Incendie : comment le réchauffement climatique met les pompiers sous pression

En cette première journée de juillet, quatre massifs des Bouches-du-Rhône basculent en "rouge". L'accès y est interdit. D'année en année, les spécialistes constatent que le risque incendie augmente en lien au réchauffement climatique.

Le vent devrait souffler fort ce vendredi et les pompiers sont en alerte. Sur les 25 massifs forestiers des Bouches-du-Rhône, quatre sont interdits d'accès par arrêté préfectoral ce vendredi et les autres sont en vigilance jaune, comme l'indique la carte réactualisée quotidiennement par la préfecture.

La sécheresse s'est bien installée sur la région depuis plusieurs mois. "Le dernier mois où on était excédentaire en Paca, et où l'on avait plus de pluie que la normale, c'est juillet 2021", constate Romaric Cinotti, responsable assistance feux de forêts à Météo France. 

Depuis, le déficit pluviométrique s'est accentué et tout particulièrement sur les derniers mois. "En mai, on a eu à peine 10 % des précipitations mensuelles à l'échelle de la région", souligne l'expert.

Les choses ne sont pas près de s'arranger. Météo France annonce l'arrivée d'une nouvelle vague de chaleur ce week-end.

Une saison des feux qui démarre plus tôt

Ce qui alourdit la tâche des pompiers, c'est que d'année en année la saison à risque s'étend.

"On a des déficits qui font que dès le mois de juin, on est dans des situations qui sont comparables à mi-juillet, explique le colonel Jean-Jacques Bozabalian, officier de l'Etat-major des pompiers des Bouches-du-Rhône.

La période à risque est ainsi passée de 3 à 6 mois. Elle commence désormais dès le printemps et s'étire jusque tard en automne.

En Paca, plusieurs départements ont été touchés par des incendies, dès le mois de mars. 

Des appels à la vigilance ont dû être lancés notamment les Hautes-Alpes, Alpes-de-Haute-Provence, Alpes-Maritimes, Var.

Une saison de feux plus longue et une zone géographique plus importante. "Les risques sont accrus pour tous et c'est ça la nouveauté, vous n'avez plus une partie partie de l'arc méditerranéen qui est concernée mais tout l'arc méditerranéen et même au-delà", fait remarquer le colonel Bozabalian.

De zones à risque plus étendues

Les étés, toujours plus secs et toujours plus chauds, affectent désormais toutes les régions jusqu'au nord de l'hexagone.

Ce dérèglement climatique augmente le risque incendie dans de nouvelles zones, comme le nord-ouest de la France : Pays de la Loire, Centre-Val de Loire et Bretagne.

En mai 2022, un feu a dévasté 25 hectares de forêt à Liffré, près de Rennes (Ile-et-Vilaine), dans une région habituellement plus réputée pour son humidité que pour sa chaleur.

En 2021, les feux ont parcouru 15.000 hectares de forêts et végétation, contre 11.400 hectares représentant plus de 3 200 incendies l'année précédente, selon le bilan du Ministère de l'Intérieur.

Chacun se souvient de l’incendie le plus dévastateur, qui a frappé la réserve naturelle nationale de la Plaine des Maures, dans le Var, parti de Gonfaron le 16 août 2021 : 8000 hectares dévastés. C'est l’un des 10 plus grands feux recensés en Méditerranée au cours des 50 dernières années.

Le réchauffement climatique touche toutes les latitudes. Des incendies spectaculaires ont ravagé certains pays de l'hémisphère nord comme le Canada, les États-Unis ou la Russie en 2021.

Avec ces feux, la quantité de dioxyde de carbone (CO2) libérée dans l'atmosphère a atteint des niveaux records, selon le service européen de surveillance Copernicus, 244 millions de tonnes.

Le pire encore à venir

L'été 2021 a été le pire depuis 30 ans sur le front des incendies en Europe : près de 800.000 hectares parcourus par les flammes en juillet et août 2021.

Mais le pire est sans doute à venir. Le dernier rapport du GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), pointe des conditions météorologiques de plus en plus propices aux incendies dans de nombreuses régions du monde.

Les prévisions de Météo France sont particulièrement inquiétantes pour l'été en cours. Les prévisionnistes annoncent des températures 50% plus chaudes que les normales saisonnières dans le nord de la France et 70% plus élevées dans le sud.

Cela n'augure rien de bon pour les prochaines semaines dans notre région. Les autorités appellent les populations à la vigilance. Pour le colonel Jean-Jacques Bozabalian, "le meilleur des feux à traiter, c'est celui qui n'existe pas". 

Plus de 90 % des feux sont d'origine humaine. "On a quelques fois des feux d'origine malveillante, mais souvent c'est accidentel, et pour des choses très anecdotiques, c'est un jet de mégot sur la bordure de route qui va mettre le feu aux herbes sèches et qui va se propager très rapidement à la forêt ", rappelle le pompier.

Selon lui, "il faut qu'on développe de la culture du risque avec un engagement citoyen qui prenne en compte un certain nombre d'actions possibles".

Cette prise de conscience citoyenne est d'autant plus importante que "le risque va continuer à s'étendre", prévient Romaric Cinotti.

Pour le spécialiste incendie de Météo France, ce risque se caractérise par "une intensification des feux liée au réchauffement climatique, une extension spatiale du risque au nord, une extension à de nouveaux types de végétations, comme les friches et les feux de culture, et une extension temporelle de la campagne feux de forêt".

Lutter contre le feu avec le feu

La raréfaction des pluies se traduit aussi par une diminution de la ressource en eau, actuellement seul moyen pour combattre les feux. Ce qui implique de trouver d'autres moyens d'action.

"On commence à adopter des nouvelles techniques en reprenant des techniques plus ancestrales, de feux tactiques et autres, pour essayer de lutter contre le feu avec le feu", explique le colonel Bozabalian. La nouvelle panoplie des pompiers inclut aussi les drones et les avions d'investigation avec caméra, ou encore les appli de prévention.

Pour le sapeur-pompier, ce combat, "c'est l'affaire de tous" pour "protéger le patrimoine de chacun". Il invente chacun à s'engager, ça peut être de rejoindre les 7000 hommes et femmes sapeurs-pompiers ou une des nombreuses associations agrées de sécurité civile.

Pour Romaric Cinotti, la responsabilité de chacun, c'est aussi de s'informer et de respecter les interdictions d'accès en période à haut risque.

"Quand il y a des massifs fermés, interdits au public, ce n'est pas pour embêter le citoyen qui voulait faire sa petite randonnée, c'est au contraire pour éviter que des personnes puissent être à l'origine de départs de feux ou qu'elles soient bloquées dans un feu, voire mettent en danger des vies de pompiers", conclut-il. 

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