Michael Chour, ce Marseillais qui lutte contre le commerce de viande de chien au Cambodge

Installé depuis 15 ans en Thaïlande, Michael Chour a pris fait et cause pour sauver les chiens de l'abattage. Le commerce de la viande de chien reste très répandu au Cambodge. 500.000 chiens seraient ainsi kidnappés chaque année en Thaïlande pour être revendus dans les pays voisins.

De ses premiers jours à Buriram, cette province de la Thaïlande qui borde le Cambodge voisin, Michael Chour en garde un souvenir plein d'émotion.

"La première chose que j’ai vu en arrivant, c’était des chiens ficelés sur une moto. J’ai questionné le type qui conduisait et il m’a répondu qu’il allait au Cambodge vendre les chiens à un abattoir".

C’était il y a quinze ans. Ce marseillais d’adoption n’est plus jamais reparti et il s’est installé ici,  au milieu de nulle part, loin de la frénésie de la capitale, Bangkok, et de ses millions de touristes.

"J’ai eu un déclic, dans mon coeur et dans mon esprit. Je savais qu’il fallait que je reste et que je fasse quelque chose pour ces animaux".

Si le commerce de la viande de chiens et de chats est devenu illégal en Thaïlande depuis 2014, les pays voisins, Cambodge, Laos et Vietnam font de la résistance.

Un commerce très lucratif

Malgré la disparition du marché Thaïlandais, le trafic bat son plein, car le commerce a besoin d’être alimenté. En l'absence de toutes données officielles, selon certaines estimations, 500.000 chiens seraient kidnappés chaque année en Thaïlande pour être ensuite revendus dans les pays voisins.

Bien plus même à travers l'Asie, où selon les ONG "Soi Dog Foundation" et "Four paws", un à deux millions de chiens par an sont tués pour être consommés.   

Il faut dire que si, certains attribuent des pouvois magiques ou sexuels à cette viande, son commerce est surtout très lucratif. La viande de chien est bon marché. Elle se vend environ deux à trois dollars le kilo (1,80 à 2,70 euros).

Les fournisseurs de chiens peuvent ainsi gagner jusqu'à 1.000 dollars par mois, soit environ 900 euros, alors que salaire moyen au Cambodge est de 200 dollars (180 euros).

Ils disent que cette viande a un goût très spécial et lui attribuent des pouvoirs magiques ou sexuels

Au Cambodge, ou le commerce de la viande de chiens est parfaitement légal, "il y a des abattoirs dans chaque ville, pour fournir les restaurants", affirme Michael Chour.

Les chiens sont entassés dans de toutes petites cages avant d’être tués de la pire des façons : "Ils sont égorgés ou même plongés dans des grandes bassines d’eau bouillante, encore vivants. Ils disent que cette viande a un goût très spécial et lui attribuent des pouvoirs magiques ou sexuels."

Plus l’animal souffre, meilleure sera la viande

Certains affirment même que, plus l’animal souffre avant de mourir, meilleure sera la viande… Inacceptable pour Michael Chour, qui se souvient encore de son enfance dans le Var, à Saint-Maximin, dans la maison familiale, "une grande bâtisse ou vivaient avec nous, nos 19 chiens".

Lorsque j'ai découvert le Dog Meat Trade, ça allait à l’encontre de tout ce que j'avais vécu dans la vie

"Le climat était doux, la vie était calme", se souvient-il. "De cette période, je garde des souvenirs merveilleux, des heures entières passées à plonger dans les calanques".

Lorsqu’il quitte la France pour parcourir l’Asie, le Marseillais était loin de se douter qu’il allait y trouver sa voie. "Lorsque j'ai découvert le Dog Meat Trade (le commerce de viande de chiens, ndlr), ça allait à l’encontre de tout ce que j'avais vécu dans la vie, où les chiens sont des animaux domestiques, aimés, soignés et faisant partie d'une famille".

Il se décide à créer Sound of animals, une association qui a pour but de combattre le commerce de la viande de chiens dans la région.
Pour sauver les chiens des abattoirs cambodgiens, Michael Chour a une méthode : la persuasion. Il discute longuement avec les propriétaires d’abattoirs, tente de convaincre.  

"Je vais les voir souvent, on discute. On parle de religion. Je leur rappelle que le bouddhisme n’autorise pas cela. Je leur parle de leur karma. Je leur demande s'ils n’ont pas peur de se réincarner en chien qui va être tué pour être mangé ?".

Parfois aussi, les abattoirs n'ont pas de licence du gouvernement et les propriétaires deviennent conciliants. "Je leur demande de libérer quelques chiens et de me les donner".

Souvent, il parvient à en sauver 3 ou 4. "C’est une satisfaction. Mais aussi un crève-cœur. Car parfois, on laisse derrière nous des dizaines de chiens", ajoute-t-il.

Dans une des vidéos de sauvetage fournie par l’association, on voit Michael Chour se lamenter de devoir abandonner à une mort certaine près d’une vingtaine de chiens que les propriétaires refusent absolument de laisser partir. 

Dans une autre, il réussit à convaincre un propriétaire de le laisser sauver quelques chiens. Dans cet échange, le proprietaire admet faire le commerce de viande de chiens "pour de l’argent".
Le commerce de viande de chien, une pratique courante au Cambodge

Le commerce de viande de chien, une pratique courante au Cambodge. Un Marseillais se bat pour les sauver Un récit édifiant à retrouver ici ?https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/bouches-du-rhone/marseille/michael-chour-ce-marseillais-qui-lutte-contre-commerce-viande-chien-au-cambodge-1761789.html

Publiée par France 3 Provence-Alpes sur Jeudi 12 décembre 2019
Pourtant, Michael Chour se refuse à acheter les chiens aux abattoirs. "Avec l’argent, ils iraient en racheter d’autres dans l’heure qui suit", affirme-t-il. 

Car le problème est avant tout économique. Ces régions rurales du Cambodge sont encore très pauvres et la viande de chien reste la moins chère sur le marché. "Les gens vendent même leur propre chien aux bouchers pour quelque dollars", avoue-t-il.

Les chiens que Michael Chour réussit à sauver des abattoirs cambodgiens, il les emmène dans son refuge, de l’autre côté de la frontière, en Thaïlande.

Son chenil, le "Blue Dream Shelter" abrite aujourd’hui 232 chiens, pour la plupart sauvés in extremis d’une terrible mort. Mais ce travail inlassable a un coût.

Le refuge dépend uniquement des dons et du travail des volontaires. Ainsi, le terrain sur lequel est construit le Blue Dream Shelter a été acheté grâce à un riche donateur britannique, fervent défenseur du meilleur ami de l’homme.

A l’abri du commerce de la viande de chiens, ils sont ici nourris et soignés, mis dans des familles d’accueil, avant d’être éventuellement adoptés.

Une fois par mois, Michael Chour se rend à Bangkok pour emmener à l’aéroport les petits chanceux qui ont été choisis. Adoptés en Angleterre, aux USA ou en Europe, certains chiens du Refuge Blue Dream vivent paisiblement aux quatre coins du monde.
Elevé près de Marseille dans l’amour des chiens et des animaux, Michael Chour, 49 ans, tire aujourd'hui une grande fierté de voir que les mentalités changent peu à peu.

"L'Asie évolue très rapidement. L'évolution doit aller de pair avec éducation et compassion. Aujourd'hui plus personne n’a besoin de tuer des chiens pour sa survie", affirme le Marseillais.

"Des gens commencent à venir me voir et demander si on peut vacciner leur chien, ou le soigner, s'il s’est blessé". Un premier signe selon lui.

Mais la route est encore longue. Au Vietnam voisin, le gouvernement vient bien d’annoncer une interdiction de la vente de viande de chiens pour les restaurants. Mais l’interdiction concerne uniquement la ville d’Hanoï et seulement à partir de 2021.

Entre 10 et 20 millions de chiens mangés en Chine

Quant à son voisin chinois, le festival de Yulin traîne lui aussi une mauvaise réputation. Malgré son aspect traditionnel, cet évènement annuel qui célèbre l'arrivée du solstice d'été reste très controversé.

La "fête du litchi" ou de "la viande de chien" de Yulin soulève un immense tollé international depuis sa création en 1990, sous couvert de dynamiser l'économie de cette provicne du sud de la Chine. 

Malgré les contestations et le battage des ONG, des milliers de chiens et chats sont tués durant ce festival pour être consommés.

Plus généralement, la consommation de viande canine fait aussi partie des traditions ancestrales chinoises. Selon les estimations, entre 10 et 20 millions de chiens sont ainsi mangés chaque année, en Chine.

Une plainte pour acte d’euthanasie

L’action de Michael Chour ne laisse pas les autorités indifférentes et aiguise peut-être aussi certaines jalousies, liées à l'argent envoyé par des donateurs pour le refuge.

Le Français fait l’objet d’une plainte pour des actes d’enthanasie présumés, déposée par d’anciens employés. Elle n’a toujours pas été instruite et elle ne le sera pas avant plusieurs mois, selon une source locale.

Des faits à prendre avec précaution. Les employés en question auraient reconnus avoir exagéré en parlant de plusieurs actes. Il y aurait toutefois bien eu une histoire portant sur un chien euthanasié par erreur, a-t-on confirmé de même source.

En parallèle, un médecin vétérinaire accuse le Français de se présenter comme vétérinaire, ce qu’il dément.

Reste une procédure qui démontre peut-être que la campagne de Michael Chour au profit des chiens du Cambodge froisse le stoïcisme d'un pays attaché à ses traditions et à l'économie qu'elles génèrent.
 

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