Mort de Mohammed à Marseille : trois questions sur les armes "à létalité réduite"

Ces armes sont à nouveau au centre de polémiques après la mort de Mohammed à Marseille, probablement tué par un tir de LBD. Pour Paul Rocher, économiste et auteur d'un livre sur le maintien de l'ordre, elles doivent être bannies.

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Des armes à "létalité réduite", mais capables de tuer ou de mutiler. Après la mort de Mohammed Bendriss, dans la nuit du 1er au 2 juillet à Marseille, probablement tué par un tir de LBD en marge des émeutes, de nombreuses critiques se sont à nouveau portées sur les armes à "létalité réduite". Pour Paul Rocher, économiste et auteur de "Gazer, mutiler et soumettre", ces équipements ne devraient pas être utilisés pour le maintien de l'ordre.

Pourquoi ces armes sont dites "à létalité réduite" ?

Le LBD projette une munition en caoutchouc, pensée pour être assez puissante pour immobiliser, sans risquer de perforer la peau et de créer des blessures mortelles. Mais si le projectile touche certaines zones, il peut devenir mortel. "Ces armes sont à létalité réduite seulement dans certaines conditions, explique Paul Rocher. Dans la rue, c'est impossible d'avoir les mêmes conditions. Le tireur n'est pas statique, la cible non plus, encore moins quand elle se sait visée."

Autre problème pour l'auteur, les conditions réelles de manifestation. "Dans un contexte de maintien de l'ordre, il y a souvent de la foule, du stress et une mauvaise visibilité à cause de gaz lacrymogène utilisé massivement par la police". Autant de facteurs qui peuvent rendre un tir beaucoup moins précis, et risquer de toucher des zones vitales.

Pourquoi ces armes sont utilisées par les forces de l'ordre ?

Ces armes sont utilisées, en théorie, en dernier recours avant les armes à feu par les forces de l'ordre, pour "se défendre ou défendre une position", précise le site spécialisé Maintien de l'ordre. Pour Paul Rocher, elles permettent de "garder un pouvoir de répression, sans être aussi violente et mal perçue qu'une arme létale."

Selon l'économiste, le développement de ce type d'équipement est lié au contexte économique. "Depuis les années 1990, le ministère de l'Intérieur achète de plus en plus d'armes diverses, en écho à l'introduction du néolibéralisme en France. Pour faire accepter le fait qu'on prend à la masse pour redistribuer à un petit groupe, l'Etat utilise la force."

Faut-il continuer d'utiliser ces armes ?

Pour l'économiste, les munitions à létalité réduites ne devraient plus être utilisées en maintien de l'ordre. "La dangerosité d'une arme se mesure aussi aux effets comportementaux qu'elle produit. En plus du fait qu'elles peuvent être mortelles, le terme de létalité réduite, ou non létal, peut encourager les policiers à les utiliser". Selon lui, ces équipements entraînent en réalité une "brutalisation" du maintien de l'ordre.

Paul Rocher explique également que de nombreux policiers se perçoivent comme dans une "citadelle assiégée". "Il va y avoir de la méfiance vis-à-vis de la population, voir de l'hostilité, précise l'auteur. Les agents vont se raconter des histoires entre eux, telle unité aurait subi tel type de violence. Au final, cela accroit le risque de débordement contre les manifestants". 

Les armes de létalité réduite sont aussi critiquées par des associations. Depuis le 28 août, Amnesty International a lancé une campagne d'affichage dans plusieurs villes de France pour suspendre l'utilisation du LBD.

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