance. "Elle attend que l'Etat statut pour savoir si le fonds Barnier intervient sur ma maison", poursuit Carole Bouakba.

Résultat, Sébastien Olharan, le maire de Breil-sur-Roya, ne compte plus les appels de désespoir de ses administrés.

"Le devenir du bâtiment ne doit pas entrer en ligne de compte, et l'incertitude qui demeure en la matière ne saurait être un prétexte pour différer, voire éviter l'indemnisation", s'agace le premier magistrat dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux. "Je demande aux assurances de jouer le jeu."

En cas de réparations, "l'assurance peut commencer à indemniser les travaux", reconnaît Pierre Shorter.

Fonds Barnier

En cas de destruction du logement, l'assurance basera son indemnisation sur la valeur "à neuf" du bien que devront calculer les Domaines.

Pour indemniser, il faut avoir cette valeur vénale, mais cela n'empêche pas l'assurance de faire une avance. Il ne faut donc pas hésiter à la relancer.

Pierre Shorter, président des Agents généraux d'assurance

Ce qui ne sera pas pris en charge par l'assurance le sera alors par le Fonds Barnier, comme le terrain ou les murs de soutènement. "Le Fonds Barnier indemnisera suivant la valeur des Domaines moins ce qu'a versé l'assurance, y compris si des pièces n'ont donc pas été assurées", poursuit Pierre Shorter. "Le temps du Fonds Barnier et de l'Etat est un temps plus long que celui des assureurs."

"Ceux qui ont perdu des véhicules, les procédures sont bouclées", précise Sébastien Olharan à France3 Côte d'Azur. "Mais ceux qui ont été sinistré dans leur habitation, quasiment la totalité des personnes est en attente d’une indemnisation et ne savent pas combien ils vont être indemnisés." Le maire chiffre à une quarantaine le nombre de personnes concernées.

Plus de 6 mois et on n’a toujours pas de projection sur l’avenir, si on pourra retourner chez nous ou si on va être exproprié.

Carole Bouakba, sinistrée

"On continue à payer le crédit immobilier de la maison et l'assurance", poursuit Carole Bouakba.

"On part sur des années d'avocats, de contre-expertises... C'est un vrai choix de rester ici, mais tout ça nous bouffe. Le retour du traumatisme à 6 mois, ça se ressent. On est patients, on chemine dans nos deuils, mais on n'arrive pas à avancer parce qu'on n'arrive pas à se projeter."

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