Condamné en 2020 pour insuffisance d'action face aux rodéos, après la plainte d'un collectif d'habitants d'un quartier de Marseille, l'Etat mène des actions de sensibilisation auprès des jeunes dans les Bouches-du-Rhône.

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"On peut se calmer au lieu de jouer les kékés... Le wheeling c'est pour impressionner les nanas !", lance Pierre Cano, provocateur, au groupe d'adolescents réunis au lycée de Valabre à Gardanne, près de Marseille, pour une séance de sensibilisation aux dangers des rodéos urbains.

"Mais non, c'est pour se faire plaisir", rétorque un ado au sujet de ces roues arrière en moto ou scooter. "Si on veut des sensations, il y a des endroits pour ça, sur un circuit", réplique sans se démonter le formateur de l'association Addictions France, qui anime la séance ce jour-là, avec une demi-douzaine d'autres intervenants, dans le cadre d'une opération organisée et financée par la préfecture de police.

Depuis un an, un peu plus de 2 000 lycéens ont été concernés dans les Bouches-du-Rhône. Ce département où l'Etat a été condamné, en 2020, pour insuffisance d'action face aux rodéos, après la plainte d'un collectif d'habitants d'un quartier de Marseille.

C'est également à Marseille, en août, que le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a annoncé une intensification des contrôles contre ces actes "criminels". Dans les Bouches-du-Rhône, 2 228 opérations anti-rodéos ont été menées en 2022, soit 27 519 personnes contrôlées, 6 323 verbalisations, 1 003 interpellations et 107 deux-roues saisis, selon la préfecture de police.

C'est d'ailleurs par un rappel de la loi que la session commence, à Gardanne, pour ces élèves de Première. Rappel assuré par deux gendarmes de la brigade motorisée d'Aix-en-Provence... dont les motos garées dans la cour attisent la curiosité.

Un sifflement impressionné accueille l'annonce de la peine maximale pour rodéo : "Un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende", sanction doublée pour un délit en réunion, triplée en cas de conduite sans permis ou sous l'emprise d'alcool ou de stupéfiants. "Mais attention, le mec qui fait un wheeling juste comme ça, c'est pas du rodéo, il faut que ce soit répété", rassure le gendarme Xavier Cheyroux.

"S'il manque un collègue"

Les militaires insistent longuement sur le fait que les assurances ne jouent pas pour les accidents en cas de rodéo ou de conduite sous influence : "Vous pouvez vous retrouver avec une dette à payer toute votre vie." Côté humain, les rodéos ont fait un mort en 2022 dans le département, "un jeune qui s'est tué lui-même", sans compter les blessés, expliquent encore les gendarmes. Car derrière les statistiques, ce sont des drames : "Quand vous allez taper à la porte de la maman pour apporter la nouvelle, elle comprend tout de suite. C'est dur..."

Dans son atelier, axé sur l'échange d'expériences, Pierre Cano ne dit pas autre chose. "Vous êtes 28, si à la fin de l'année il manque un collègue, ça sera terrible." Face à lui, deux ont déjà un scooter, 10 font de la conduite accompagnée et trois ont une voiture sans permis.

Cyril Nivoix, du bureau de la sécurité routière de la préfecture, enchaîne avec les chiffres du département, en forte hausse : en attendant les statistiques officielles, il y a eu au moins 116 décès routiers en 2022, contre 100 en 2021. Dont 40 sur des deux-roues, soit 35 %.

Or, les motards sont souvent jeunes. "Il faut arrêter de dire que le comportement des jeunes c'est une fatalité. C'est à nous de réfléchir à toutes ces attitudes", poursuit le fonctionnaire. Mais, dans son auditoire, les réflexes sont ancrés.

A sa question, "pour vous, ça veut dire quoi l'expression : on n'a qu'une vie ?", la première réponse est : "Fais ce que tu veux !"

La sensibilisation compte deux autres ateliers, un sur les équipements de sécurité, un autre, très attendu, de conduite de simulateurs de deux-roues. Bien loin des jeux vidéo habituels, peu arrivent au bout du parcours, ce qui doit justement faire prendre conscience des dangers de la sur-confiance en soi.

"C'était cool et vachement pédagogique, dit Luke, 16 ans. Le rodéo, certains peuvent voir ça comme artistique, mais il faut faire attention." Antoine, 16 ans, dont la moto est actuellement en panne, a trouvé l'atelier "instructif", même s'il se dit "pas vraiment concerné."

(avec AFP)

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