A Nice des quartiers, des rues, saturent de chaleur quand d’autres sont plus frais : le point sur les îlots de chaleur

Le problème est de plus en plus criant dans les villes. Béton et bitume sont vecteurs de chaleur intensive. En période de canicule, les effets sont encore plus probants mais des solutions de rafraichissements existent. On fait le point à Nice.

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Saviez-vous que la population urbaine française a plus que doublée depuis 1936 ? Et que des études permettent une espèce de diagnostic thermique du milieu urbain permettant le repérage des îlots de chaleur ?

Disciple du réchauffement climatique ou climatosceptique force est de constater qu’une longue période de canicule frappe l’Hexagone cet été. Elle fatigue les organismes, détruit les récoltes et favorise les risques d’incendies dans les zones de grande sècheresse.

Dans les villes, imperméabilisées, en surchauffe par rapport aux campagnes, des quartiers affichent une température plus élevée que d’autres.

A LIRE : L'alerte canicule sera levée ce mardi 26 juillet.

Qu'est-ce qu'un îlot de chaleur ?

Ce phénomène désigne la différence de température entre une ville, plus chaude, et la campagne qui l'entoure, plus fraîche. C'est une mesure relative, exposée en degrés : on parle par exemple d'un îlot de chaleur de +3 °C. Son intensité est plus forte les nuits d'été. "Le vrai différentiel de température entre une ville et un champ va s'exprimer en fin de nuit parce que la ville va garder sa chaleur et avoir du mal à l'évacuer, expliquait Erwan Cordeau, chargé d'études sur le climat, l'air et l'énergie à l'Institut Paris Région à Franceinfo l'été dernier. A l'inverse, le champ va se refroidir très facilement".

La faute à l’urbanisation

Les responsables sont :

  • l'occupation des sols, leur minéralisation, les revêtements et leurs couleurs (les surfaces foncées, ou noires comme le goudron),
  • la hauteur et la densité des bâtiments (davantage encore pour ceux qui sont vitrés ou en métal), bref, tout ce qui concerne le sol et le bâti. Parce que c’est eux qui absorbent et restituent, la nuit, l’énergie solaire emmagasinée dans la journée.
  • À quoi il convient d’ajouter les activités humaines intenses beaucoup plus concentrées dans les villes (chaudières, climatisations, eaux chaudes circulantes dans les égouts, moteurs à réaction des avions…).

Résultat, ces bulles de chaleur, renforçant la pollution de l’air, affectent la qualité de vie des citadins ainsi que leur santé.

La santé concernée

Les effets sanitaires peuvent être plus ou moins graves : allergies, problèmes respiratoires et cardiovasculaires induisant une réelle surmortalité en période de canicule.

La lutte contre les îlots de chaleur urbains

Dans les villes, la température peut être 10° plus élevée que dans les zones rurales environnantes. En PACA, les zones urbaines concentrent 75% de la population.

Des secteurs propices à la surchauffe peuvent s’étendre de quelques centaines de mètres à plusieurs kilomètres. Une fois ces secteurs identifies, des stratégies d'adaptations sont mis en place. 

Le Cerema, est un centre d’expertise qui mène depuis plusieurs années des recherches sur les ilots de chaleurs urbains et développe une méthode pour décliner le concept de zones climatiques locales.

L’objectif est d’identifier des secteurs à enjeux. Le fait de les repérer permet de prioriser les actions à mener.

Aude Peyron, responsable d’études urbanisme opérationnel ville durable au Cerema explique l’origine de l’étude menée sur Nice : « C’est un partenariat réalisé entre le Cerema et la Région PACA. Il s’agissait de tester une méthode en développement fondée sur une analyse cartographique. Cette dernière croise des données de morphologie urbaine et des données d’occupation du sol. Elle exploite des images satellitaires à très haute résolution spatiale. »

L’objectif est de diminuer les bulles de chaleur urbaines. Pour cela, il existe plusieurs solutions explique la jeune femme :

  • "Il y en a qui sont fondées sur la nature à travers la végétalisation, la gestion des eaux pluviales qui va permettre d’infiltrer l’eau de pluie dans le sol et de participer au rafraîchissement de la ville.
  • Il y a tout un travail qui est fait sur le type des revêtements, des matériaux leurs couleurs qui vont plus ou moins réfléchir les rayonnements solaires.
  • Un autre travail est basé sur la construction dans les nouveaux quartiers où l’on peut jouer sur l’architecture bioclimatique et sur l’écoulement de l’air. On joue aussi sur l’isolation du bâti pour limiter la climatisation qui rejette de la chaleur en ville
  • Enfin, on tente de diminuer le trafic automobile".

Du greenwashing à Nice ?

La région qui souhaite accompagner les collectivités dans le développement de projets coopère avec le Cerema pour être force de proposition, expérimenter et évaluer de nouvelles solutions visant à promouvoir la perméabilisation des sols, la nature en ville, la lutte contre les îlots de chaleur, et de manière générale la mise en œuvre de solutions fondées sur la nature dans les aménagements urbains.

Pour Juliette Chesnel-Le Roux, présidente du groupe écologiste à la Métropole Nice Côte d'Azur, "il y a bien trop peu de parcs dans la ville comme celui d’Estienne d’Orves ou celui de la colline du château. Il faut éviter à tout prix les chantiers pharaoniques qui mettent du béton ou du verre comme Iconic, la place de la Gare qui est une catastrophe climatique."

La Compagnie de Phalsbourg et Fondimmo ont remporté le concours lancé par la Métropole de Nice « Gare Thiers-Est », avec Studio Daniel Libeskind, Février Carré Architectes, Fondimmo et le paysagiste Jean Mus pour ce projet :


L'élue d'ajouter : "quand on fait de la végétalisation au sol, il faut la faire là où il y a de l’eau. Ce qu’il faut éviter, c’est ce que fait le maire de Nice, du greenwashing. Planter des grands espaces de pavés de gazons parce que ça, ça ne rafraîchit pas la ville. Et savoir qu’à court terme il n’y a pas de solution miracle.
Quant à la place de l’eau, c'est un sujet délicat parce qu’on est en canicule, donc en manque d’eau. On ne va pas se mettre à arroser partout ou à mettre des plans d’eau partout dans la ville. Ce qui est indispensable : c’est des fontaines disponibles pour que les gens et leurs animaux puissent boire."

De l'Egypte ancienne à la région PACA

De récentes découvertes archéologiques (menées par Israël Finkelstein de l’Université de Tel-Aviv) montrent comment, à la fin de l’âge de bronze, l’Egypte ancienne a réagi aux changements climatiques.

Anticipant la sécheresse généralisée, les famines entrainant des guerres dévastatrices et de grandes migrations, les Egyptiens de la région de Canaan ont massivement réformés leur agriculture.

Selon les archéologues, les habitants de cette région auraient croisé le bétail local avec des zébus pour obtenir des animaux plus puissants et plus résistants à la chaleur, capables de labourer le sol dans des conditions climatiques plus difficiles. 
L’étude du pollen de l’époque montre que ces efforts auraient permis de maintenir et d’étendre l’agriculture en zone aride et de stabiliser la situation alimentaire dans cette partie de l’empire égyptien.

L’objectif est donc  bel et bien de s’adapter au changement climatique.

Pour le Cerema, cela passe également par le mobilier urbain, les ombrages, les brumisateurs, les fontaines d'eau potable...

Celles-là même qui ont été si souvent enlevées à Nice.

Comme quoi le bon sens ne l’emporte pas toujours.

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