Le Conseil constitutionnel a validé vendredi le fichier des mineurs isolés étrangers, accusé par des associations de servir la lutte contre l'immigration irrégulière au détriment de la protection de l'enfance.
Ce fichier biométrique, créé par la loi asile et immigration de 2018, vise à rassembler les empreintes digitales et les données de tous les jeunes étrangers estimés mineurs à leur arrivée en France, pour rationaliser leur prise en charge par les départements, selon les pouvoirs publics.
Une vingtaine d'associations, dont l'Unicef et Médecins du monde, avaient déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) contre ce fichier.
Dans les Alpes-Maritimes la situation des migrants mineurs s'avère compliquée. L'ancien préfet du département avait même été condamné par la justice à ce sujet.
Une de nos équipes avait rencontré des migrants déclarés mineurs à Nice :
Conforme à la Constitution
Mais les "Sages" ont jugé ce fichier conforme à la Constitution. Les dispositions contestées "n'ont ni pour objet ni pour effet de modifier les règles relatives à la détermination de l'âge d'un individu et aux protections attachées à la qualité de mineur", écrivent-ils.
Les juges constitutionnels évoquent notamment la possibilité de contester l'évaluation de l'âge devant un juge. Mais, précise le Conseil constitutionnel, si une personne refuse de donner ses empreintes elle ne peut pour autant être considérée comme majeure.
Pour les "Sages", le traitement automatisé "vise à faciliter l'action des autorités en charge de la protection des mineurs et à lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers en France".
"La collecte, l'enregistrement et la conservation des empreintes digitales et de la photographie d'un étranger permet aux autorités chargées d'évaluer son âge de vérifier qu'une telle évaluation n'a pas déjà été conduite", expliquent-ils.
Les mineurs non-accompagnés, longtemps hors des radars des questions migratoires, ont vu leur nombre tripler en deux ans pour s'établir à 40.000 selon l'assemblée des départements de France, des chiffres contestés par les associations.
La décision du Conseil constitutionnel est "décevante", a réagi Me Patrice Spinosi qui défendait des ONG. Le fichier "mêle intérêt supérieur de l'enfant et lutte contre l'immigration illégale, deux objectifs pour nous parfaitement contradictoires", a-t-il dit à l'AFP.
Le Conseil d'Etat devra se prononcer sur le fond du dossier. L'avocat demande que soit consacrée "une présomption de minorité qui interdirait à l'administration d'exécuter une mesure d'expulsion prise contre un étranger qui se déclare mineur tant que le juge des enfants n'a pas statué sur son âge".