Pour la deuxième année consécutive, Marseille accueille le Refugee Food Festival qui propose aux restaurateurs de recevoir dans leurs cuisines des chefs réfugiés. Rencontre avec Anthony, un Nigérian de 30 ans qui s’est vu confié les cuisines d'un restaurant marseillais.
Seul devant une grosse cuisinière métallique, Anthony jette ses épices dans une large marmite d’où s’échappe une odeur alléchante. Aujourd’hui et demain, ce Nigérian de 30 ans sera officiellement chef à la Piscine, un restaurant du Vieux-Port à Marseille.
Déguster une soupe d’egusi
Sur la carte, en plus des plats habituels, les clients pourront opter pour une recette typiquement nigériane : la soupe d’egusi. Si Anthony est ici, c’est un peu grâce à Georgiana, la cheffe habituelle du restaurant. C’est elle qui, pour la deuxième année consécutive, a choisi de s’associer au Refugee Food Festival.
Ce festival, c’est une sorte de parenthèse dans mon quotidien, je trouve ça super de se retrouver entre passionnés de cuisine de différents pays
raconte-t-elle en souriant.
Prendre le contre-pied des discours misérabilistes sur les réfugiés
Arrivé du Nigéria il y a trois ans en tant que réfugié, Anthony se dit “très heureux” de participer au Refugee Food Festival et prend l’expérience comme une opportunité de rebondir professionnellement. “Rebondir professionnellement”, c’est d’ailleurs l’un des objectifs du festival lancé en 2016 par un couple de Parisiens, Louis Martin et Marine Mandrila. L’idée majeure : “prendre le contre-pied des discours misérabilistes à l’égard des réfugiés” et changer le regard porté sur les demandeurs d’asile à travers le plaisir des papilles. Cette année, c’est une centaine de restaurants dans 14 villes du monde entier qui ouvriront leurs portes à des cuisiniers réfugiés.
Des cuisiniers rémunérés pour leur travail
“Ce n’est pas du tout une opération de communication pour les restaurateurs, c’est une véritable démarche citoyenne de leur part”, assure Frédérique qui co-organise l’événement dans la cité phocéenne. Les chefs sont bien rémunérés pour leur travail et certains restaurants, comme la Mercerie à Marseille, reversent une partie des bénéfices à des associations.Je suis en train de préparer une soupe d’Egousi, c’est selon moi l’un des meilleurs plats africains. Cette soupe est composée d’une multitude de produits frais : de l’egousi (graine de cucurbitacées), de poivre, d’oignons, de poisson grillé, de menthe et de nombreux légumes.
explique Anthony.
Grands chefs ou cuisiniers en fast-food
Depuis deux ans, Marseille accueille l’événement, qui est financé par L'Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). En collaboration avec la Plateforme d'Accueil pour Demandeurs d'Asile (PADA), Kévin et Jérôme, bénévoles pour le festival, sélectionnent leurs cordons-bleus. Des profils différents : grands chefs ou cuisiniers de fast-food; tous sont bienvenus pourvu que l’art culinaire ne leur soit pas étranger.
Des épices, mais pas trop !
Anthony lui, était cuisinier chez Captain Cook, une chaîne de restauration rapide. Mais pour lui, la cuisine, ça reste une affaire de famille. Chez lui tout le monde cuisine et les moments autour de la table sont sacrés. Alors c’est enthousiaste “mais un peu stressé” qu’Anthony va proposer aux Marseillais sa recette nigériane préférée. Comme au pays ? “Avec un peu moins d’épices quand même”, rie Georgiana.Les rendez-vous des globe-trotters gastronomes
Cuisine nigérienne à La Piscine, cuisine vénézuélienne au Café Borély, cuisine éthiopienne Chez SOJI, cuisine soudanaise aux Grandes Tables de la Friche, cuisine irakienne à La Mercerie Marseille, pâtisserie syrienne pendant le vernissage de l’exposition Ai Wei Wei Fan-Tan au Mucem, et participation aux Dimanches de la Canebière.