Isabelle Schaal, Gardannaise de 47 ans, souffre depuis 25 ans de cette atteinte neurologique, la "maladie du suicide", qui provoque d'atroces douleurs. Depuis plusieurs mois, elle milite pour qu'un traitement révolutionnaire mais très coûteux puisse être mis en vente et remboursé en France.
"Comme une amputation sans anesthésie" : c'est ainsi qu'Isabelle Schaal décrit sa maladie, l'algie vasculaire de la face (AVF), dont elle souffre depuis près de 25 ans. Entre de premières douleurs épisodiques à la vingtaine et son diagnostic finalement posé en 2017, elle a traversé vingt ans d'errance médicale avec quantité de médicaments et traitements sans résultats.
Au cours d'une crise, les malades souffrent d'intenses douleurs comme des décharges électriques, avec une impression d'arrachement de l'oeil qui dure parfois plusieurs heures.
"L'AVF suscite les pires douleurs, toutes maladies confondues. On ne l'appelle pas "maladie du suicide" pour rien : certains mettent fin à leurs jours dans des centres anti-douleurs, d'autres partent se faire euthanasier en Belgique", se désole-t-elle. "Ces douleurs ne sont pas humaines, on a parfois envie que tout s'arrête".
"C'est une maladie qui est relativement mal connue en France", détaille le docteur Dominique Valade, neurologue et ancien chef de service du centre d'urgence des céphalées à l'hôpital Lariboisière.
Il estime à 150.000 le nombre de personnes atteintes d'algie vasculaire de la face en France aujourd'hui, sans compter tous ceux qui n'ont pas encore identifié cette pathologie par manque d'information. La forme chronique, celle dont souffre Isabelle, concerne environ 20% des malades.
Ces douleurs ne sont pas humaines, on a parfois envie que tout s'arrête".
Quand ses douleurs se sont aggravées, passant de crises épisodiques à une forme chronique et sévère, Isabelle Schaal s'est retrouvée dépourvue de solution, les médecins lui annonçant qu'elle avait essayé tous les traitements existants.
Désespérée, elle s'est donc tournée du côté des Etats-Unis. Ce sont des neurologues new-yorkais qui lui ont, pour la première fois, parlé des anticorps monoclonaux : des médicaments créés contre les migraines chroniques, et utilisés pour soulager les douleurs de l'AVF.
Depuis, Isabelle Schaal fait des allers-retours réguliers en Suisse pour y acheter son traitement par injection, l'Aimovig n'étant pas commercialisé en France à ce jour.
Une "révolution médicale" coûteuse pour les patients
Les anticorps monoclonaux font l'objet d'une autorisation de mise sur le marché en France depuis 2018 pour les migraines chroniques réfractaires, et ont reçu un avis favorable de la Haute autorité de santé. Une "révolution médicale" qui pourrait aussi aider les malades d'AVF, estime Isabelle Schaal, qui a pu reprendre une vie quasiment normale après des années de douleurs insupportables.
"Je suis redevenue comme avant", se réjouit cette créatrice de bijoux.
Pas suffisant, toutefois, pour que ces médicaments soient mis en vente et remboursés pour les patients français, qui peuvent débourser 250 à 500 euros chaque mois pour une injection qui apaisera leurs souffrances. Un coût qui prive de nombreux patients de ce remède novateur, efficace à 80%.
"Il faut maintenant se battre pour que tout le monde ait accès à ce médicalement, approuve le Dr Dominique Valade, tous les neurologues y sont favorables".
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— isaschaal (@BijouxLilo) April 6, 2021
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En janvier 2021, Isabelle obtient la confirmation que les anticorps monoclonaux ne seront toujours pas remboursés en France, contrairement à 12 autres pays européens. Ils peuvent être délivrés en milieu hospitalier, mais l'absence de remboursement empêche pour l'instant leur généralisation.
"C'est une aberration, le décalage avec le reste de l'Europe est affolant", s'insurge-t-elle. Dès le lendemain, elle adresse un courrier au ministre de la Santé Olivier Véran, neurologue de formation, et lance une pétition.
Aujourd'hui, le texte approche des 100 000 signatures. Dans les commentaires, de nombreux malades la remercient d'évoquer publiquement cette maladie.
"Souffrant d'AVF depuis 25 ans, il y a peu de douleurs aussi fortes [...] et tout le monde s'en fout !" raconte Sonia. "C'est extrêmement douloureux, très fatigant et handicapant professionnellement et socialement", ajoute Nelson.
"Je ne sais pas comment j'ai réussi à vivre, à supporter ça pendant tant d'années", se demande aujourd'hui Isabelle Schaal, qui espère obtenir une réponse du ministre de la Santé sur le remboursement de ces injections. Depuis la création de sa pétition, des dizaines de personnes la contactent chaque jour : "Moi je suis tirée d'affaire, maintenant je dois me battre pour les autres".