Ce jeudi 26 septembre, lors du procès des procurations frauduleuses à Marseille le procureur a requis une peine inéligibilité maximale de 10 ans pour l'ex-député LR Julien Ravier, maire des 11 et 12ᵉ arrondissements de Marseille.
Le procès des procurations frauduleuses à Marseille aura montré une image "peu reluisante" de la politique, a estimé, jeudi 26 septembre, le procureur qui a requis une peine inéligibilité maximale de 10 ans pour l'un des prévenus, l'ex-député LR Julien Ravier.
"Atteinte à la confiance publique", "clientélisme", "cynisme"
Les mots prononcés par le ministère public ou les avocats des parties civiles sont sans ambiguïté : "atteinte à la confiance publique", "clientélisme", "cynisme", "politiques d'un autre âge"... Cette fraude, révélée par la presse, avait éclaboussé le camp de la droite de la candidate Martine Vassal aux municipales de 2020 dans la deuxième ville de France. Et il avait choqué bien au-delà de Marseille puisque dans ce dossier, une cinquantaine de procurations avaient été établies aux noms de pensionnaires d'un Ehpad avec une moyenne d'âge de 90 ans.
" La loi et le respect de la loi, c'est pour les autres"
"Jusqu'où va-t-on aller si on est capable de faire voter des personnes qui présentent de graves troubles cognitifs ?", s'est interrogé le procureur de la République Jean-Yves Lourgouilloux, dans son réquisitoire. "Ce type d'affaires ne participe pas à la confiance qu'on pourrait accorder à
ceux qui devraient avoir toute notre confiance" et qui "donnent cette impression que la loi et le respect de la loi, c'est pour les autres", a-t-il tonné.
Des peines de prisons avec sursis et 20 000 euros d'amende
Sur les treize prévenus, la peine la plus lourde a été réclamée pour Julien Ravier, ex-député et ex-maire des 11ᵉ et 12ᵉ arrondissements marseillais qui tout au long du procès a assuré ne rien savoir, accablant son équipe de campagne. Outre la peine d'inéligibilité, trois ans de prison avec sursis et 20.000 euros d'amende ont été réclamés par le ministère public. "On a l'impression que c'est un peu toujours la même histoire: plus on est en responsabilité, moins on est au courant des choses", a relevé le procureur. Se disant "trahi", Julien Ravier a lui expliqué que ce dossier avait "détruit" sa carrière politique et que de toutes manières, il ne comptait "absolument pas y retourner".
Besoin de "bases propres"
À l'encontre de son directeur de campagne de l'époque Richard Omiros, "le chef d'orchestre", et du commandant de police Roland Chervet, qui "poinçonnait" ces procurations hors du cadre légal, des peines de deux ans de prison avec sursis et cinq ans d'inéligibilité ont été requises. S'agissant de l'autre homme politique poursuivi, l'ex-maire de secteur LR Yves Moraine, toujours élu local et vice-président au département des Bouches-du-Rhône, une peine de trois mois avec sursis et 18 mois d'inéligibilité a été requise. Le procureur a rappelé qu'il était impliqué dans un volet différent concernant une trentaine de procurations dans les 6ᵉ et 8ᵉ arrondissements, collectées de façon irrégulière, mais avec le consentement des mandants. Ce procès "pas le plus reluisant" aura en tout cas permis de comprendre les rouages d'une véritable "fabrique à procurations", mise en place dans "un contexte politique d'une ville qui risque de basculer", a insisté Jean-Yves Lourgouilloux.
"Un SMS, un mail avec une pièce d'identité, c'est une procuration"
Cette élection, qui s'était déroulée en pleine période de pandémie de Covid-19, a marqué la fin d'un quart de siècle de règne du maire de droite Jean-Claude Gaudin avec la victoire d'une coalition de gauche, celle du Printemps marseillais. "Un SMS, un mail avec une pièce d'identité, c'est une procuration", "exit donc la phase de validation de la procuration devant une personne habilitée" comme les policiers, a martelé le procureur. Plus de 200 victimes ont été identifiées, mais très peu au final se sont constituées partie civile. "Toutes les personnes qui ont défilé à la barre sont hors-sols (...) et je comprends mieux la défiance totale par rapport à la politique et la démocratie", a regretté l'avocat Samuel Katz, qui intervenait pour une habitante du 11ᵉ arrondissement. Xavier Pizarro, qui défendait l'adjoint au maire de gauche Yannick Ohanessian et ses colistiers qui étaient candidats dans les 11ᵉ et 12ᵉ arrondissement face au LR, a reconnu qu'"être Marseillais, c'est une situation de contrastes", faite
de "merveilleux" (les paysages) et de "tragique" ("la gouvernance de notre ville"). "Est-ce que ce moment va faire exploser la sphère marseillaise pour recommencer sur des bases propres ?", s'est interrogée en sortant Cécile Vignes, élue locale qui avait été une des lanceuses d'alerte dans ce dossier.