Coronavirus: "le risque le plus important est la panique", estime Didier Raoult, spécialiste des maladies infectieuses

Dans la petite station balnéaire de Carry-le-Rouet où sont rapatriés près de 200 ressortissants Français depuis Wuhan (Chine), l'inquiétude liée au coronavirus nCov 2019 grandit. Pour le professeur Didier Raoult, spécialiste des maladies infectieuses, "le risque le plus important est la panique".

C'est le nouveau défi des autorités sanitaires : contrôler le pic d'inquiétude grandissant en France lié au coronavirus nCov 2019 et plus particulièrement dans les Bouches-du-Rhône, à Carry-le Rouet, qui a accueilli 182 Français rapatriés de Wuhan, épicentre de l'épidémie.

Deux d'entre eux présentant des signes pouvant faire penser à une atteinte par le coronavirus, ont été dirigés dès leur arrivée vers le pôle des maladies infectieuses de la Timone. Ils ont été testés puis déclarés négatifs deux heures après. 

"On a l'habitude du diagnostic extrêment rapide", explique le professeur Didier Raoult, directeur de l'IHU Méditerranée Infections. "C'est une expertise que nous avons mise en place depuis plusieurs années, et qui permet en moins de deux heures, d'obtenir des tests concernant tous les virus et bactéries respiratoires". 

Une plateforme performante et d'expertise, mise en place avec une équipe lyonnaise.
 
"On a développé ce système dans les urgences. Nous pratiquons 70000 à 80000 tests par an. C'est notre savoir faire qui a sans doute poussé les autorités à diriger les Français rapatriés aux alentours de Marseille", précise le spécialiste. 
 

"Le risque le plus important est la panique"


"De mon point de vue, le risque le plus important est la panique", tempère le professeur Didier Raoult, spécialiste des maladies infectieuses.

Ce chercheur biologiste et professeur de microbiologie français veut clairement rassurer.

"C'est peut-être quelque chose de nouveau qui inquiète, mais ce n'est qu'une infection respiratoire virale de plus", explique-t-il.

"Les politiques doivent calmer le jeu. Ces personnes seront à proximité de notre IHU, seul endroit en France capable de faire des centaines de prélèvements et de gérer cette crise".

Aucune information sur les vecteurs de transmission

Le spécialiste, basé à Marseille, ne peut pour le moment émettre aucune hypothèse sur les vecteurs de transmission du nCov 2019.

"Pour l'instant, on ne sait pas. La chaleur ou encore l'humidité peuvent jouer mais il n'y a pas de phénomène univoque. Certains virus ont des dimensions saisonnières mais pas tous. Par exemple, le H1N1 a entraîné beaucoup de cas en automne, puis plus aucun cas en décembre".

Concernant la transmission du coronavirus par les moustiques, l'épidémiologiste a plus de certitudes, c'est non. "Il faut bien que l'on sache que ce coronavirus ne se transmet pas par les moustiques", précise l'infectiologue Beaucoup de questions se posent encore notamment, son espérance de vie dans l'air. Lors d'une conférence de presse jeudi en fin de journée, le Préfet des Bouches-du-Rhône Pierre Dartout avait tenu à rassurer par avance sur les risques de propagation du virus.

"C'est très difficile à mesurer. Mais nous avons déjà fait des tests sur des objets inanimés", explique le professeur Didier Raoult. 

"Cela dépend des circonstances, cela peut durer assez longtemps. Notre étude a été faite dans un laboratoire dans des conditions particulières. Dans des conditions réelles, nous ne savons pas", concède l'épidémiologiste marseillais.

Après 12 heures et demie de vol, les 182 rapatriés français sont arrivés vendredi peu avant 12h30 sur le sol français, à la base militaire d'Istres. Les passagers ont ensuite été acheminés par bus jusqu'à un centre de vacances, à Carry-le-Rouet, à une quarantaine de kilomètres, sur la Côte bleue. 

L'inquiétude des habitants de Carry-le-Rouet

Malgré la multiplication des communications médicales rassurantes, la nouvelle de cette arrivée alimente les inquiétudes à Carry-le Rouet. Cette petite commune de Provence, d'à peine plus de 5.800 habitants, est plus habituée à accueillir des touristes que des rapatriés.

"J'ai bien peur que cette nouvelle nous cause du tort, c'est pas du tout une bonne pub", craint Frédéric Vernet commerçant, alors que la ville s'apprête à célébrer les "oursinades", une fête populaire au cours de laquelle la commune, pendant un mois, se déclare capitale des oursins qui seront dégustés sans modération.

"On va voir comment ça évolue, mais il ne faut pas céder à la panique", témoigne le gérant d'un hôtel Julien Carraretto, qui a reçu de nombreux coups de fils et SMS de proches l'invitant à rester prudent.

"Tout va bien s'ils ne sortent pas du lieu de confinement, mais je crains que 14 jours ce soit long et qu'ils ne respectent pas ces consignes", s'interroge Elisabeth, infirmière à la retraite. "Un virus ça se propage et ça mute. C'est sûr qu'on est plus exposés que le reste des Français", angoisse la vieille femme qui a appris "stupéfaite" la nouvelle la veille au soir.

Pour l'heure, environ 8.900 cas d'infection à ce nouveau coronavirus ont été détectés en Chine continentale (hors Hong Kong) et 213 patients en sont morts. Une centaine de malades ont été répertoriés dans une vingtaine d'autres pays, dont six en France, mais aucun patient n'est mort hors de Chine.

"Non au coronavirus sur notre côte bleue"

Sur les réseaux sociaux, le virus a aussi gangréné les conversations. Un groupe Facebook "Non au coronavirus sur notre côte bleue" a été créé.

"J'ai peur pour mes proches", explique Guilhem Kudszus, créateur du groupe.

"J'ai peur pour le commerce, mes parents vivent de ça comme beaucoup de monde sur la côte bleue. Beaucoup moins de monde vont venir chez nous à cause de ça. Ce qui m'énerve le plus c'est que l'on ne nous dit rien".

Parmi les commentaires, certains appellent à la raison. "Le maire aurait dû être prévenu autrement que par la presse, c'est la moindre des choses, mais faisons confiance aux services de santé et de sécurité qui organisent cela, ils sont parmi les meilleurs du monde".
 

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