"Chaque jour, je compte les rats dans mon jardin", les poubelles d'un traiteur gâchent la vie des habitants du quartier

Depuis l'été 2024, Christine et sa famille, propriétaire d'une maison dans le 15ᵉ arrondissement de Marseille, vivent un véritable enfer. Le traiteur de la zone artisanale voisine dépose ses sacs de déchets alimentaires à côté de leur pavillon. Et les rats prolifèrent, faisant peser des risques sanitaires

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"D'abord, il y a eu l'odeur, immonde". Dans son lotissement du 15ᵉ arrondissement de Marseille, Christine ne décolère pas. Avec son mari, ils coulaient des jours sereins dans leur maison, achetée il y a plus de 20 ans.

Jusqu'à cet été 2024, quand des effluves nauséabonds ont subitement envahi leur jardin. "La puanteur s'est installée, et elle devenait chaque jour plus forte, avec les voisins, on ne comprenait pas" , se souvient Christine.

L'arrivée des rats

Ce n'était que le début du calvaire. En à peine quelques jours, les rats étaient là. Un premier, aperçu dans le jardin. Un autre dans la cuisine d'été. Le terrain de la propriété est rapidement devenu leur territoire et leurs toilettes pour les déjections.

Les rats, ils sont là tout le temps, un véritable défilé

Christine Doutre, propriétaire à Marseille

à France 3 Provence-Alpes

Risques sanitaires

"On a bien essayé de les chasser" détaille Christine. "On se ruine en pâtes raticides !" Le poison n'est que partiellement efficace. "En plus des rats vivants, dans le jardin, on s'est mis à retrouver les rats morts". Tout sauf le terrain de jeu rêvé pour Evan, le petit-fils tout juste né, et que le couple compte bien pouvoir garder.

On a peur que notre petit-fils attrape des maladies dans le jardin, c'est invivable

Christine Doutre, propriétaire à Marseille

à France 3 Provence-Alpes

Et c'est sans parler des parents âgés et immunodéprimés, hébergés dans le pavillon, et "qui n'osent plus sortir".

Un monticule d'ordures derrière le mur

Le couple n'a pas mis longtemps pour découvrir la source de leurs nouveaux malheurs. Quelques mètres derrière, de l'autre côté du chemin, le terrain vague adjacent est désormais jonché de dizaines de sacs-poubelle noirs. Tous remplis de déchets alimentaires pestilentiels. Pour le plus grand bonheur des rongeurs.

Déchets d'un traiteur

Le terrain est situé sur le périmètre de la zone artisanale voisine, Artizanord. Après enquête, Christine découvre qu'un traiteur implanté là, "La Fine Gueule", y dépose chaque jour ses sacs de déchets alimentaires. Des détritus auparavant déchargés de l'autre côté de la zone. Avant que d'autres résidents ne s'en plaignent.

Le lotissement Castors de la Dauphiné à Marseille, à côté de la zone d'activité Artizanord.

Statu quo avant un jugement

Contacté par téléphone, le gérant de la PME qui génère les déchets renvoie vers le gestionnaire de la zone artisanale, la SOGIMA (Société de Gestion Immobilière de la Ville de Marseille), estimant que leur collecte est de sa compétence. Christian Blanc explique qu'il est en litige avec la SOGIMA sur la question de la collecte, et qu'"à défaut du service de mise à disposition de containers, il ne paie plus ses factures".

Des ordures jamais collectées

 À la SOGIMA, le président du directoire confirme que le tribunal judiciaire doit se prononcer le 10 janvier 2025. Pierre-Edouard Berger détaille : "au contraire de nos autres locataires, 'La Fine Gueule' refuse de prendre en charge ses déchets et les dissémine un peu partout. Et lui aussi pointe les problèmes sanitaires que génèrent ces déchets alimentaires en putréfaction.

Pendant longtemps, 'La Fine Gueule' a stocké ses déchets alimentaires devant son atelier, je m'interroge sur sa notion de l'hygiène.

Pierre-Edouard Berger, président du directoire de la SOGIMA

à France 3 Provence-Alpes

Le gestionnaire de la zone d'activité fait actuellement évacuer à ses frais les déchets du traiteur déposés à l'intérieur de Artizanord, "mais pas ceux hors les murs", précise son président.

"Problème de déchets ? Adressez-vous ailleurs"

C'est la seconde bataille de Christine. Il y a celle contre les rats. Et l'autre, contre l'immobilisme.  "Pendant le litige juridique entre le traiteur et la SOGIMA, aucun ne veut prendre sa responsabilité" analyse-t-elle. Faute de payer pour des conteneurs, "La Fine Gueule" continue de jeter ses poubelles au sol, sans souscrire de contrat spécifique de ramassage. Et le gestionnaire n'a pas augmenté la fréquence de ses collectes. Christine explique qu'en désespoir de cause, elle s'est également tournée vers la mairie et la Métropole. Et toujours la même réponse : nous n'avons pas compétence dans la zone artisanale.

Tout le monde se renvoie la balle, les déchets s'accumulent, et les rats se régalent

Christine Doutre, propriétaire à Marseille

à France 3 Provence-Alpes

Les rats, un fléau à Marseille

1,5 à 2 rats par habitant. La municipalité confirme que le rongeur est un problème majeur pour la cité phocéenne. La Ville a même créé un service de "la lutte contre l'habitat insalubre et les nuisibles", avec une conseillère municipale dédiée Aïcha Guedjali. "Pour tout problème du quotidien, les Marseillais peuvent appeler Allo Mairie" explique Aïcha Guedjali. Tout en précisant que les services municipaux n'interviennent que sur le domaine municipal, pas en terrain privé comme une zone artisanale. Il y a aussi "Engagés au quotidien" pour les déchets sur la Métropole. "C'est parfois Kafka" reconnaît l'élue.

Christine, elle, a passé la matinée du jeudi 23 octobre au commissariat de l'arrondissement. Pour déposer plainte contre le traiteur.

On parle souvent de la propreté de Marseille, des incivilités. Moi là j'ai le coupable et je ne peux rien faire

Christine, propriétaire à Marseille

à France 3 Provence-Alpes

Mais comme il manque des pièces, elle y retournera ce vendredi. Les rats ont encore de beaux jours dans son jardin.

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