Le 30 août dernier, un homme, criblé de balles, avait été retrouvé dans un appartement de Nice-Est. Le principal suspect a été interpellé en région parisienne, mis en examen et placé en détention provisoire. Ces épisodes violents se multiplient depuis le début de l'été. Comment les forces de police affrontent cette situation ?
Depuis le début de l'été à Nice-Est, le quartier Roquebillière vit une guerre des territoires entre trafiquants de drogue. Des hommes cagoulés, fusils d'assaut à la main, déambulent en plein jour. Des coups de feu, en pleine nuit, résonnent au pied des tours. Les habitants sont inquiets et craignent de recevoir une balle perdue.
"J'en peux plus, ça fait 46 ans que j'habite ici, je crois que je vais déménager parce que je n'en peux plus", témoigne une habitante.
"C'est un quartier compliqué pour l'action policière"
Dans les locaux du commissariat Auvare, les forces de l'ordre font un briefing avant une descente de police.
À 17 heures, 50 policiers se déploient simultanément pour boucler le quartier et ils ne tardent pas à faire une découverte :
C'est tout l'équipement qu'ils ont pour conditionner la matière pour la vendre, de toute évidence l'équipe est sur place
confie une policière.
20 000 euros par jour
Fin juin, la police judiciaire a démantelé un réseau d'importations de drogue depuis l'Espagne. Les membres de ce trafic en revendaient rue Fenoglio de Briga et route de Turin.
Le chiffre d'affaires s'élevait jusqu'à 20 000 euros par jour. Sept personnes sont actuellement, en détention provisoire.
Depuis ce coup de filet, de nouveaux réseaux tentent de s'implanter par la force.
"C'est un quartier qui est compliqué pour l'action policière parce qu'il est enclavé, les bâtiments sont très hauts et toute action policière est rapidement détectée", explique Frédéric Pizzi, directeur interdépartemental de la police nationale. "Pour les policiers de terrain qui essayent de pilonner les points de deal, d'attraper les guetteurs et les revendeurs, on essaye de s'adapter. Les policiers le connaissent bien".
C'est le cas de Sophie. Elle intervient régulièrement dans cette cité qui, peu à peu, livre ses secrets comme un sous-sol où les trafiquants s'engouffrent pour fuir la police.
"Ce sont eux qui ont cassé à coups de masse les murs, nous, on ne savait pas qu'il y avait tous ces parkings qui pouvaient se rejoindre comme il y avait des murs, on ne savait pas où ça emmenait. À force de courir après eux, on trouve", indique la brigadière cheffe Sophie de la brigade spécialisée de terrain (BST) Nice-Est.
Une violence débridée et incontrôlée
Au parquet de Nice, on suit quotidiennement l'évolution de la situation. "Depuis début juillet, il y a une grosse activité sur Nice Est, on compte six ouvertures d'informations judiciaires pour un total de 23 personnes mises en examen. C'est plutôt un bon résultat", se félicite Julie André, procureure adjointe en charge de la criminalité organisée.
16 armes de catégorie armes de guerre, des kalachnikovs, ont été saisies. "On est en matière de trafic de stupéfiants sur des guerres de territoire, des guerres de contrôle et c'est ce qu'on observe aujourd'hui de manière générale. L'incendie des Moulins le 18 juillet l'illustre de manière tragique. C'est en lien avec le narcobanditisme, une violence débridée et incontrôlée", raconte Damien Martinelli, procureur de la République de Nice.
Près de dix épisodes de violences ont eu lieu cet été. Les commanditaires sont des trafiquants niçois qui recrutent parfois très loin de la capitale azuréenne.
Un certain nombre de Parisiens, des personnes originaires de Marseille et nous avons également des étrangers en situation irrégulière, c'est un recrutement qui est ouvert dans le cadre de l'ubérisation du trafic de stupéfiants.
Damien Martinelli.
Une situation que les habitants subissent et qu'ils refusent d'accepter. "Aujourd'hui, si on a eu un certain nombre d'interpellations en flagrance, c'est parce qu'on a des habitants qui ont le courage et le réflexe dès qu'il se passe quelque chose, d'appeler les services de police. Il est pour moi essentiel qu'on conserve ce lien avec les habitants", déclare Damien Martinelli.
À ce jour, il y a eu des condamnations, en comparution immédiate. Ils encourent six mois à trois ans de prison, pour les petits dealers. Les faits les plus graves, eux, sont entre les mains d'un juge d'instruction.