Une centaine d'agents de la police municipale de Marseille se sont rassemblés sur le Vieux-Port mardi 8 octobre. Leurs revendications portent essentiellement sur la revalorisation de leur métier et de leurs retraites. Cyril, un agent de 36 ans, raconte la réalité de ce métier "mal considéré".
Ils sont 430 agents de police municipale à Marseille à sillonner la ville. Doléances des comités d’intérêt de quartier, missions conjointes avec la police nationale, contrôles, sécurisation, verbalisations, assistance de la RTM, lutte et prévention de la délinquance, respect du code de la route... Tant de missions pour si peu de reconnaissance.
Ce mardi 8 octobre, ils étaient une centaine sous l'ombrière du vieux-port à Marseille pour faire entendre leur voix, comme Cyril. Avant d'entrer dans la police municipale en 2014, ce Marseillais de 36 ans travaillait en tant qu'assistant d'éducation en collège et lycée. Une reconversion évidente pour lui : "J’avais le contact facile, les discussions faciles avec les jeunes et les moins jeunes."
Mais aujourd'hui, il constate certaines dérives. Lui et ses collègues déplorent une évolution de leur métier et de leurs prérogatives, sans contre-partie : "Les prérogatives sont quasiment les mêmes que la police nationale, explique Cyril. Pourtant on est toujours considérés comme des agents de la fonction publique territoriale, sans dénigrer les autres".
Cyril fait le même constat lorsqu'il s'agit de reconnaissance de la part des badauds : "Quand on intervient sur quelqu’un qui vient d’arracher un sac on se fait applaudir. Cinq minutes après on verbalise un mec sur un passage piéton et on se fait insulter."
Une de leurs revendications principales porte sur la revalorisation générale des grilles indiciaires et la bonification quinquennale en adéquation avec les autres corps de la sécurité de la fonction publique.
Ils demandent l'intégration de leur prime, leur indemnité spéciale de fonction, dans le calcul de leurs retraites.
"Les pompiers ont obtenu il y a quelques années d’avoir la prime intégrée, donc nous aussi on la voudrait, on fait partie des forces de sécurité, de secours au même titre que la gendarmerie nationale et les pompier... alors pourquoi pas nous ?"
On veut un traitement particulier, pas forcément de faveur mais à la hauteur du travail qu’on fournit et du risque que l’on prend au quotidien.
Police municipale : un métier à risques
Depuis 2015, la police municipale de Marseille est armée et possède des gilets pare-balles. "Nous avons des armes létales, des pistolets à impulsion électrique, tout est bien encadré mais le souci c’est que nos missions évoluent mais que le volet social n’évolue pas et que notre métier n’est pas retenu comme un métier à risques".Il y a des journées que Cyril n'oublie pas. Comme celle du 19 février dernier. Ce jour-là, un homme a attaqué des passants avec un couteau près de la Canebière. Trois personnes ont été blessées dans l'attaque.
Cyril n'était pas loin, il a vu passer l'agresseur, il s'est précipité vers lui, celui-ci a sorti une arme de poing et a tiré sur une femme, blessée. La BAC l'a abattu. "Il aurait pu faire un massacre", se remémore Cyril.
Suite à cet épisode "traumatisant", certains collègues de Cyril ont été suivis par un psychologue. Lui n'a pas dormi pendant plusieurs nuits : "Quand vous entendez des coups de feu en pleine Canebière à 4h30 de l’après-midi, qu'il n’y a plus un seul bruit à part ces coups de feu, que tout le monde court dans tous les sens... ça surprend. On a signé pour ça, mais ça surprend toujours."
Les policiers municipaux peuvent déclencher une cellule psychologique par simple demande à leur hiérarchie. Cela a été le cas pour l'incident de la Canebière. Malheureusement, cette situation n'est pas si rare.
En octobre 2017, Cyril ne travaillait pas le jour où deux jeunes filles se sont fait égorger sur le parvis de la gare Saint-Charles. Mais ceux qui y étaient ont toujours du mal à en parler.
Sans parler des altercations les samedis matin à la sortie de la boîte de nuit le Flamingo, rue Venture."Malheureusement à Marseille, pas mal de monde est armé et on se méfie de tout le monde", se désole Cyril.
Les agents de la police municipale arrivent les premiers sur place sur beaucoup d’interventions. Le risque est donc grand pour ce corps de métier où les femmes sont majoritaires : "A partir du moment où on est en uniforme, l’uniforme est une cible, on sait très bien qu’on est des cibles."
De l'espoir pour l'avenir
Malgré la difficulté de son métier, Cyril ne regrette pas. "On a la chance d’être une grande famille". Horaires, relations avec les supérieurs... Tout se passe pour le mieux en interne. Reste à trouver de la légitimité et de la reconnaissance de l'extérieur. Et cela passe d'abord par une revalorisation des retraites.Leur mobilisation de ce mardi 8 octobre a porté ses fruits. Cyril et ses collègues ont été reçus par le chef de cabinet du préfet de région à midi.
"Il a été très accueillant, a pris en compte toutes nos revendications. On espère avoir un retour de la part du ministère de l’Intérieur et des collectivités territoriales."