Figure culturelle emblématique de Marseille, homme de théâtre, de luttes sociales, Richard Martin est décédé ce lundi 16 octobre, à l'âge de 80 ans. Il avait crée le Théâtre Toursky, dans l'un des quartiers les plus déshérités de Marseille et s'était battu toute sa vie pour l'accès à la culture.
Le monde de la culture marseillaise est en deuil. Le fondateur et directeur du théâtre Toursky à Marseille, Richard Martin, est décédé ce lundi 16 octobre, à la Maison de Gardanne où il était hospitalisé. Il s’est éteint à l’âge de 80 ans.
Dernier acte de Richard Martin
Après avoir si souvent joué avec la mort, Richard Martin a décidé de se jouer d'elle. Depuis hier, l'homme de théâtre se présente à nous, dans un son cercueil, pour un ultime adieu. "Rejoignez-nous pour que vive à jamais l'âme et l'esprit de son fondateur Richard Martin", peut-on lire dans le communiqué de presse du théâtre.
Afin de lui rendre un dernier hommage, son cercueil est exposé depuis ce mardi 17 octobre, sur la scène de son théâtre, et ce, pendant plusieurs jours et nuits.
Mais Richard Martin reste bien vivant, il hante nos esprits pour nous rappeler l'essentiel : La fraternité, avec les hommes par exemple, à travers le Bateau pour la Paix qu'il avait affrété pour faire le tour de la Méditerranée.
En 2001, il crée sa première Odyssée, "détourne" un porte-hélicoptères roumain, un navire de guerre pour mettre l’Art à la place des canons et faire la guerre à la guerre. À bord de ce destroyer, des canons et deux cents militaires roumains dont soixante cadets. Il embarque une centaine d’artistes méditerranéens pour un périple en Méditerranée.
Pendant deux mois, artistes et militaires ont uni leurs efforts en faveur de la paix, de la fraternité et de la rencontre des cultures.
"Nous nous arrêterons à Mostaganem, Alger, Annaba, et même des couloirs seront ouverts jusqu'au sud de l'Algérie pour que les Touaregs et toutes les cultures du Sud, viennent et présentent leurs différences"
Richard Martin
Le plaisir de la scène
Pour Richard Martin, le plaisir de jouer était capital. Sur cette photo, on le voit rayonner avec ses amis artistes en 2022, dans la pièce Petit boulot pour vieux clown.
"Ce sont des amis de cours de récréation. On continue à jouer ensemble comme on le faisait quand on était petits", rembobinait-il pour France 3 Provence-Alpes en 2022.
Il donnait sa chance à tous
La danse et chorégraphe, Marie-Claude Pietragalla, en a profité et lui en est reconnaissante. "Si j'interroge mon coeur, évidemment, la disparition de Richard Martin, est très douloureuse parce que Richard et Françoise son épouse, c'était un membre de ma famille. Quand je suis arrivée à Marseille, ils m'ont accueillie les bras ouverts", s'émeut Marie-Claude Pietragalla.
Richard Martin aimait son théâtre Le Toursky plus que tout. Il avait le nez pour dénicher les talents, y compris dans le 3ème arrondissement de Marseille, l'un des quartiers les plus pauvres d'Europe.
Le comédien marseillais Bouchta le décrit avec tendresse, "Il m'a fait du bien. Il savait écouter. J'ai pleuré dans ses épaules, j'ai beaucoup pleuré. Mais dès que je l'ai vu dans ce théâtre, j'ai tout de suite remarqué sa tête de Gepetto, et je savais qu'il allait recoller mes morceaux, que j'étais son Pinocchio",
"Il aimait la vie, il aimait les animaux, il aimait les arbres, il aimait le soleil, il était émerveillé de ce monde. Il savait que le monde était mal, la guerre, l'intolérance, l'injustice, il savait tout ça mais il passer au-dessus de tout ça, il semait l'amour partout".
Un homme attaché à la liberté de l'Art
Et puis il y a les grèves de la faim, les combats contre les injustices, les batailles qu'il a toujours menées, pas pour lui, mais toujours pour les autres. Jusqu'au bout, le fondateur et infatigable directeur du théâtre Toursky s'est battu pour que son théâtre reste indépendant.
Le 7 février, Richard Martin avait entamé sa quatrième grève de la faim pour protester notamment contre une baisse de subventions par la mairie, qui pointait aussi une nécessaire mise en conformité de la convention d’occupation du théâtre, hébergé dans un bâtiment municipal. Richard Martin y avait surtout vu une manière de le pousser vers la sortie. Richard Martin y avait surtout vu une manière de le pousser vers la sortie.
«Ils pensent que je n’ai plus rien à dire ? Je suis peut-être un has been, mais pas dans la poésie !» leur renvoyait alors le comédien qui, dans son combat, avait reçu le soutien de nombreux artistes, signataires d'une pétition qui a réuni plus de 20 000 personnes.
"Richard Martin va manquer au théâtre au plan national comme international pour des raisons qui touchent vraiment à l'humanité la plus profonde. C'est un homme de paix, pour la paix, c'est un homme contre la guerre. Aujourd'hui, sa voix va manquer mais son souvenir est toujours présent, et je crois que personne ne pourra le déloger de ce théâtre", François Chaintron, président de l'association des amis de Richard Martin.