Alexandre, Léandre et Evan sont nés sourds profonds et portent un implant cochléaire. Avec d’autres enfants, sourds et entendants, et des musiciens professionnels, ils forment un orchestre inédit au sein du Conservatoire de Marseille. Le film "La Musique sourde" raconte cette formidable aventure.
"On a eu l’idée de monter ce projet un peu fou, vraiment hors norme parce que simplement ça n’existe pas !" Frédéric Isoletta est pianiste et chef d’orchestre au Conservatoire de Marseille. C'est lui qui a créé cet orchestre inclusif, totalement inédit.
Son fils Alexandre est sourd profond de naissance, comme Léandre et Evan. Grâce à la pose d’un implant cochléaire, ces jeunes garçons ont pu entendre et apprendre à parler, au point qu’aujourd’hui on ne se doute presque pas de leur handicap invisible. Pourtant, ils intègrent le monde des entendants au prix d’efforts considérables.
Passionné de musique, Alexandre a appris le violoncelle, sans pouvoir pour autant intégrer un cursus classique. Constatant ses difficultés à jouer dans un milieu entendant, mais aussi les bienfaits que lui apporte la pratique de la musique, Frédéric a rêvé d’un orchestre adapté, pensé spécialement pour son fils et pour d’autres enfants sourds et malentendants.
Ainsi est né l’Orchestre des Colibris. Un endroit privilégié, où ils peuvent se rencontrer et être en confiance.
On fait jouer au foot des aveugles, des unijambistes, on fait des tas de choses, mais on ne fait pas jouer de la musique à des gens sourds et encore moins dans un conservatoire. C’est un vrai pari, mais il n'y a pas de raison que ça ne marche pas !
Frédéric Isoletta
En suivant les trois garçons pendant toute une année, la réalisatrice Daniela Lanzuisi nous plonge avec sensibilité au cœur de ce projet unique au monde.
Découverte des instruments
Au début, il y a la découverte et le choix des instruments : ce sera le violon pour Léandre, la flûte traversière pour Evan. Aucun d'eux n'en avait joué auparavant. Quant à Alexandre, il renoue avec le violoncelle qu’il avait stoppé.
Puis ils se familiarisent avec les professeurs et leurs "jumeaux" : des jeunes entendants de leur âge, qui jouent du même instrument et vont les épauler pendant l’année. Gaia, Suzanne et Alfa sont volontaires et découvrent ainsi les enjeux de la surdité et de la transmission à des enfants qui doivent appréhender la musique de manière différente.
Viennent ensuite des cours de pratique, de solfège, de chants, où le trio progresse et se connecte à la musique, avec l’aide notamment de Malvina : pianiste demi-sourde et pédagogue lumineuse, elle enseigne une approche plus intuitive de la musique et sait comment donner confiance aux jeunes musiciens.
L’enjeu est aussi d’essayer de changer les pratiques du conservatoire, être moins dans l’excellence et l’exigence, au profit du plaisir et de l’improvisation.
J’ai ma place, parce que je me sens libre de faire ce que je veux, même si je rate !
Léandre
Dans ce projet, Alexandre, Léandre et Evan sont bientôt rejoints par des jeunes de l’IRS, l’institut régional de sourds. Eux s’expriment en langue des signes et viennent vivre une expérience plus corporelle de la musique en apportant un "chansigne", un art visuel et corporel qui accompagne la musique.
À travers cette rencontre entre les différentes formes de surdité, le film montre la naissance d’amitiés fortes et le sentiment d’appartenance que ces échanges procurent aux enfants sourds.
Les difficultés sont effacées par la bienveillance de l’équipe pédagogique, la complicité des jeunes et les moments de partage et de joie.
Les garçons le disent eux-mêmes, ils prennent confiance en eux, se sentent mieux, articulent mieux, ils découvrent d’autres sons, c’est vraiment profitable.
Daniela Lanzuizi
Le film nous emmène jusqu’au concert final, aboutissement d’une année de travail. Un moment à la fois joyeux et émouvant où l’orchestre au complet interprète des morceaux chargés de sens et de clins d'œil...
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