Devant ce qu'elle considère comme une décision absurde de ce reconfinement, la danseuse Amandine Aguilar a dansé pendant une demi-heure dans un supermarché de Marignane dans les Bouches-du-Rhône. Elle refuse que la culture soit considérée comme non-essentielle.
"Je ne suis pas une personne qui manifeste habituellement, et si j'ai fait cette vidéo, c'était surtout pour dénoncer l'absurdité de ce qui se passe avec ce confinement et les décisions parfois ubuesques", explique Amandine Aguilar, professeure de danse et danseuse elle-même.A la manière de Chaplin, sur sa vidéo, on la voit évoluer en tutu noir dans les rayons d'un supermarché.
Elle passe des rayons considérés essentiels aux rayons non-essentiels, avec une gestuelle caricaturale et très expressive.
"J'ai voulu mettre en scène l'absurde des décisions prises".
Si elle comprend "la nécessité d'un confinement" pour enrayer la deuxième vague de l'épidémie de Covid, elle ne comprend pas "le deux poids, deux mesures".
"Pour quelles raisons, le rayon bébé est fermé ? En quoi est-ce de la concurrence déloyale? Y-a-t-il des petits commerces en centre-ville de Marignane qui proposent ce type de produits ? Non et cela était déjà le cas bien avant la crise", explique-t-elle.
Le périscolaire oui, l'extra-scolaire non
"L'idée m'est venue par colère", précise la danseuse.Alors que le premier ministre, Jean Castex, détaillait le contour des mesures de ce nouveau confinement, l'exaspération est montée d'un cran lorsqu'elle apprend que les activités périscolaires vont continuer et pas les activités extra-scolaires. Son activité.
"Mon mari est prof et le périscolaire accueille plus d'élèves que nous, en extra-scolaire, c'est quand même une décision illogique", s'indigne Amandine.
Le gouvernement veut éviter les regroupements, "je comprends mais les activités doivent cesser alors qu'on a eu zéro cas Covid parmi nos élèves", asure la prof de danse.
"Et quand on voit le monde dans les supermarchés, c'est Disneyland, c'est quand même rageant", poursuit-elle.
J'ai décidé d'improviser
"Nous sommes partis jeudi dernier avec mon mari qui me filme et j'ai totalement improvisé dans les rayons", explique Amandine.Le soir, le montage terminé, elle poste la vidéo sur les réseaux sociaux. De nombreux messages de soutien affluent, notamment de la profession.
Une initiative qui fait naître l'envie de se fédérer et de se regrouper en collectif.
Sur ses réseaux sociaux, elle précise qu'elle a pu se produire pendant une demi-heure, avant que la sécurité intervienne pour la prier de sortir.
Elle en a profité pour acheter des pâtes et a pu s'entretenir avec le directeur de l'établissement.
Disciplinés mais punis
Professeur de danse à Sausset-les-Pins dans les Bouches-du-Rhône, elle a dû s'adapter et s'organiser depuis le premier confinement."Cela fait plus de six mois que l'on se plie à tout ce que l'on nous demande", explique Amandine.
"Nous avons investi dans des masques pour nos élèves, dans des produits et ustensiles de ménage pour désinfecter les salles de cours. Nous avons adapté les cours pour respecter les mesures barrières et la distanciation", précise la professeur de danse.
Après cette première épreuve, très compliquée financièrement pour son association créée en 2016, Amandine voit le nombre de ses élèves diminuer, elle doit rembourser les cotisations, et encore s'adapter.
"J'ai mis en place des cours par zoom depuis chez moi, je garde le lien pédagogique. Mais comment voulez-vous que je puisse corriger les postures de mes élèves ? Elles dansent devant un écran, coincées entre leur lit et l'armoire de leur chambre. Il y a mieux non pour s'adonner à sa passion ?", déplore la prof de danse.
Confinés sans culture
La plus grande déception d'Amandine, c'est de voir les gens se confiner sans avoir pu, au préalable, acheter un dernier livre, ou avoir accès à la culture et l'art."Pour moi, danser et apprendre à danser aux enfants, c'est ma vie. M'interdire de le faire, c'est m'enlever une partie de moi-même. Et notre métier apporte du bonheur et rend la vie plus belle, c'est pas essentiel de donner du bonheur aux gens ?", s'interroge Amandine.