Deux jeunes Marseillais bondissent sur les vitrines du centre-ville comme des félins. Et éteignent les enseignes lumineuses. Leur vidéo a été vue près de 2 millions de fois sur Instagram, Twitter et TikTok. Leur motivation : l'écologie.
"Et si on éteignait les lumières des magasins ?" Lundi 18 janvier, vers 17 heures, dans l'hypercentre de Marseille, Yanis et Maxime rentrent chez eux quand ils ont cette idée.
Les deux amis ont vu une vidéo avec la même intervention à Aix-en-Provence. Ils improvisent, s’élancent sur les vitrines des rues Saint-Ferréol et Paradis, et se filment. Ils appuient simplement sur un interrupteur. L’action dure une demi-heure. Leur vidéo cartonne sur les réseaux sociaux.
C’est un mélange étonnant entre le parkour et l’écologie. Le parkour est une discipline acrobatique pratiquée en milieu urbain. Yanis et Maxime la pratiquent depuis cinq ans. Ils sont "traceurs", s’entraînaient en salle (quand elles étaient ouvertes) et en plein air. Ce sont des acrobates. Tout le monde ne peut pas atteindre cette hauteur sans se blesser.
@yanishaggui Petit geste écolo (puis s/o la bac qui nous on vue mais pas embarqué) #ecologie #marseillais #marseiller #marseille13 #parkour #challenges #teamjul
♬ Aesthetic - Xilo
La pollution lumineuse ne leur résiste pas "On se sent concernés parce qu’on est jeunes. C’est pour notre futur. On n’est pas des activistes fous furieux, nous on pense à plus tard", commente Yanis.
Yanis a 21 ans, Maxime 17 ans. Le premier est apprenti menuisier, le second lycéen. "Chacun peut faire quelque chose à son échelle, petits ou grands." Ils trient leurs déchets, font des gestes simples, et viennent de basculer dans le spectaculaire.
"À cette heure-là, les magasins sont fermés, personne n’est dans la rue, personne ne peut nous déranger".
Personne… ou presque. La BAC (Brigade anticriminalité) est là. Les policiers demandent aux jeunes ce qu’ils font. "On a répondu très calmement, on a expliqué qu’on éteignait les lumières". Et les policiers ont répondu "ça va, c’est bien", selon Yanis.
Le geste n’est pas fréquent, mais il n'est pas nouveau non plus. Il y a dix ans déjà, certains citoyens éteignaient des interrupteurs.
Haha je faisais ça régulierement quand je suis arrivé à Paris il y a 10 ans. Bon un jour, j'ai croisé la BAC pendant que je le faisais, mon message écologique ne les a pas spécialement touchés
— Julien Thibon ?? (@jthibon) January 19, 2021
Enseignant-chercheur en écologie des sols à Aix-Marseille Université, Raphaël Gros salue ce type d’initiative citoyenne "à condition qu’elle soit sans casse et sans violence". L’universitaire considère que ces actions sont nécessaires et participent à la prise de conscience collective. Surtout quand les médias prennent le relais.
Dans nos villes, même à Marseille, des papillons vivent la nuit, des batraciens se nourrissent et se reproduisent. La lumière les gêne, elle peut avoir des conséquences fortes sur la pollution urbaine. Et toutes les espèces sont liées entre elles. Les décorations de Noël ont déjà suscité débat et émotion. La nuisance des enseignes est moins connue.
En tant qu'enseignant, Raphaël Gros n'incite pas ses élèves à entreprendre des actions. Il veut leur faire prendre conscience que la planète est en danger. " Toutes les actions vont participer à l’accélération de la transition écologique, sauf si elles sortent du cadre du droit. Là, elles peuvent se retourner contre les citoyens qui les mènent."