Patrick Merly est entré tout jeune dans l’administration pénitentiaire, à 20 ans. Aujourd’hui, il en a 62 et sort un livre sur son expérience. « Le trou à rats », titre évocateur d’une histoire très noire.
"Mon grand-père était maton et puis ça me permettait de toucher une paye de fonctionnaire non négligeable", raconte Patrick Merly. Il précise qu’il parle d’un autre temps. Le "gnouf" ou plutôt le "ballon", selon son expression préférée, a évolué.
Aujourd'hui, le surveillant pénitentiaire à la retraite sort un livre, écrit avec Marc La Mola, ancien policier de la BAC Nord de Marseille. "Le trou à rats", aux Fauves Editions.
A ses débuts, le surveillant enfile son uniforme et apprend qu’on doit l’appeler "chef ". "Et si un détenu ne rentre pas dans le rang, on s’impose par la force, on se met à 3 ou 5 dessus. Je ne suis pas fier de tout ce que j’ai fait."
La racaille, les grands voyous et Monsieur tout-le-monde
Avec le temps, il s’intéresse aux détenus et se penche sur leur parcours de vie. "On peut discuter pendant la promenade, en cellule ou en bureau d’audience. Surtout en centre de rétention. Dans les maisons d’arrêt, comme aux Baumettes, on n’a pas le temps."
Patrick Merly s’identifie fortement à certains prisonniers "Après 3 ou 4 verres, si on tue un piéton en conduisant, on peut aller au ballon. Ça peut arriver à beaucoup de monde. Ces détenus-là ne sont pas formatés pour aller en prison." raconte Patrick Merly "Je me suis reconnu dans un tas de mecs. Moi aussi, je buvais et me bagarrais quand j’étais ado. Je ne suis pas un saint, un mauvais coup et j’aurais pu me retrouver à leur place. Au gnouf."
Une situation marque particulièrement le surveillant "on a beau ajouter un frigo ou une télé dans la cellule, le soir, la porte se ferme, on est seul. Il faut justifier d’un acte administratif pour l’ouvrir avant le matin."
Il déteste les racailles et reconnait une certaine fascination pour les grands voyous. Il a côtoyé François Girard (commanditaire de l’assassinat du juge Michel), Gérald Campanella (dit "le dernier parrain de Marseille") et Bruno Sulak (célèbre braqueur.)
"Les racailles sont capables de frapper une vieille dame et de la traîner par terre pour voler son sac à main. Je ne les aime pas. Les vrais voyous suivent un code d’honneur", selon l'ancien surveillant.
"J'ai gardé les 7 derniers condamnés à mort de France"
En transit à la prison de la Santé, où travaille Patrick Merly, les 7 détenus ne sont restés que 3 jours, avant de rejoindre la prison de Fresnes. "Mais je me souviens de chacun d’eux, chaque nom et chaque visage. C’était impressionnant, ils risquaient la guillotine." Ils seront tous graciés en 1981 et condamnés à 20 ans de prison.
Le stress et l'alcool
"La prison m’a cassé" reconnaît l'ancien maton "on vit dans un milieu hors-normes, dans la violence et la tristesse." Il commence à boire jeune, pratiquement dès son embauche. "Je pense que ce milieu est un repère de dépressifs et d’alcooliques, comme dans la police."
Pourtant, il partage les tensions liées à son travail avec sa famille et ses amis.
En fin de carrière, il est "gradé". Il a compris que "pour être un bon surveillant, il faut parler avec les détenus. C’est le seul moyen de faire baisser la tension, de la désamorcer".
Il a arrêté de boire, vit toujours près de la prison des Baumettes et s'est trouvé une nouvelle activité professionnelle.
Aujourd’hui, Patrick Merly enfile régulièrement un uniforme de gendarme, policier ou gardien de prison. Apparemment, il a la "tête de l'emploi". Il est devenu comédien et figurant. "Le trou à rats" lui permettra peut-être de s'initier au métier de scénariste.