La Cour de cassation examine ce mercredi le pourvoi de Maurice Agnelet, 77 ans, contre sa condamnation par la cour d'assises de Rennes pour l'assassinat en 1977 de sa maîtresse, Agnès Le Roux, jeune héritière d'un casino niçois. Agnelet espère obtenir l'annulation du verdict rendu le 11 avril 2014.
Le corps d'Agnès Le Roux, disparue à la Toussaint 1977 à l'âge de 29 ans, n'a jamais été retrouvé, ni son véhicule. Cette absence de preuve matérielle a fait planer le doute sur la culpabilité de Maurice Agnelet.
Quelques mois avant sa disparition, Agnès Le Roux avait vendu ses parts du casino à un concurrent pour 3 millions de francs. La somme, d'abord versée sur un compte commun aux deux amants à Genève, s'est retrouvée, après la disparition d'Agnès, sur un compte au seul nom d'Agnelet.
Si son pourvoi était rejeté ?
Si son pourvoi était rejeté, la décision deviendrait définitive pour la justice française. Mais, dans cette affaire qui a connu de multiples et spectaculaires rebondissements, il a toutefois la possibilité de saisir, à nouveau, la Cour européenne des droits de l'Homme.Agnelet a d'abord bénéficié d'un non-lieu en 1985, puis a été acquitté en 2006, avant d'être condamné en appel à 20 ans de prison l'année suivante, avant que la Cour européenne des droits de l'Homme estime, début 2013, que ce procès n'était pas équitable, faute de motivation du verdict de 2007, ouvrant la voie à un troisième procès, qui s'est tenu à Rennes.
Cette fois, devant la Cour de cassation, la défense de Maurice Agnelet va faire valoir que la demande d'audition par la cour d'assises d'une ex-épouse
d'Agnelet, principal témoin de l'accusation, a été trop tardive pour qu'elle puisse être entendue.
Une "atteinte grave aux droits de la défense", selon François Saint-Pierre, avocat de Maurice Agnelet.
Elle avait permis en 1999 la réouverture du dossier en revenant sur l'alibi qu'elle avait jusqu'alors fourni à son amant.
"jusqu'au-boutiste"
Par ailleurs, l'acte d'accusation renvoyant Agnelet devant les assises "ne décrit aucun crime", selon Me Saint-Pierre. Et dans la motivation de sa décision, la cour fait référence à un témoin dont Me Saint-Pierre n'a "absolument pas souvenir" que sa déposition ait été lue ni débattue à l'audience. Les procès-verbaux des débats n'en font pas état, selon lui.Devant la Cour de cassation, où Maurice Agnelet sera représenté par Me Didier Bouthors, ce ne sont pas les faits qui seront examinés, mais la bonne
application du droit.
Dans son avis écrit avant l'audience, l'avocat général préconise le rejet du pourvoi de Maurice Agnelet, selon des sources proches du dossier.
Mais la chambre criminelle, qui devrait mettre sa décision en délibéré, n'est pas tenue de suivre cet avis.
Le troisième procès, à Rennes, avait donné lieu à un affrontement au sein de la famille Agnelet, le fils Guillaume Agnelet accusant son père du meurtre d'Agnès Le Roux, certitude basée, a-t-il affirmé, sur des révélations de ses parents.
Le clan Agnelet s'est ensuite déchiré, la mère de Guillaume contestant ces accusations.
Le frère d'Agnès Le Roux, ainsi que ses deux soeurs, sera présent à la Cour de cassation, a-t-il indiqué à l'AFP, pour la dernière fois dans cette affaire.
Après le verdict de Rennes, il avait annoncé que ses soeurs et lui ne prendraient pas part à un éventuel quatrième procès, auquel ils ne croient d'ailleurs pas.
Pour Jean-Charles Le Roux, face à un Agnelet dans la "droite ligne de sa stratégie procédurière jusqu'au-boutiste" consistant à utiliser "toutes les voies de recours", "ça suffit, à un moment, il faut s'arrêter".